Greta Thunberg : pourquoi elle agace, pourquoi elle fascine
Greta Thunberg : pourquoi elle agace, pourquoi elle fascine
Elle s’apprête à traverser l’océan Atlantique en voilier pour se rendre au sommet mondial sur le climat, le 23 septembre. Depuis sa médiatisation en 2018, Greta Thunberg concentre les critiques autant qu’elle fascine. Stratégie de communications, discours jugé trop alarmistes… Retour sur les éléments qui font de cette adolescente de 16 ans une personnalité à la fois aimée et détestée.
En moins d’un an, Greta Thunberg est devenue le symbole de la lutte contre le réchauffement climatique. Du haut de ses 16 ans, cette Suédoise née dans une famille d’artistes, a initié le mouvement Fridays for future, lancé en août 2018. Des centaines de milliers de jeunes ont suivi son exemple en mettant en place des grèves pour le climat dans les collèges et les lycées.
Depuis son discours remarqué à la COP24, fin 2018, Greta Thunberg a enchaîné les apparitions médiatiques et a fait la une du prestigieux magazine américain Times. Ce mercredi 14 août, celle qui renonce à prendre l’avion pour des raisons écologiques, est montée à bord d’un voilier zéro carbone pour traverser l’Atlantique en deux semaines. L’adolescente citée pour le prix Nobel 2019 a été invitée par le secrétaire général des Nations unies à assister au sommet mondial sur le climat, le 23 septembre.
Malgré sa notoriété, la jeune militante écologiste suscite des controverses. « Gourou apocalyptique » pour certains, « idole » pour d’autres… Explications en quatre points sur ce qui fait de Greta Thunberg une personnalité clivante.
Parce qu'elle est devenue une star
Issue de la génération 2000, Greta Thunberg est née avec les réseaux sociaux. Aujourd’hui suivie par plus de 4,3 millions de personnes sur les différentes plateformes, la jeune militante a su s’en saisir pour faire connaître le « Friday for future ». Celle qui avait entamé seule sa grève devant le parlement suédois munie d’une simple pancarte, a été suivie par des milliers de jeunes à travers le monde à l’automne 2018.
« C’est le premier cas de starisation des adolescents sur un sujet aussi politique », analyse Philippe Moreau-Chevrolet expert en communication et enseignant à Science Po Paris, interrogé par Ouest-France. « Le phénomène agace car il est inédit et hors norme. »
Parce qu'elle symbolise le conflit entre les générations
Le jeune âge de la militante fascine autant qu’il divise. Lors de son passage devant l’Assemblée nationale fin juillet, la militante a été qualifiée de « prophétesse en culottes courtes » par le député LR Guillaume Larrivé.Mais au-delà de ces critiques, « la jeunesse de Greta Thunberg est aussi son meilleur porte-étendard », analyse Philippe Moreau-Chevrolet. À travers son positionnement, la militante écologiste s’inscrit dans une tendance déjà engagée par la jeunesse, comme en témoigne la forte mobilisation des jeunes pour l’écologie lors des élections européennes.
Dès 2015, en marge de la COP21, le mouvement Conference of Youth avait mobilisé des milliers de jeunes issus de différents pays pour sauvegarder l’espèce. « Greta Thunberg incarne ce clivage entre les jeunes et les adultes, elle démontre qu’on peut parfaitement tenir un discours intelligent à 16 ans et être une source d’inspiration », poursuit l’expert en communication.
Atteinte du syndrome Asperger, une forme d’autisme, la jeune militante le revendique comme une force et souhaite aussi encourager les jeunes à s’accepter malgré les différences.
Parce que son discours fait peur
Laurent Alexandre, essayiste et médecin fondateur de Doctissimo, fait partie de ceux qui s’opposent fermement à la jeune militante, multipliant notamment les tweets assassins à son encontre. « Son discours est récupéré par une mouvance apocalyptico-effondriste d’ultragauche favorable à la suppression de l’économie de marché, prônant la décroissance », indique-t-il dans les colonnes du Parisien.
Selon Philippe Moreau-Chevrolet, « ces arguments qui dénoncent son discours alarmiste sont difficilement recevables car, en dehors de Greta Thunberg, les rapports préoccupants et alarmistes sont déjà présents dans l’espace public. »
Greta Thunberg s’inscrit dans les préoccupations contemporaines. L’écologie occupe une place de plus en plus importante dans le quotidien des Français. D’après les données récoltées lors du Grand débat national, plus de 80 % d’entre eux pensent pouvoir « contribuer à protéger l’environnement ».
Parce qu'elle est très entourée
Les actions de Greta Thunberg se veulent fortes et symboliques. « C’est un militantisme à l’anglo-saxonne très méthodique, où rien ne dépasse, très à l’opposé de ce que l’on connaît en France. Elle a aussi un entourage qui l’encadre et qui la protège. Elle doit rester vigilante pour ne pas faire de faux-pas car le moindre décalage entre son discours et ses actions peut lui être repproché », observe Philippe Moreau-Chevrolet.
Dernière polémique en date, l’usage d’un voilier luxueux pour se rendre à New-York, sponsorisé par BMW. « Cela fait écho à un autre clivage qui est celui de l’écologie et de l’économie. En effet, ce mode de vie très écologique est pour le moment réservé aux plus aisés. »
La jeune activiste a également été au cœur d’accusations affirmant qu’un entrepreneur suédois se servirait de son image pour promouvoir sa start-up de « croissance verte » We Don’t Have Time. Ce réseau social cherche à mobiliser les écologistes à travers le monde pour lutter contre le changement climatique. Face aux critiques l’adolescente avait affirmé sur Facebook que son action est individuelle : « Beaucoup de gens aiment répandre des rumeurs disant que j’ai des gens "derrière moi" ou que je suis "payée" ou "utilisée" pour faire ce que je fais. Mais il n’y a personne "derrière" moi, sauf moi-même », avait-elle alors déclaré.
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