La mare à Magny,





La mare à Magny,
Nouvelle de Paul Edouard GOETTMANN

C'était une époque troublée . J'étais trop petit, j'avais huit ans à la fin de la guerre en 1944 en ces temps là, papa, dès son service fini au poste de police de Neuilly Plaisance, en soirée allait en vélo jusqu'à son jardin à quelques mètres de la mare à Magny, arroser ses légumes qu'il avait patiemment plantés. Il y avait des choux, des pommes de terre, des carottes, des navets, des haricots, quelques touffes de persil, des ails et des oignons.
J'avais la joie d'aller avec lui chaque jeudi, assis dans la brouette qu'il poussait jusqu'à la mare. Dès l'arrivée, je m'empressais de déballer ma canne à pêche, faite d'une branche de saule, en m'installant sur l'herbe de la berge. Là, j'asticotais les épinoches que je remettais systématiquement à l'eau, ordre de papa. Aux époques de récoltes, la brouette était pleine, je gambadais au retour à côté jusqu'à la maison de la rue Victor Hugo. Maman se dépêchait de rentrer tous ces légumes dans la grange fraîche accolée à la maison. Curieusement à cette époque de pénurie, personne n'avait eu l'idée de voler quoi que ce soit! Les ails et les oignons pendaient par des ficelles en raffia accrochés aux poutres sous le toit, les pommes de terre et les autres légumes bien rangés sur des clayettes!
Un souvenir précis et étranges me revenait souvent, j'en eu bien longtemps après la signification. A l'entrée de la grange, à l'intérieur, près de la porte, était accrochée en permanence une musette, bien trop haute pour que je puisse regarder à l'intérieur. Tout le temps de la guerre, je l'ai toujours vue pendue au dessous de la lampe. Bien longtemps après, à la mort de mes parents, une tante se décida à m'avouer le secret de famille, l'histoire de la musette!
Maman, d'origine allemande par ses parents, avait été recrutée à la ''komandanture'' de la rue des Peupliers. Tout un immeuble avait été réquisitionné par l'armée allemenande, pour l'installation de leurs bureaux, je n'ai jamais su ce qu'étaient devenus les locataires! Mon père, simple flic au commissariat de Neuilly Plaisance avait une double vie, flic et communiste, il s'était résolument engagé dans la ''Résistance''. Son rôle était de divulguer les renseignements obtenus. Maman se faisait un devoir de le renseigner sur ce qui se passait à la Komandanture et Papa d'en renseigner le réseau. Cette tante m'a dévoilé par la suite, que lorsque l'on frappait à la porte, c'était toujours elle qui allait voir ce qui se passait. Si ce n'était pas une connaissance, Papa prenait sa musette, sautait le mur et se retrouvait chez le voisin. Que celui ci soit béni, jamais il n'a dénoncé mon père!
La mare à Magny fait remonter d'étranges souvenirs, le pharmacien de la commune avait une étrange passion pour mes parents, cela m'agaçait au plus haut point. Là aussi, je me fais tout petit devant le souvenir de mes parents, j'étais tellement ignorant des faits, même après la guerre. C'est ce pharmacien qui m'a lui même appris quelques jours avant mon mariage, ce qu'il devait à mes parents. Maman avait appris que le pharmacien allait être entendu prochainement par les agents de la **kommandanture**, qui le soupçonnait d'être juif. Celui ci n'avait jamais arboré l'étoile jaune! Mes parents en quelques jours seulement, l'on aidé à falsifier ses papiers. Un curé en Alsace avait fabriqué un faux certificat de bâptème, le faisant naître dans ce petit village de l'est de la France, falsifiant le registre des naissances. Le pharmacien s'en est sorti, il a toujours gardé pour mes parents une amitié et un farouche respect, même s'il n'aimait pas les communistes!
Source:espace naturel.info

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