La fleur fanée




                      La fleur fanée

                      Extrait du recueil érotique de Paul Edouard GOETTMANN



Seulement 20 ans ! Basma faisait le ménage chez tous ceux et toutes celles qui avaient besoin de ses services. Elle faisait vivre sa famille, car sa mère veuve ne pouvait plus travailler. Basma était une jeune musulmane et comme toutes les femmes du Maroc, ses yeux cernés de khôl 11 renforçaient son regard. Ses mains et ses pieds étaient décorés soigneusement par des dessins au henné et un long foulard couvrait sa tête, son tour de cou pour finir sur son épaule.
Seulement vingt ans et Basma se vendait pour cinq cent dirhams 20 aux hommes qui la désiraient, et le plus souvent aux propriétaires des logements chez qui elle s’activait la journée au nettoyage des lieux. Basma portait bien son nom, « Belle », c’est vrai qu’elle était belle, tellement qu’il fallait s’efforcer de ne pas la regarder.
Elle ne devait pas habiter très loin de mon domicile, car je la croisais souvent chez les commerçants du quartier, presque hautaine, le regard fixe. La pauvreté faisait qu’entre l’allure et la clandestinité des faits il y avait un fossé ! J’étais loin de me douter de la réalité de sa vie contrariée par les lois d’Allah.
Je ne croisais plus Basma. C’est là que j’appris la nouvelle… Elle avait été emprisonnée, dénoncée par une voisine jalouse ou une épouse trompée. La Charia 15 ne badinait pas avec ce genre de comportement. Enfermée à ZAKI, la prison de Salé, Basma en avait au moins pour deux ans à subir tous les sévices que pourraient lui infliger les gardiennes ou pire les autres prisonnières pendant que sa mère allait subir la misère.
Mariée à seize ans, malgré les nouvelles lois en vigueur, à un époux violent qui la frappait chaque jour pour un rien, introduisant au domicile d’autres femmes, pratiquant ses accouplements devant elle. Basma ne pouvait être qu’atterrée et résignée jusqu’au jour ou elle s’échappa pour se réfugier chez une tante à Kenitra. Elle s’y réfugia pendant près de deux années sans se douter que sa mère subissait des menaces du mari à la suite de la procédure de divorce. Une procédure symbolique sachant qu’elle n’obtiendrait aucun dédommagement en dehors d’un semblant de liberté !
Basma en prison, à la limite c’était encore mieux que sa vie antérieure, pensait-elle. L'obligation de se donner aux hommes pour vivre décemment avec sa mère avait rongé son âme et sali son corps alors, elle priait Allah pour qu’il lui pardonne et lui redonne la lumière. Allah l’entendit et consentit à lui pardonner par la grâce du Roi Mohamed VI qui en ce jour gracia Basma ainsi qu’une dizaine d’autres condamnés.



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