LES ANGES PLEURENT AUSSI
C
Synopsis
LES ANGES PLEURENT AUSSI
DE
Ali GADARI
J’ai
une affaire délicate à vous confier capitaine :
une équipe de dangereux malfaiteurs s’attaque
aux commerçants, ils sont armés, et l’un des leurs a blessé un client la semaine
dernière. Les membres de
cette bande pratiquent le rançonnage, disparaissent en emportant la caisse du jour et reviennent la semaine suivante
pour réclamer leur rançon sous la menace. C’est une bande fortement
organisée, qui s’inspire
de la Camora. Tu paies où tu meurs ! Ils se sont diversifiés, rançons et attaques
spécialisées, mais n’appartiennent pas à la mafia marocaine d’après les
renseignements obtenus auprès des caïds. Lors de leur dernière action, l’attaque de la poste de Sidi
Kacem , le gardien qui voulait s’interposer a été tué, et ils sont
repartis avec quinze millions de dirhams.
ZOHRA était prévenue. C’étaient
des individus dangereux. Elle commença son enquête par la poste. Leur technique
était simple, neutraliser le gardien, tenir en respect la clientèle et le
personnel, prendre le directeur en otage et lui faire ouvrir le coffre
après avoir bloqué tous les signaux de sécurité et détruit les caméras de
surveillance. Elle se rendit compte qu’ils agissaient comme des commandos
militaires. De ce fait, elle pensait qu’ils avaient une idée derrière la tête,
leurs attaques n’étaient pas claires, quel était leur objectif final ?
Elle disposait des
descriptions des auteurs. L’un
deux, qui semblait être le patron de la
bande, était grand, un
mètre quatre-vingt si ce n’est plus, maigre, les épaules légèrement voûtées,
une démarche avec le buste penché en avant, avec les yeux
profondément enfoncés dans les orbites, et rehaussé de lunettes de verre grossissant à monture d’acier.
Un autre était plus petit et de corpulence
moyenne, avec des cheveux
blonds obtenus par décoloration. Ces détails étaient importants !
C’étaient deux petits riens, mais qui pouvaient s’avérer payants !
Le mercredi suivant, ils attaquaient le bureau de Wafa Cash de Souk El Arbaa procédé, vitesse et
efficacité de professionnels, plusieurs millions de dirhams envolés, volatilisés.
Zohra se rendit sur place, où les mêmes indices se retrouvaient : un type très grand, légèrement voûté, avec des lunettes à verres
grossissants, Kalachnikov
à la main qui commandait
quatre sbires méchants comme des teignes.
Un client avait eu le temps de noter une partie du numéro du véhicule,
une MercédèsS blanche, 62174. C’était
peu, mais la police pourrait peut-être faire un lien ? Le client n’en était pas sûr,
mais les derniers numéros semblaient
se terminer par 33, le véhicule devait être d’AGADIR. Deux jours après, ils s’attaquaient au Wafa
Cash de Sidi Slimane. Même procédé, même technique, mais ils avaient
changé de véhicule. C’étaient incontestablement des professionnels. Indice non remarqué jusqu’à ce
jour : l’un des
malfrats boitait très légèrement. Le
samedi en fin de la même
semaine, ils récidivèrent sur le distributeur automatique de la Société Générale
de Sidi Yayha Du Gharb. A deux
heures du matin, arrivés avec un camion, ils crochetèrent le distributeur
arrimé au camion par des câbles en acier. Le camion en marche arracha le
distributeur, mais ils n’eurent pas le temps de ramasser l’argent, car une
ronde de policiers les avait surpris
lors de leur forfait. Une fusillade éclata, tuant un policier, et l’un
des malfrats, touché
gravement, s’écroula sur
le trottoir et la tête sur le côté.
Cette fois -ci c’était un échec pour les voyous, mais quel foutoir, deux morts au cours de cette fusillade ! Le voyou
tué allait sans doute en apprendre beaucoup à la police et à Zohra. Il n’avait
pas de papier d’identité sur lui l’habitude
des assassins. Les photographies transmises au dossier du grand
banditisme ne donnèrent rien. Individu
inconnu, un zombi. Zohra envoya la photo au colonel, elle ne pensait toujours
qu’ils fussent membres ou
anciens membres de l’armée. Plusieurs
jours après, Zohra reçut une réponse positive et intéressante. Le mort, libéré en deux mille dix-huit, était Saïd Amlouch, ancien sous-officier du régiment
d’artillerie de marine de Guercif, groupe d’escadron blindé, dit le GEB.
Les comparses devaient
être sans aucun doute du même régiment. Sans photographies des autres membres,
il serait difficile de
les localiser ! Une enquête du sergent recruteur de Guercif devrait
éclairer les lanternes de Zohra. Amlouch était copain comme cochon avec Amin Terkich, adjudant-chef. Elle connaissait des détails :
c’était un homme grand, maigre, portant des lunettes à verres grossissants. Elle demanda au
colonel une photo qui lui parvint rapidement. Il avait quitté l’armée la
même année qu’Amlouch. Son adresse,
fournie par le sergent recruteur,
se trouvait à Sidi Bouknadel, route nationale, au lotissement Al Mountazah. C’était trop beau. Elle s’y rendit et avec les renseignements du voisinage,
arriva devant la maison d’Amin. Elle informa le colonel et fit le guet. Il
n’était pas question de l’arrêter sans preuve tangible. Il sortit de sa maison. C’était
bien lui, un grand escogriffe à lunettes, qui effectivement marchait
légèrement penché en avant. Elle le suivit jusqu’au grand café de Sidi Bouknadel, où il
s’assit à côté d’un homme corpulent,
barbu, habillé d’une djellaba, avec qui il entama une discussion animée. Elle arrêta la surveillance, revint à la Boutique, et
rendit compte au colonel de ses investigations. Il faudrait revenir, pister le grand
escogriffe, s’asseoir à une table,
et pour cela elle avait besoin d’Abdéramane car elle
ne pouvait par convenance s’asseoir seule au café. Ils amèneraient avec eux le
petit appareil d’écoute à distance, qui avait une capacité d’écoute d’environ dix mètres. La
discussion d’Amin avec son ou ses amis de table serait automatiquement enregistrée
et analysée à la boutique. Le lendemain, Zohra et Abdéramane étaient déjà au café, buvant un thé à
la menthe lorsqu’Amin fit son apparition,il s’assit à la table du barbu. Toute la discussion fut
enregistrée. Après le dépouillement de la bande, ce fut la surprise. En fait Amin
et sa bande de marlous travaillaient avec des religieux extrémistes qui
refusaient le progrès, accusaient le Roi et le gouvernement de s’être vendus à
Shaiitane, à l’occident. Ils refusaient le rôle des femmes au Maroc, elles ne devaient
pas travailler, et s’occuper de la maison et des enfants, un point c’est
tout ! C’était une théorie rétrograde, venue du Moyen- Age. Ce n’étaient
plus des malfrats en quête de flous, mais leurs attaques servaient les intérêts
de quelques terroristes en quête de reconnaissance. Leur idée était de
s’attaquer à l’école de police de Sidi Bouknadel, les policiers étant les
protecteurs du régime. La technique
serait la surprise, un camion bélier détruirait la porte d’entrée, ils tueraient les gardiens avant
de tirer à la mitraillette sur tous les policiers présents, puis feraient demi-tour et s’enfuiraient.
Le colonel prévint le directeur de l’école qui prit immédiatement les
mesures nécessaires. Comment expliquer cette envie de meurtre au nom d’Allah ? Shaiitane leur bloquait-il
le cerveau et leur commandait-il de faire le mal ? Il
faudrait remonter jusqu’à la source et détruire jusqu’au dernier ces
guerriers de l’enfer. Le barbu était l’un des dirigeants de cette conspiration.
Premièrement, il faudrait éviter
qu’Amin soit présent lors de l’arrestation du barbu. Il fallait le pister pour
connaître sa destination. Il
logeait dans un appartement du centre-ville à côté du souk. Il faudrait l’y appréhender.
Deux heures du matin. Zohra et Abdéramane
montèrent doucement les deux étages, s’arrêtèrent devant la porte du barbu. Abdéramane
enfonça la porte et tous
les deux foncèrent dans l’appartement.
Des coups de feu claquèrent et résonnèrent dans l’appartement. Ce
n’était pas un imam, mais un soldat du crime. Zohra et Abdéramane avaient
localisé le départ des coups de feu. Ils se rangèrent derrière des meubles et
tirèrent à leur tour, voulant le prendre vivant. Le barbu répliqua avec une
arme automatique. Abdéramane s’allongea à terre, rampa jusqu’à proximité du
barbu et lui logea une balle dans
la cuisse, le rendant incapable de se mouvoir. Ils le transportèrent jusqu’à la voiture
et prirent la tangente. Il n’était pas
question de l’amener à la Boutique. Ils s’arrêtèrent dans le bois d’eucalyptus
après Sidi Bouknadel, descendirent le barbu et commencèrent à lui poser des
questions. Il refusa de parler, Abdéramane lui logea une balle de son Berretta
dans l’autre cuisse. Il hurla de douleur. Tahduth, parle, où je continue. Une balle dans
l’épaule, une autre dans le pied, tu verras c’est très amusant. Allez parlez, lui enjoignit de nouveau Zohra. Il n’y avait rien à en tirer, il restait muet
comme une carpe de l’oued Sébou. Abdéramane lui logea une balle dans la tête,
fin de l’épisode. Ils le laissèrent dans le bois et rentrèrent à la Boutique où ils firent leur rapport au colonel. Zohra avait pris une photo
avec sa montre connectée à la Boutique. Dès le lendemain ils recevaient des renseignements au sujet du barbu.
Il se nommait Abdelkhrim Al Salal, connu pour son fondamentalisme, suivi par la
police spéciale depuis des mois. Les journaux exploitaient l’évènement :
un homme abattu sauvagement dans la forêt de Sidi Bouknadel, la police s’oriente
vers un conflit religieux. Abdelkhrim Al Salal
était connu pour ses propos radicaux fondamentalistes. Sa mort stoppait les investigations. Qui étaient les autres membres du
réseau ? Il fallait repartir à zéro. La police était appelée à surveiller Amin
en permanence, qui seule
pouvait amener Zohra sur une
piste. Il devait être retors sous des dehors paternes de bonhomme tranquille. Ce grand escogriffe
issu du régiment d’artillerie avait plus d’un tour dans son sac. Il fallait
s’en méfier comme de la peste, Zohra en avait entièrement conscience. Le barbu
mort, Abdelkhrim allait
changer de méthode, être beaucoup plus prudent dans ses relations avec les
extrémistes et ce serait
plus difficile à le pister. Il continuerait à se montrer, faire semblant tout
en surveillant ses arrières. Zohra et Abdéramane devraient se couvrir,
ne pas se laisser repérer, et les déguisements et les caches seraient indispensables. Effectivement, Amin ne se
cachait pas, il continuait à se rendre au grand café de Sidi Bouknadel. Zohra
accompagnée d’Abdéramane
avec une fausse barbe, avait mis sa perruque blonde achetée à Tarifa lors de
son enquête sur les lupanars espagnols.
Elle était couverte d’un foulard, revêtue d’une robe longue noire
couvrant les mollets et descendant
jusqu’à ses chaussures basses. Amin était seul, il buvait un thé bouillant en
lisant le journal. Il reçut un coup de téléphone sur son portable, mais ils étaient trop loin pour entendre la conversation.
Il se leva, héla un taxi qui
prit la direction de Kénitra. Sa trace était perdue, une journée pour
rien. Ils rentrèrent à la Boutique
et prirent la décision d’amener avec eux
chaque jour le récepteur afin d’enregistrer
toutes les conversations. Là, ils
avaient commis une erreur, n’ayant
pu enregistrer la conversation au téléphone d’Amin. Il avait dû
rencontrer des comparses à Kénitra pour fignoler l’attaque de l’école de
police. Mardi matin, un camion fonça sur le portail de l’école de police. Les policiers avisés par
la Boutique tirèrent sur la vitre de
la cabine, tuant deux hommes. A l’arrière deux autres
malfrats tirèrent en rafales, tuant un policier et en blessant un autre, avant d’être exécutés à leur tour par la mitraille des policiers.
Le camion sans chauffeur au volant devenu fou s’encastra dans le mur d’un
bâtiment et s’enflamma. L’école avait quand même évité le pire, malgré
la perte du policier. Le blessé
fut transporté en urgence à l’hôpital Mohamed V à Rabat, ses jours ne semblaient pas en danger. Le bilan
était maigre pour l’organisation salafiste, mais c’était toute une victoire
pour les extrémistes fondamentalistes, une signature ! Amin ne dérogeait pas à ses habitudes.
Assis à une table
du grand café de Sidi Bouknadel, il lisait son journal en buvant un thé à la
menthe. Zohra était habillée d’une burka et de gants fins de couleur noire,
invisible sous cet habillement. Abdéramane
portait une gandoura grise à rayures et était coiffé d’une chéchia rouge.
Il portait des lunettes noires et une fausse barbe mi- longue rousse, teintée
au henné. Amin mit son portable à l’oreille, la conversation fut immédiatement
enregistrée. De retour vers la Boutique, ils furent assaillis par une grêle de
projectiles tirés par des fusils mitrailleurs dans la forêt de Sidi Boukinadel.
Leur automobile fit une embardée et s’encastra dans un gros eucalyptus, heureusement sans
dommage pour eux. Ils plongèrent à terre et se dissimulèrent derrière les eucalyptus de la
forêt. Les tirs n’arrêtaient pas, ils avaient été découverts malgré leurs
déguisements. L’un des assaillants,
sûr de lui, se mit
rapidement à découvert, et ZOHRA
l’atteignit de deux balles de son Glock 18 dans la tête. Les assaillants
avaient l’avantage de la surprise. Zohra avisa le colonel de cette embuscade et
de la destruction du véhicule. Ils rampèrent conjointement jusqu’à un ruisseau
pratiquement à sec et se jetèrent dedans. Protégés par la berge et
momentanément invisibles,
ils attendirent l’arrivée des malfrats. Ils étaient trois, Zohra remarqua le
voyou qui claudiquait légèrement ;
il correspondait parfaitement
à la description d’un témoin lors de l’attaque de la poste de Sidi Kacem. Les deux autres étaient
ordinaires. Ils s’approchèrent à quarante mètres, Abdéramane et Zohra firent
feu, le boiteux s’écroula, un autre homme roula à terre mortellement blessé, Le
troisième homme s’enfuit en courant, mais le Glock ne lui laissa aucune
chance ! Abdéramane et Zohra remercièrent Allah de les avoir épargnés. Ils
étaient sales, crottés par la boue du ruisseau. Pas question de prendre un taxi ! Ils demandèrent de l’aide au colonel.
Les profils des assassins laissés sur le carreau étaient intéressants. Le
boiteux se nommait Hassan Chidmi, domicilié à Kénitra, le deuxième se nommait
Malak Benséghir, domicilié à Salé et le
troisième, Kalid Boukili, était domicilié depuis peu à Tiflet. Tous
étaient d’anciens militaires de la base d’artillerie de Guercif. Le colonel
demanda à l’Etat- Major général l’identité de tous les hommes libérés
depuis deux mille huit de leurs
obligations militaires du camp de Guercif. Il y en avait quarante-quatre, soldats et
sous-officiers. Le colonel s’occupa de l’affaire. Il signala leur identité aux régions militaires,
capables de fournir rapidement des renseignements. Six semaines après, le
colonel avait les éléments
désirés. Il apparaissait que seuls onze militaires étaient amis avec Amine,
Hassan, Malak et Kakid en particulier. C’était donc parmi ces onze qu’était née la bande de crapules
et d’assassins, avides d’en découdre avec la population. Dans ce genre
d’affaires, chaque indice, chaque recoupement était important ! L’un d’eux
était signalé comme extrémiste et suivi de près par la police spéciale, Salid Noir, Renseignements Généraux
(RG) du Maroc services secrets de renseignements faisant partie de la DGSN
(Direction générale de sûreté nationale), la police marocaine. Leurs missions
consistaient à collecter et analyser les informations de tous genres ainsi que le
suivi d’individus.
Zohra et Abdéramane prirent la route jusqu’à la ville de Tiflet.
Ils s’enquérirent de l’adresse de Nourdine à Sidi Yayha. Devant l’immeuble, ils
firent une pose avant de gagner l’étage. Devant la porte, ils armèrent
leur main de leur arme, au cas où. Ils frappèrent à la porte et attendirent. Nourdine
ouvrit la porte, surpris de trouver deux individus armés. Zohra et Abdéramane le
poussèrent et entrèrent dans l’appartement. Salem Alékoum Nourdine, juste une
question
-Quel rapport as-tu
avec Amine Terkich ?
-Aucun, depuis que j’ai quitté
l’armée
-Ne nous ment pas Nourdine, nous
savons que tu es fiché comme extrémiste religieux et suivi par le Said Noir en
permanence.
-C’est vrai, mais je
n’ai aucune relation avec Amine
-Abdéramane lui
balança une gifle magistrale
-Je ne sais rien de
lui
-Abdéramane récidiva
-Puisque je vous dis
ne rien savoir d’Amine
-Abdéramane lui logea
une balle de son Berretta muni de son silencieux dans la cuisse. Tant que tu continueras à
mentir, nous te ferons mal !
-Que voulez-vous à la
fin, en se tenant la cuisse pour chasser la douleur, je ne comprends rien à vos
questions, je ne côtoie plus
Amine depuis longtemps
-Une balle lui transperça l’autre cuisse ;
il hurla de douleur. Je ne sais rien du tout ! Il saignait beaucoup.
-Nous allons
continuer dit Abdéramane,
taquarar binafik, décide-toi
-Baraka, je ne
répondrai plus à vos questions
-Très bien dit Nourdine,
moi je continue, et il lui tira
dans l’épaule qui le fit souffrir énormément. Des larmes coulaient de ses yeux. Pourquoi veux-tu souffrir,
nous te demandons si tu as des rapports avec Amine.
-Awa, je n’ai rien à
voir avec Amine
-Tu veux jouer les
héros, c’est bête tu vas encore souffrir pour protéger cet individu
-Allez au diable, Allah
vous punira.
-Je ne crois pas Nourdine,
nous sommes du côté d’Allah, adhab
watahdath, allez, parle !
-Là, non, vous êtes envoyés par Shaiitane
-Très bien Nourdine il lui
logea une balle dans l’autre épaule, le faisant énormément souffrir.
-Baraka, baraka, je
travaille avec Amine, nous voulons un Maroc propre comme le voulait le
prophète. J’ai participé à l’organisation du groupe.
-Tu vois quand tu
veux ajouta Zohra et ce groupe, comment est-il
constitué ?
-Comme un régiment
avec des sections différentes, chacune avec des
objectifs précis
-Y a-t-il des
officiers dans ce groupe ?
-Amine m’a dit qu’il
y avait un colonel qui dirigeait tout
cela. Ils ne pouvaient plus l’arrêter de parler.
-Le
connaissez-vous ?
-Non, il reste
inconnu pour la majorité des membres du groupe
-Donne-nous leur nom d’un des membres du groupe pour le contacter
-Tmer à Sidi Kacem
-Que Dieu ait pitié de toi, dit Abdéramane en mettant à sa
vie d’une balle en pleine tête.
Le colonel fut satisfait de cette avancée dans
les investigations.
La visite à Bachir Tmer fut mouvementée. La mort de Nourdine
l’avait alerté, et il se
tenait sur ses gardes. Quand Zohra et Abdéramane frappèrent à sa porte, il
répondit par des tirs nourris sans
même ouvrir, mais Zohra et Abdéramane, habitués de ce genre d’intrusion, s’étaient mis à
l’abri sur les côtés de la porte. Bachir continuait ses tirs, la porte en bois
s’était déchirée par les impacts de balles. Cet assassin était dangereux. Zohra jeta un œil sur la pièce, Bachir, ce dangereux assassin,
était en face prêt à faire feu sur tout ce qui bougeait. Il mitrailla à
nouveau, cette fois la porte se disloqua, laissant une ouverture béante. Zohra
laissa passer son bras et tira une salve vers Bachir sans l’atteindre. La
situation était critique, mais au moment où Zohra et Abdéramane se décidaient à forcer le
passage, Bachir se logea une balle dans la tête. Ils se dépêchèrent de fouiller
les lieux, les documents, les cassettes.
Ils ne trouvèrent rien et prirent la fuite avant l’arrivée de la police. Cette
action n’avait pas duré plus de cinq minutes. Le colonel n’était pas
satisfait de la tournure des évènements. Les indications de Nourdine restaient
vagues et généralistes. Pas
de nom, et qui était ce colonel ? Un
officier de cette qualité au service du Roi et de la nation qui trafiquait dans
la clandestinité pour l’établissement d’un régime salafiste extrémiste était
d’une extrême gravité. La Boutique
ne disposait d’aucun nom sur lequel s’appuyer, le suicide de Bachir
avait fermé le chemin de la connaissance. Zohra et Abdéramane retournèrent à Sidi
Kacem interroger les voisins et
les commerçants au sujet des activités journalières de Bachir. Celui-ci
était un homme généralement souriant, parlant peu. Il avait un ami avec lequel il prenait le thé
de temps en temps au café Qahuat Mugharba, le café du Maghreb sur la place de
la mosquée. Les interlocuteurs de Zohra
ignoraient le nom de cet ami. Ils étaient unanimes sur son aspect : pas très grand,
corpulent, les cheveux blonds teints, coiffés d’une chéchia blanche. Ce dernier
détail rappela à Zohra un indice rapporté par un témoin lors de
l’attaque de la poste de Sidi Kacem. Serait-ce le même homme ? Si c’était le cas, le fil était
renoué ! Ces cheveux teints en blond devraient être remarqués par la
population et permettre à Zohra et Abdéramane de joindre l’individu. De
questions en interrogations, ils aboutirent à une adresse, rue NX23 dans le nouveau
quartier de Sidi Kacem, tout à côté du café. Ils se devaient d’être prudents et
surtout de ne pas perdre la trace de leur cible. Assis au café, ils virent le
blondinet sortir de chez lui, la chéchia bien posée sur sa tête, rondouillard,
joufflu, l’air gentil et avenant. Les locataires de la Boutique le virent
trottiner jusqu’à la station de taxis. Une fois le blondinet parti, ils
montèrent au premier étage de son immeuble, ouvrirent sa porte à l’aide de
clefs universelles et entrèrent dans l’appartement. Ils commencèrent à
fouiller, à ouvrir les placards et les armoires. Le bureau situé dans le salon réservait des surprises, toute
une liste de suspects et leurs adresses, leurs téléphones, le nom de l’officier
supérieur, le donneur d’ordre, une aubaine. Ce devait être une pointure, proche
du patron, pour posséder de tels documents. Ils s’emparèrent des documents,
s’assirent sur le canapé et attendirent le retour du blondinet qui se nommait
Ossama Ouriarhli. Plus de deux heures après, celui-ci franchit la porte de son
appartement, et se trouva devant Zohra et Abdéramane, sidéré, quand il eut
refermé la porte. Zohra logea une aiguille d’acier dans son crâne à l’aide de
son pistolet pneumatique, occasionnant une paralysie et pour être sûr qu’il ne
parlerait plus, une autre aiguille lui traversa le cœur, Inch Allah. Ils
repartirent satisfaits à la Boutique. Le colonel aurait sauté de joie si cela
n’était inconvenant, en particulier en apprenant le nom du colonel félon, le
Colonel Abdenour Haraou, commandant la première division blindée de Marrakech,
héros de la guerre Irak où il avait eu une attitude exemplaire à la tête de ses
troupes. Les honneurs semblaient lui être montés à la tête. Le colonel patron de la Boutique le connaissait
bien, ils avaient combattu ensemble, mais il avait maintenant du mépris pour ce
soldat pourri et félon. Il faudrait du temps, mais il serait châtié. Les autres
n’étaient que de la broutille, des petits soldats à la solde d’extrémistes
religieux persuasifs. Ils étaient vingt et un, disséminés dans un rayon de
trente kilomètres. Zohra et Abdéramane étaient chargés de les éliminer,
c’étaient les ordres. Il fallait éviter qu’ils disparaissent du Maroc. Ils
commencèrent par Kénitra, trois sbires logeaient dans cette ville et il fallait
faire le ménage. Aucun d’eux ne s’attendait à l’entrée de Zohra et d'Abdéramane
dans leur jeu. Ils furent exécutés l’un après l’autre dans leur appartement. A
la suite de l’assassinat de ces malfrats, les autres membres de la confrérie se
tenaient sur leur garde. D’abord et ensuite les membres de Kénitra. Plusieurs
avaient déménagé sans demander leur reste et disparu de la circulation. La
chasse à l’homme continuait inexorablement, destination Tiflet, un membre
logeait à côté de la mairie, dorénavant il fallait les abattre à l’extérieur de
leur logement. Moustaid allait chaque jour palabrer avec des voisins et amis au
café de Rabat, le matin de onze heures à deux heures de l’après-midi. Zohra et Abdéramane
se postèrent à une table à proximité d’eux. Abdéramane sortit son Beretta muni
de son silencieux sous la table et attendit le moment propice. Le coup de feu atteignit
Zakaria à la poitrine. Personne n’avait rien vu ni rien entendu. Transporté à
l’hôpital, il décéda durant son transport. Tout de suite après, ils se
dirigèrent vers une petite commune limitrophe de Tiflet, Ait Bou, deux autres
membres habitaient là. Le premier, prudent, ne sortait plus de chez lui, ce
n’était pas du goût des locataires de la Boutique. Sa petite maison était
située en bordure d’un champ de maïs, Zohra employa les grands moyens, elle
balança une bille explosive, fabrication de la boutique sur le mur de façade de
la maison. Après l’explosion, l’incendie, l’homme sorti en courant, hébété,
comme fou, Zohra le cueillit avec son Glock 18, l’homme s’écroula dans les
flammes. Le deuxième sbire logeait à côté de la gendarmerie, elle répéta son
action, le mur de façade explosa et l’incendie ravagea la maison. L’homme avait
dû mourir lors de l’explosion. Les gendarmes sortirent en courant et appelèrent
les pompiers, sans doute une fuite de gaz ? Ils eurent quand même des
doutes, une deuxième explosion la même journée. Ils rentrèrent à la Boutique et
firent leur rapport au colonel. La presse s’en donnait à cœur joie, crimes,
explosions, les unes étaient des bijoux. Crimes de voyous pourvoyeurs de
drogues, vengeance de bandes organisées, quant aux explosions, elles étaient
pour le moment inexplicable, la police enquête. Zohra et Abdéramane comme
d’habitude n’avaient laissé aucun indice, un travail bien fait. Lorsqu’ils
arrivèrent à Dar El Gueddari, quatre membres de l’organisation habitaient dans
ce village. Beaucoup de ces fils de paysans étaient analphabètes relativement
faciles à endoctriner. Ils allèrent dans un douar à quelques kilomètres du
village, juste une dizaine d’habitations, des petites fermes, quelques vaches
et des moutons. L’homme à abattre était un paysan possédant plusieurs hectares
de champs, une dizaine de vaches et une trentaine de moutons. Il était marié
avec trois enfants, cela chagrinait énormément Zohra, mais elle était un
soldat, elle exécutait les ordres. Youssef Abdellati devait être supprimé. Il
était sur son tracteur dans un champ voisin, la voiture de Zohra et Abdéramane
roula sur le chemin, quand le tracteur arriva à proximité, Zohra fusilla le
quidam, l’automobile roula tranquillement jusqu’à la nationale pour rejoindre le village. Il en restait trois dans le
village, l’un d’eux était boucher. Arrivés devant l’étal, Abdéramane tira,
l’homme s’écroula à terre, ils s’éclipsèrent. Un autre résidait dans un nouveau
bâtiment au deuxième étage, il fallait qu’il sortît pour l’atteindre, il
n’était pas question de monter. Kanza Yessef comme les hommes du village se
rendait au café de Gueddari boire le thé et parler de tout et de rien durant
des heures. Il était attablé sur la terrasse contre la vitrine du café, c’était
risqué, trop de risques de dommages collatéraux. Zohra s’avança, sortit son
pistolet pneumatique et envoya une aiguille dans le crâne de l’extrémiste. Ces
voisins de table le virent subitement chuter de sa chaise, ils se précipitèrent
pour le relever, mais ils constatèrent qu’il était décédé. Ils parlèrent fort,
appelant du renfort. Une ambulance arriva très vite, le secouriste constata
également le décès de Kanza. Lors de l’autopsie, le chirurgien trouva une
aiguille d’acier de trois millimètres de diamètre sur deux centimètres de
longueur, il se trouvait devant un meurtre, choqué, il appela la gendarmerie
qui lui intima l’ordre de se taire, de faire le silence sur cette affaire,
c’était à eux maintenant à faire le travail. La gendarmerie de Dar El Gueddari
transmit le dossier au quartier général, le retour fut concis et très
clair : laissez tomber l’affaire, secret d’Etat ! La gendarmerie de Dar
El Gueddari transmit l’ordre au chirurgien qui s’inclina devant les ordres
donnés et la raison d’Etat. Le troisième larron était déjà au courant il
fuyait, mais au moment de monter dans sa voiture, ABDERAMANE lui logea une
balle dans le cœur, il s’écroula sur la banquette avant de son automobile. Au
quatrième, maintenant. c'était le serrurier forgeron du village, religieux
forcené tenant des propos hostiles au royaume et à son régime avec ses proches.
Il s’était laissé pousser la barbe qu’il teignait au henné, le crâne rasé, il
allait à la mosquée chaque jour bien habillé et parfumé. Il portait sur lui un
Walter PK380 depuis les disparitions tragiques de ses compagnons. Inquiet, même
dans son travail, il se méfiait, la main toujours sur son Walter dans la poche
de son pantalon à la moindre approche, il était sur ses gardes. Zohra et Abdéramane
s’approchèrent pour parler avec lui, ils se retrouvèrent devant un homme armé
prêt à faire feu. Pas commode le sieur Alaoui, un ouistiti de mauvaise allure.
Les deux locataires de la Boutique levèrent les mains en l’air, ils firent
mauvaise mine en lui demandant ce qui se passait et qu’ils n’avaient aucune
mauvaise intention. Zineb d’un air rogue leur demanda de circuler, de
s’éloigner de la forge séance tenante. Ce qu’ils firent, en s’éloignant, Zohra
prit son GLOCK dans son sac, se retourna et tira, Zinzb ne s’attendait pas à
cela, il chuta lourdement sur le béton de son atelier, du sang s’écoulait de sa
blessure. La foule s’amassait autour de l’atelier de Zineb, il n’y avait eu
aucun bruit, tout était feutré même le départ de Zohra et d’Abdéramane. De
retour à la Boutique, ils communiquèrent avec le colonel. Ces meurtres
commençaient à faire du bruit, la police était sur les dents, il y a lieu de
stopper momentanément l’opération balayage. Trop c’est trop, il faut savoir
s’arrêter.
Durant deux mois ils mirent les fichiers à jour. Les renseignements
qu’ils tirèrent des profils des extrémistes étaient intéressants. L’un d’eux
était défavorablement connu de la justice pour vols avec récidives ayant écopé
de deux années d’emprisonnement. Il avait connu en prison Hassan Zaoui
emprisonné pour des propos et des actes contre la royauté. C’était un salafiste
convaincu et prêchait à l’intérieur de la prison auprès des autres prisonniers
pour un Islam rénové, c'est-à-dire un retour à l’arrière, un retour vers le
Moyen-Age. Certains dont Ahmed Sarkaoui s’était laissé convaincre. Dès sa
sortie de prison au bout de deux ans, il avait fréquenté les individus indiqués
par Hassan et rejoint rapidement le groupe de la dissidence. Le directeur de la
prison le décrivait comme intolérant et bagarreur ayant goûté plusieurs fois à
la cellule d’isolement. Il habitait à Salé. Zohra et Abdéramane avaient fait le
tour de ces loustics sans les approcher, quatre de ceux-ci avaient disparu,
volatilisés. Il faudra voir lors de la reprise du nettoyage s’ils avaient pu se
réfugier dans la famille, il faudra commencer par eux. L’un des leurs était
voyageur de commerce, se déplaçant beaucoup, il avait la possibilité d’avoir
facilement des contacts avec les autres membres du groupe. Il y avait intérêt à
le suivre, ce devait être également un porteur d’ordres. Les autres étaient
commerçants ou fonctionnaires, sauf un iman, chassé pour des appels successifs
à la violence. Plus de trois mois étaient passés, les choses s’étaient calmées.
Mardi, le Maroc était sous le
choc, une quarantaine d’individus et de militaires, prenaient d’assaut le
Palais du Roi à Rabat, tuant les militaires qui gardaient la porte du château,
entrés à l’intérieur du château, ils se heurtèrent aux tirailleurs qui étaient
à l’intérieur, la bataille fut terrible, de nombreux militaires furent tués et
blessés. Les parachutistes de Salé prévenus arrivèrent en hélicoptères, une fois
à terre ils sonnèrent la charge, les assaillants succombèrent sous le nombre,
aucun ne resta en vie. La population en larmes, suffoquée par l’attaque contre
leur Roi se sont rendus en masse dans les mosquées, priant Dieu de lui avoir conservé
la vie. Des obsèques nationales eurent lieu pour les militaires tués au service
du ROI et de la nation. Les drapeaux marocains ornaient les façades des
Services Publics. Le colonel Abdenour Harraou était resté dans l’ombre, seuls Zohra
et le colonel de la boutique connaissaient le rôle qu’il jouait en secret. Il
faudra qu’il paie l’attaque du palais royal. La garde fut doublée à l’extérieur
du palais avec des ordres précis. Cinq hommes fichés dans les dossiers de la
boutique après les confessions de Nourdine avaient été abattus par les
parachutistes. Beaucoup étaient des militaires du même régiment que le colonel
Abdenour Harraou après enquête de l’Etat- Major, il s’avéra que le colonel
n’était pas au courant des activités occultes de ces soldats et sous-officiers,
passer l’éponge ! Toutes les troupes du Maroc avaient été mises en alerte
et consignées dans leurs casernes. L’un des officiers du service secret
militaire ne croyait pas un seul instant que des hommes et sous-officiers sous
commandement du colonel Abdenour Harraou aient pu agirent dans la clandestinité
sans que le colonel ne soit au courant de rien. Soit que le colonel fermait les
yeux, soit qu’il était en accord avec eux. Il devenait le suspect numéro
un ! L’un des tués dans le palais était le capitaine Anas Rmili chef de la
sécurité au régiment du premier régiment de blindés de Marrakech. Akim Bourafa
l’officier des services secrets militaires avait également fait le
rapprochement. Si cet agent continuait son enquête, tout le travail de la
Boutique tombait à l’eau. Le colonel s’arrangea pour que cet officier stoppe
son enquête sous le signe : Secret d’Etat. Zohra et Abdéramane reprirent
la chasse à l’homme nécessaire au nettoyage de cet organisme extrémiste, ils se
dirigèrent vers Marrakech, la cible était une femme militaire lieutenant de la base de Marrakech, Anissa Mosse Duaq. Elle avait de la
famille à Asni, les locataires de la Boutique allèrent faire un tour à Asni.
Elle fut facile à trouver, Anissa était bien là, elle ne se
cachait pas. Ils se présentèrent, ils furent reçus comme chez les Berbères avec
du thé à la menthe, cela changeait des coups de feu. Ils n’y allèrent pas par
quatre chemins.
-Nous venons vous
poser des questions sur le groupement extrémiste commandé par le colonel
Abdenour Harraou. Vous êtes l’un de ses officiers et suspectée d’être membre de
cette organisation.
-Je n’ai rien à voir
avec cette organisation, je sais que le colonel à des positions rétrogrades par
des propos que je ne soutiens pas. Je suis seulement sa maîtresse, je ne suis
pas toute seule d’ailleurs, il aime les plaisirs de la chair. Il pratique
activement la fornication !
-Vous êtes seulement
sa maîtresse, connaissez-vous les autres membres de l’organisation à
l’intérieur du contingent ?
-Non, je connais
seulement ses plus proches collaborateurs à l’intérieur de la base.
-Nous vous croyons et
nous vous faisons confiance, ne parlez à personne de notre visite
-C’est entendu.
Ils croyaient en
elle, elle avait des paroles de sincérité.
Ils se dirigèrent
ensuite vers Imlil, chez un autre individu qui avait fui son domicile. Ce
serait sans doute plus difficile qu’avec Anissa. Il habitait chez son frère une
petite maison basse en pierres. Ils frappèrent à la porte, ils attendirent
longtemps avant que celle-ci s’ouvre. Le bonhomme était seul, vêtu d’une blouse
avec une grande poche sur le devant.
-Etes-vous Youssef Hajjama ?
-Il mit la main dans
la poche de sa blouse, Abdéramane le cueillit avec son Beretta, dans la poche
de sa blouse un Moser, Abdéramane avait eu de bons réflexes.
De retour à la
boutique, ils firent leur rapport au colonel en narrant l’épisode d’Anissa, si
elle nous a menti, nous pourrons facilement la récupérer. Bon, dit le colonel,
la chasse à courre est terminée, nous transmettons la liste à la police qui
s’occupera de ces individus, suivis et arrestations, nous avons terminé notre
travail. Il restait toujours le colonel Abdenour Harraou, à l’intérieur de la caserne
c’était impossible de l’atteindre, il fallait attendre l’opportunité. Le
colonel avait eu des renseignements complémentaires concernant l’un de ses
officiers, le lieutenant Akim Bouarafa qui avait également participé à la
campagne d’Irak. Fortement radicalisé, il avait une audience particulière parmi
ses hommes de troupe, adulé il était suivi et écouté comme un seul homme. Il
était chargé de la popote du régiment, c’était un rôle important, s’occuper de
plusieurs centaines de soldats le midi et le soir ne supportait pas de
défaillances. La viande arrivait chaque semaine par camions frigorifiques,
bœufs et poulets découpée par les militaires préposés à la boucherie et mis au
congélateur. Les œufs étaient de même entreposés, seuls les légumes nécessaires
à la troupe devaient être achetés frais chaque jour. Bouarafa avait trouvé un
grossiste qui le fournissait chaque jour en priorité, en carottes, pommes de
terre, navets, tomates, salades, betteraves, aubergines par camion entier. Il
sortait de la caserne à six heures du matin avec un aide pour examiner la
marchandise, il revenait à la caserne vers neuf heures. Tous ces renseignements
étaient consignés dans un rapport sur le bureau du colonel. Zohra reprit la
route de Marrakech. Elle suivit prudemment Akim jusqu’au grossiste, il y avait
beaucoup d’animations autour des primeurs et des fruits. Elle se mêla à la
foule, se rapprochant d’Akim. Il s’était penché sur un lot de pastèques, le Glock
muni de son silencieux le jeta à terre, personne n’avait rien vu, ni rien
entendu. Le grossiste s’était penché sur Akim, mais il constata qu’il était
mort avec une plaie dans la poitrine. Zohra prit le chemin du retour sans être
inquiétée. Le colonel Abdenour Harraou avec la mort d’Akim savait que cette
mort annonçait également la sienne s’il ne prenait pas des précautions
élémentaires, même dans la caserne il ne sortait plus que le bras armé de son
pistolet. Cette bande extrémiste fanatique organisée en commando militaire
déclinait avec la destruction d’un bon nombre de ses éléments. Certains se
posaient même la question de savoir s’ils avaient eu raison de s’enrôler, ils
pensaient que ce serait facile alors que l’attaque du palais royal avait
lamentablement échoué avec un nombre considérable de morts. Leur constat faisait
état, que le Maroc n’était pas prêt au changement préconisé par le colonel Haraou.
Le Maroc était un pays libre, moderne, en constante évolution, son peuple ne
voulait pas revenir en arrière, au temps de l’esclavage, des femmes soumises,
de caïds barbares, des mains coupées pour un vol d’œuf de poule. C’était la
débandade dans le camp salafiste, beaucoup émigrèrent en Europe pour échapper à
la justice, la Belgique et la Hollande en recueillirent beaucoup. Le balayage
avait accéléré le mouvement. La peur s’installait au creux du ventre des
adeptes, ils étaient devenus la cible d’inconnus qui voulaient les éliminer.
Terminées les paroles et les sollicitudes du guide, elles n’étaient que du vent
activé par Allah. Ils se rendirent compte un peu tard qu’ils avaient choisi le
mauvais chemin, celui qui les menait à Shaiitane, au feu éternel, aux
ricanements grinçants de Lucifer. Plutôt que de faire amende honorable, ils
avaient choisi de faire front et de se battre contre l’ennemi. Divisés, ils
n’avaient aucune chance de s’en sortir, mais maintenant que c’était la police
qui était à leur trousse, ils auront sans doute la possibilité de s’en sortir
vivants ?
A la Boutique, le colonel Akim Sertaoui
le patron de la Boutique, Zohra et Abdéramane passaient de longues heures à
rechercher les moyens de liquider Abdenour Harraou, en faisant des plans sur la
comète, celui-ci ne sortait plus de la caserne, cherchant une solution à son
problème, fuir serait une honte, ce n’était pas dans son éthique de soldat, il
préférait mourir en héros s’il le fallait. Une idée lui titillait l’esprit,
mais il était trop tôt pour y penser plus avant. Zohra avait repris l’entraînement,
allers-retours dans le Sébou aux eaux froides en ce moment, course le long de
la berge, attaques de combats rapprochés avec le maître d’armes de la Boutique,
lectures de poèmes, en attendant l’action contre le colonel Abdenour Harraou.
Le maître d’armes lui avait enseigné une nouvelle technique d’attaque avec les
pieds qu’elle avait très vite assimilée. La stratégie du colonel Abdenour Harraou
la laissait pantoise, ce soldat, héros de la guerre d’Irak qui complotait
contre le royaume, quel intérêt avait-il à se comporter ainsi ? Prendre la
direction du pays ? Cela semblait un cliché ringard de bandes dessinées.
Quel était l’iman qui l’avait influencé à ce point ? C’était un immense
gâchis ! Elle avait un sentiment mitigé, à la fois de la pitié pour cet
homme qui avait sombré dans l’extrémisme fanatique et un rejet catégorique pour
ce colonel félon ennemi du Roi et de son régime tolérant pour le Maroc. Elle
devra faire son travail, éliminer cet homme sans sourciller, restait à
déterminer les circonstances de son assassinat ! Il y avait encore autour
de lui une garde rapprochée inconnue qui se fondera dans la masse après
l’assassinat d’Abdel Harraou et deviendra définitivement invisible. Ce
mouvement fanatique perdurera longtemps encore sans inquiéter le régime
Marocain noyé dans la population et ressurgir un jour à l’occasion d’un fait
divers.
Le colonel Abdenour Harraou après moult interrogations avait pris une
décision capitale. Il prendra sa retraite et rejoindra la vie civile, ainsi il
ne sera plus un danger, ne tenant plus les rênes du pouvoir militaire. Il
rejoindra la maison familiale à Sidi Kacem. Une fête somptueuse a eu lieu au
casernement devant toute la troupe et les officiers. Il fit ses adieux et un
long discours, le général commandant le régiment d’artillerie était là et le
remercia pour ses faits d’armes. Débarrassé d’un poids, il se rendit à Sidi Kacem
retrouver ses origines. Il renoua avec sa famille, ses amis et une ancienne
amie avec qui il passa plusieurs nuits. Le colonel Akim Sertaoui, patron de la Boutique,
demanda de la patience, de ne pas bouger pour l’instant, c’était trop tôt.
C’était la technique de la panthère qui arrivait doucement, patte après patte
et attendait le bon moment pour bondir à coup sûr et capturer sa proie. Il
fallait savoir attendre, patienter, observer et liquider la cible. Parfois
c’était long, mais cela faisait partie du jeu. Zohra avait été formée pour
cela, elle connaissait la musique. Le colonel Abdenour Harraou était suivi à la
trace par un autre agent de la Boutique.
Chaque geste était noté, répertorié et enregistré à la Boutique ainsi que ses
allées et venues. Rien n’échappait au colonel Sertaoui, patron de la Boutique,
même les femmes qu’Abdenour entraînait chez lui, il connaissait leur nom, leur
adresse et leur photographie. C’était un travail de pro, de haut vol. La maison
d’Abdenour Harraou avait été photographiée également sous tous les angles, au
cas où il faudrait donner l’assaut. L’agent de la Boutique faisait du très bon
boulot. Pour le moment Abdenour Harraou laissait aller, les choses allaient
forcément s’accélérer. Le colonel avait
une autre idée, ne rien abandonner de ses projets meurtriers, en restant plus
que jamais dans l’ombre, sacrifiant ses hommes au bénéfice de son idéal. Le
match de football battait son plein devant des supporters électrisés et
Abdenour Harraou juché sur les gradins bien en vue de la population. Une
terrible explosion a eu lieu à peu près à la mi-temps du match, une fumée noire
grimpait dans le ciel. Un attentat avait eu lieu à la gare ONCF de Sidi Kacem
faisant onze morts et vingt-quatre blessés, dont sept dans un état critique.
Aucune preuve contre Harraou, mais le colonel Akim Sertaoui, mangeait sa
cuillère, il fallait en finir avec cet individu.
La situation allait changer,
Abdenour Harraou était également un gros mégalomane. Il décida après ce coup
d’éclat meurtrier d’offrir une fête somptueuse dans les salons du Grand Hôtel
de Sidi Kacem pour fêter son départ à la retraite de l’armée avec ses amis de
sa villégiature. Beaux habits, grand orchestre arabe, vingt-deux musiciens,
tables choisies de treize convives posées sur tapis précieux, les murs
recouverts de mosaïques précieuses, petites en plusieurs couleurs chatoyantes.
Les plafonds en bois ouverts sur des vitres de couleurs laissaient venir une
lumière chatoyante qui semblait caresser chaque client. Chaque participant
avait été particulièrement choisi, rien n’avait été laissé au hasard. Le Maire
de la ville de Sidi Kacem, le commandant de la brigade de gendarmerie, le
colonel commandant le régiment de Sidi Kacem, le directeur de la télévision
locale, les journalistes de la presse locale, la famille, les amis proches. Le
colonel de la Boutique Akim Sertaoui avait été invité. Il avait décliné l’offre
sous prétexte d’affaires à régler, mais il envoyait la capitaine Zohra Daghri
sa secrétaire pour le remplacer. Tout était en place, Abdenaour Harraou avait
ouvert le bal, Inch Allah, c’était à lui de le terminer ! Zohra se
présenta en uniforme de parachutiste, elle salua le colonel, il la pria de
s’asseoir près de lui à sa table. Il lui rapprocha la chaise, Zohra enleva son
béret, le roula et le glissa dans son épaulette, ses cheveux retombèrent
souplement sur son dos. Elle était magnifique, beaucoup trop jolie pour un
capitaine. Abdenaour s’absenta quelques instants. Il avait reçu la confirmation
à sa réponse, Zohra était bien capitaine dans le corps des parachutistes de sa
Majesté le Roi du Maroc et secrétaire du colonel Akim Sertaoui. Il s’en trouva
soulagé, il était toujours méfiant. La fête pouvait commencer. Le repas était
splendide, une entrée de salades et de fruits glacés nappés de mayonnaise
maison. Des vins de Sidi Kacem de toutes les couleurs, pour satisfaire les yeux
et les palais. Zohra se suffisait d’eau de source gazeuse d’Oulmes. Elle
répondait avec le sourire et répartie au colonel Abdenaour et ses invités
flattés d’être placés auprès d’un si joli capitaine. Bien que cela l’ennuyait,
elle répondit sur son activité de parachutiste en Irak, ponctuée par des ha et
des ho, le colonel pouvait approuver les déclarations de la capitaine Zohra Daghri
sur l’étendue des dégâts de cette guerre. Le repas continuait avec des gigots
d’agneau à l’ail cuits au four d’argile accompagnés de boulettes de bœufs
roulées dans du riz du Gharb. Le riz était agrémenté de grosses rondelles
d’oignons et de carottes. L’orchestre était magnifique, les vingt et un
musiciens transportaient l’assistance au paradis. Les violons accompagnaient la
voix aiguë
de la chanteuse avec
des glissements feutrés et bien orchestrés. La chanteuse était magnifiquement
habillée, une robe en soie rouge descendant jusqu’aux chaussures, laissant
deviner par transparence une jolie paire de jambes soutenant un corps très
légèrement arrondi. Une magnifique coiffure longtemps travaillée, rehaussée par
des colliers amazighs de différents modèles qui s’envolaient autour de son cou,
lorsqu’elle haussait la voix jusqu’à l’aigu, ponctué par des gestes des bras et
des mains très gracieux. Elle était applaudie longuement par les convives.
Après chaque chanson, elle s’inclinait devant le public et le chef d’orchestre
avec un beau sourire, en reprenant sa place au sein de l’orchestre. Six
danseurs mêlaient leurs pas avec grâce et souplesse avec le son des tambourins,
leurs jambes semblaient s’envoler au-dessus de leurs têtes pour retomber sur la
pointe de leurs pieds. Ce grand
orchestre, uwrikstira
'atlis ealiatan kabiratan, le Grand Orchestre de l’Atlas était connu dans tout
le Moyen- Orient pour ses nombreux talents. Le dîner se termina par une glace
composée surmontée d’un colifichet animé et allumé. La salle s’éteignit et
donna lieu à un feu d’artifice de salon. Les convives gagnèrent les grands
fauteuils du salon, s’affalèrent, certains sortirent des cigares de Havane, les
taillèrent et aspirèrent la fumée que renfermaient les Havanes, mais beaucoup
plus des cigarettes américaines. Beaucoup de bavardages autour de la retraite
surprise du colonel Abdenaour. Durant toute la soirée, Zohra avait été
sollicitée par le colonel soit insidieusement, soit par des glissements de
pieds. Toutes ces attentions la gênaient au maximum, mais entraient dans le
plan mis au point à la Boutique. Il fallait jouer le jeu jusqu’au bout. Le
colonel s’échauffait, elle ne pourrait plus différer encore très longtemps. Il
lui caressait les mains, lui caressait les épaules, tentait de l’embrasser
devant les invités, elle ne souhaitait pas cela, donner ce spectacle, c’était
un officier, il fallait que cela se fasse dans le silence de la chambre à
coucher. Elle arrivait jusqu’à maintenant à calmer le jeu, mais la libido du
colonel était passée au-dessus du secret défense’’. Il fallait continuer à
contenir ses attaques, tout était dans la suite des évènements.
L’heure était venue,
elle chuchota à l’oreille du colonel un mot, il eut un hochement de tête. Elle
dit au revoir d’un signe de tête à l’assemblée avec un gros sourire et sortit
de la salle de réception. Elle monta au deuxième étage, alla aux toilettes et
se revêtit de sa burka au-dessus de son uniforme, elle était complètement
anonyme ainsi. Elle redescendit au rez de- chaussée et se dirigea vers le
véhicule du colonel qui l’attendait impatiemment. Le chauffeur était déjà à
bord les mains sur le volant. Il l’a prise dans ses bras, tentant de
l’embrasser. Elle le repoussa gentiment avec le sourire, nous arrivons- lui
dit-elle, ne sois pas trop pressé, nous avons toute la nuit. L’arrivée à sa
villa n’était pas anonyme, toutes les lumières étaient allumées. Le chauffeur
resta dehors, ils entrèrent dans le salon, le colonel
Abdenaour sortit une bouteille de Champagne, elle n’aimait pas le
champagne et ne buvait pas d’alcool, mais c’était un jour spécial. Elle se
saisit du verre et but une gorgée. Il mit sa main sur sa cuisse qu’elle retira
très vite, allons dans la chambre, lui dit-elle. Il retira sa cravate, sa
chemise, se mit à l’aise et se jeta sur le lit. Zohra jeta son sac sur la
chaise et commença lentement à se dévêtir, rangeant soigneusement ses habits
militaires sur l’autre chaise et restant ainsi en sous-vêtements, le colonel
frisait l’apoplexie. Elle revint fouiller dans son sac comme pour prendre du
parfum, quand le colonel l’a vit revenir vers lui le Glock à la main, il eut un
geste puéril d’autodéfense et projetant ses deux mains vers l’avant, mais le
projectile avait traversé l’os frontal et entré dans le cerveau et pour faire
bonne mesure, elle envoya une balle dans le cœur. Elle attendit un peu pour
être sûre qu’il était mort ? C’était le cas, elle se rhabilla très vite
avec son costume militaire, tellement elle avait honte de s’être fait voir dans
une demi- nudité. Elle attendit le temps que l’on puisse croire à la
consommation de la chair. Un peu plus de trente minutes et elle rajusta sa
burka au-dessus de sa tenue de parachutiste. Elle sortit et demanda au
chauffeur de la conduire à la gare. Elle attendit le train de Rabat, tout avait
été ciblé, il arriva quinze minutes plus tard. A Rabat elle descendit et alla
aux toilettes, enleva sa burka dessus son uniforme et la jeta dans la poubelle.
Elle reprit le train de Fes et descendit à Sidi Slimane, un véhicule de la
Boutique l’attendait. Elle avait les traits tirés, le colonel comprenait par
quel chemin elle avait dû passer. C’est fait, dit-elle ! Il la salua, elle
se leva et alla se coucher après avoir fait sa prière.
Le
colonel Abdenaour Harraou a été assassiné cette nuit à son
domicile, après avoir fêté son départ à la retraite, titraient les journaux.
Pour le moment la police militaire ne put donner de renseignements fiables. La
justice militaire enquêtait. Il aura fallu plus d’une semaine pour que le
Gouvernement annonce avec prudence les motifs de cet assassinat et ses
conséquences. Stupeur dans le peuple marocain, le colonel Abdenaour Harraou
l’un des héros de la guerre d’Irak aurait été assassiné par une équipe de
fanatiques religieux, contrariée par la retraite du colonel. En fait le colonel
était le commanditaire de toutes les attaques depuis plusieurs mois, de l’école
de police au palais royal, la gare ONCF de Sidi Kacem, suivi par la police
militaire. Chef d’un groupe extrémiste religieux salafistes il souhaitait
ramener le Maroc dans le chemin du droit, c'est-à-dire, loin du progrès,
revenir aux principes du passé. Les femmes ne devant pas travailler, mais
rester à la maison à s’occuper des enfants et de l’époux. Une situation digne
du Moyen- Age, bref revenir deux cents ans à l’arrière, tel que l’Arabie Saoudite,
l’Afghanistan, le Pakistan ! Les Marocains ont eu du mal à croire ce qu’en
faisait le tableau de la police militaire. Sa Majesté le Roi du Maroc prononça
un discours sur les institutions du Maroc, il réitéra sa volonté de donner au
pays la richesse, la paix civile, il termina par la destitution du colonel au
grade de simple soldat sans aucune indemnité et avec des obsèques civiles et
d’afficher son mépris pour ceux qui cultivent la trahison.
Il
restait quelques membres du groupe regroupés ou seuls dans la robiya, la
campagne du pays. La police militaire traquait les derniers gourous du colonel
dans la région de Fes. De nombreux lacs couvraient des hectares de vallées
profondes. L’Oued Inoued donna lieu à des combats meurtriers, neuf membres de
la communauté du colonel furent abattus, trois s’enfuirent poursuivis par la
police militaire. La police militaire était solide, elle commanda un
hélicoptère de la base de Sidi Kacem qui repéra très rapidement les fugitifs et
après une course poursuite inutile et épuisante, les trois derniers hommes
refusant les sommations furent abattus ! Les anges pleurent aussi. Durant
ce temps consacré à la police militaire, Zohra assise en tailleur sur le tapis
de sa chambre se laissait conquérir par la beauté des vers d’Ahmed Tayeb Laàlaj, elle se laissait
bercer par le rythme des mots. Elle avait besoin d’oublier l’épisode crasseux
de la soirée de la liquidation du colonel. Cet épisode l’avait traumatisé, elle
souffrait toujours plusieurs années après du complexe africain où elle avait
été violée par cinq mercenaires. Le fait de se mettre nue devant quelqu’un
d’autre la mettait dans un état second, dans un état de violence cérébrale
proche d’une sorte de paranoïa, seul le colonel la comprenait, cela avait été
difficile de jouer cette comédie pour Zohra. C’était un soldat obéissant aux
ordres sans état d’âme, mais jouer avec son intimité, n’était pas dans ses
cordes. D’autres s’en servaient très bien, pas elle ! D’autres enquêtes
surgiront en attendant le colonel la laissait en état d’hibernation. Elle avait
été choquée psychologiquement, elle s’était déshabillée pour tuer. Il la
laissait revenir au point zéro, un agent était un être humain même manipulé,
conditionné pour tuer, liquider au service de la Nation, mais pour elle se
déshabiller était un crime plus haut que le crime lui-même. Son corps était
celui qu’Allah lui avait donné, dans ses formes, dans sa douceur, il sera
réservé à son époux lorsqu’elle en aura un, à son enfant le jour venu, à aucun
moment à un bellâtre prétentieux, décoré, puant l’alcool et ennemi déclaré du
régime royal qu’elle défendait avec honneur et courage, même en mission,
l’abattre sera du domaine de la foi !
Depuis
quatre jours, le colonel avait bloqué tous ses hommes dans les quartiers de la
Boutique. La police militaire avait eu vent d’une intervention possible d’un
commando salafiste contre la Boutique après l’assassinat du colonel Abdenaour
Harraou et de la destruction de leur commando sur l’Oued Inoued ? Zohra avait l’interdiction de
participer à quelques activités que ce soient, ordre du colonel. Les hommes
restaient calmes et attentifs, le fusil d’assaut dans les mains. Ces commandos
parachutistes étaient l’élite de l’armée Marocaine, ils ne pouvaient décevoir.
Jeudi deux heures du matin, les yeux incrustés dans les murs extérieurs de la
Boutique avaient déjà signalé leur approche bien avant leurs tirs inefficaces
d’Armes lourdes, bazookas, lance -fusées contre les murs doublés en béton
d’aluminate de calcium et autres matériaux. Ils s’élancèrent à plusieurs
occasions sur les hauts des murs, mais se retrouvèrent très vite à terre
électrocutés par des rayons électriques super puissants. Quand les nervis
eurent usé leurs munitions mal utilisées contre les murs de la Boutique sans
occasionner de dégât, les commandos parachutistes de la Boutique finirent le
travail par un balayage du paysage. Les corps furent entrés en attendant un hélicoptère de la base de Sidi
Slimane dont les hommes s’arrangeront pour faire disparaître les corps. Le mal était sérieux, le colonel
avait tissé durant des années sous le couvert de l’armée une organisation
extrémiste religieuse dangereuse.
La barque glissait tout doucement sur l’eau du Sébou, cachée par les
roseaux de la berge, les bruits des rames étaient inaudibles malgré les
tourbillons occasionnés par les coups de pelles. La nuit était propice, une
lune cachée par une nuée de nuages. Dans un coude du fleuve, la barque avait
heurté accidentellement la berge, occasionnant le remue-ménage des poules d’eau
et des grenouilles. La barque stoppée par prudence restant dans l’ombre d’un
arbre grandissant près de la berge. Il restait peu de temps avant le chant du
coq, avant le matin. Le dépôt de munitions devait sauter rapidement, ils
ramèrent plus fort et se retrouvèrent ainsi devant une grange sans personnalité
au milieu du champ. Zohra et Abdéramane armèrent leurs lance-grenades de
quarante millimètres, visèrent soigneusement la grange qui se trouvait à
quarante mètres de distance, ils appuyèrent sur la gâchette, une immense
explosion retentit, Abdéramane avait remis les deux petits moteurs de la barque
en route et avec toute leur puissance remontaient le Sébou. Des flammes
montaient encore de la grange, il fallait qu’ils soient loin quand la
gendarmerie interviendrait. Le colonel était soulagé de la destruction de dépôt
d’armes découvert par le fermier propriétaire, étonné de voir encore sa grange
debout, il y avait bien longtemps qu’il la croyait couchée par le vent. Sa
ferme était à une dizaine de kilomètres de son lieu de vie. Cela voulait dire
également que la Boutique allait se trouver à nouveau devant des jihadistes, et de nouveaux dépôts d’armes, en
plein inconnu. Ce ne serait pas une autoroute, mais plutôt des chemins escarpés
semés d’embûches, de difficultés et de coups fourrés.
Salim Merkaoui était un paisible commerçant de Sidi Yahya, il vendait
des fruits et légumes. Il avait sa place dans tous les souks de la région, de Sidi
Bouknadel à Sidi Kacem. Il avait une tente carrée en toile qu’il déplaçait à
chaque changement de souk. Sous cette guitoune, il avait le chic artistique
pour arranger ses fruits et légumes, de jouer avec les couleurs de façon à
attirer la clientèle. Son épouse cultivait plusieurs centaines de mètres carrés
de bonnes terres qui lui donnaient au moment opportun un rendement intéressant
de pommes de terre, de courgettes et de tomates. Son commerce fonctionnait bien,
ses déplacements et la qualité de ses produits se retrouvaient dans ses gains. Salim
était un commerçant aisé, il se rendait chaque vendredi à la mosquée pour la
grande prière, propre et bien parfumé. C’était un homme discret, jamais il ne
parlait de l’Islam, sa foi était sincère, cela lui suffisait. Il vivait en
famille, pas d’ami. Son bonheur se trouvait auprès de son épouse et de ses
trois enfants, deux fils et une fille. Une vie à travers les lunettes d’un
autre était sans intérêt ! La Boutique était remontée jusqu’à lui par la
sœur de son épouse. Celle-ci résidait également à Sidi Yahya, son mari avait
été tué lors de l’attaque du Palais royal de Rabat. Lors de son interrogatoire
à la police militaire, elle avait déclaré ne rien connaître des activités de
son mari, mais qu’Anissa Merkaoui pouvait les aider. Lors d’un déplacement au
souk de Kénitra, la police militaire entra en contact avec elle.
-C’est encore cette
traînée de Rachida qui vous a envoyé vers moi, elle est jalouse, tout le mal qu’elle
peut me faire, elle le fait.
-Vous n’êtes pas une
famille très unie, d’après votre sœur, vous auriez même été la maîtresse de son
mari ?
-Et quoi encore, que
Dieu m’en préserve.
-Pourtant des témoins
vous ont vu sortir de l’hôtel de Kénitra à côté du dancing.
-Ils ne savent pas
quoi dire pour faire parler d’eux !
-Vous avez accusé Salim,
pourtant très discret d’appartenir au groupe du colonel Abdenaour Harraou tué
il y a maintenant sept mois. Pourquoi l’accusez-vous ainsi sans preuve ?
-C’est Hassan avant
qu’il soit tué lors de l’attaque du Palais qui m’en avait parlé. Salim avait un
rôle pas clair dans l’organisation, je n’ai jamais cherché à savoir. Zohra et Abdéramane
décidèrent de revenir chez Salim. Son épouse n’était pas contente, cela faisait
deux fois que la police militaire s’enquérait sur les activités de Salim et
venait perturber sa vie de famille.
-Répondez- moi, vous
êtes visée parmi le voisinage celui-ci confirme de vous avoir vu tromper votre
époux, vous avez commis un adultère puni par la loi islamique. De ce fait vous
devez en savoir beaucoup plus que vous voulez bien nous dire.
-Je ne sais rien de
plus que ce que j’ai dit à vos collègues.
-Nous ne vous croyons
pas, c’est impossible en étant la maîtresse de ce terroriste de ne rien
connaître de ces activités.
-Il ne me disait
rien, nous n’étions réunis que pour les plaisirs de l’amour.
-Salim a un
bureau ?
-Oui, fermé
constamment à clef
-Cela ne vous
surprend pas ?
-Non, après les
souks, c’est son lieu de repos.
-Nous reviendrons
vous voir Anissa !
Rentrés à la Boutique,
ils rendirent compte de la situation au colonel. Il avait un bureau constamment
fermé, avec sans doute un ordinateur ? Il nous faut un ordre de
réquisition pour entrer dans le bureau et prendre l’ordinateur et les dossiers
à l’avenant. Le lendemain matin, accompagnés d’un officier de la police
militaire, ils surgirent à nouveau devant Anissa, qui eut un accès de colère.
L’officier montra l’ordre de réquisition, à l’aide de clefs universelles, il
ouvrit la porte du bureau. Ils ne purent ouvrir la lumière, elle restait
éteinte, ils se saisirent de l’ordinateur et de quelques dossiers et rentrèrent
à la Boutique. Les techniciens de la Boutique ne purent ouvrirent le PC, il était
bloqué par un élément de sécurité pour l’instant inconnu des techniciens.
Ceux-ci butèrent de longs jours sur l’ouverture de l’ordinateur. Zohra repartit
chez Anissa,
-Que fait Salim en
entrant dans son bureau ?
-Nous n’en savons
rien, il s’enferme et joue de la musique, toujours le même air, Aicha de Cheb Kaled.
Rentré à la boutique avec une disquette de Cheb Kaled, devant le colonel et les
techniciens, elle mit en route l’air d’Aicha, l’ordinateur s’ouvrit et livra le
passage aux nombreux documents et noms des terroristes fondamentaux. Anissa lui
avait ouvert l’esprit, Salim était en fait un informaticien et il avait bloqué
toutes ses sécurités, éclairages, caméras, ordinateurs par la musique. C’était
de la grande classe, pas grand monde pouvait y songer ! Les techniciens de
la Boutique s’étaient mis à l’œuvre, des milliers d’informations étaient
disponibles, c’était une manne. Une page spéciale avait été ouverte avec tous
les noms des extrémistes qui s’étaient réfugiés à l’étranger, Hollande, Belgique
et France. C’était d’autant plus intéressant que ces individus étaient
particulièrement dangereux pour les pays où ils s’étaient réfugiés. Trois
équipes furent constituées, trois agents avec leurs servants, chaque équipe
dans un pays. ZOHRA et Abdéramane étaient en France avec comme les autres
agents, ordre de balayer la vermine, mais sans faire de vague. Ils étaient très
nombreux en Hollande, l’agent chargé du travail aurait de quoi
s’occuper ! En général les réfugiés
restaient groupés. C’est par l’ambassade marocaine que Zohra et Abdéramane
purent récupérer leurs armes, la valise diplomatique a ceci de bien. Son
arbalète en acier flexible était là, une arme de trente centimètres de long
capable d’envoyer un trait à cent mètres de distance avec une extraordinaire
puissance. Elle était équipée de traits explosifs en plus des flèches
classiques. Son pistolet pneumatique et son Glock 18 ne manquaient pas à
l’appel. C’était la phase préparatoire du nettoyage classique, liquider les
adversaires du Roi, cachés à l’étranger. La première étape serait Toulouse,
quatre extrémistes vivaient là. Ils se rencontraient chaque midi au café de la
gare. Zohra déploya son arbalète derrière le mur de l’école, assis à la table
du café, ils étaient sereins. La corde était tendue, elle appuya sur la
gâchette, le trait siffla dans l’air et explosa à la table des salafistes. Il
ne restait rien ! Elle avait disparu, Abdéramane se tenait en réserve au
cas où elle serait repérée. La presse ne savait pas comment commenter cet
épisode. La police connaissait ces hommes et les suivait comme des hommes
dangereux. La première fois c’était toujours facile, ensuite, ce ne serait pas
le même programme. Direction Grenoble, ville où de nombreux nord africains
résidaient, où la propagande religieuse rétrograde avait droit de cité. Onze
membres de la secte du colonel Abdenaour Harraou, s’étaient réfugiés. A Grenoble,
ils étaient disséminés dans toute la ville rien à voir avec Toulouse. Ils ne
fréquentaient pas le même établissement, il faudra réfléchir à l’angle
d’attaque. Un groupe fréquentait le Café de l’Université, juste à côté de
celle-ci. Ils restaient de longues heures à discuter entre eux et avec des
étudiants. La bille explosive était tout indiquée, une petite merveille
technologique mise au point par les artificiers de la Boutique. Deux
centimètres de diamètre, il suffisait de la lancer et dès qu’elle arrivait à
son but, elle explosait par le choc occasionné ! Le problème c’était les
dégâts collatéraux produits par l’explosion, les étudiants, les tables
alentour. Ils étaient cinq tous les jours à table. Il faudra s’engager et tirer
presque à bout portant pour ne toucher que les extrémistes. C’était risqué,
cinq personnes à abattre avec le risque d’être reconnu ailleurs. Ils
s’avancèrent vers la table, les automatiques crachèrent leurs projectiles, les
hommes s’effondrèrent sur leur chaise. Zohra et Abdéramane continuèrent leur chemin
comme si de rien n’était ! Deux autres hommes avaient élu domicile à côté
de la mosquée d’Echirolles, un petit appartement discret au deuxième étage. Ils
montèrent sans faire de bruit, frappèrent à la porte sans résultat. Nos lascars
se méfiaient. Abdéramane enfonça la porte et se mit à couvert, nos deux
individus étaient armés et n’hésitaient pas à s’en servir. Zohra se coucha à
terre, visa celui qui était devant elle, il tomba foudroyé par le feu du Glock.
Abdéramane entra en trombe et tira dans la foulée, le deuxième homme s’écroula
à terre. Ils redescendirent quatre à quatre, les escaliers et s’esquivèrent,
l’opération avait duré à peine trois minutes. Les autres travaillaient dans
l’usine à papier de Grenoble. Ils se postèrent à la sortie de l’usine, les
ouvriers retrouvaient la liberté de leurs mouvements. Les voici, ils arrivaient
groupés en gesticulant. Détachés des autres groupes, Zohra et Abdéramane les
abattirent sur le trottoir. C’était terminé, le Maroc était débarrassé d’une
gangrène. Sur le plan diplomatique, cette histoire donna lieu à des
empoignades, le gouvernement Marocain donna des preuves qu’il n’était pas le
commanditaire de ces massacres. Le gouvernement français n’en croyait pas un
mot, mais la longue amitié entre les deux pays eu raison de la polémique et que
faire contre la raison d’Etat ? Tout était également terminé en Belgique,
seuls les problèmes subsistaient en Hollande où de nombreux salafistes
s’étaient réfugiés. La boutique n’avait qu’un agent qui parlait le flamand d’où
difficultés à régler les problèmes.
Sa Majesté le , Chef des Armées
avait pris une décision capitale et non sans risque. Il dissolvait le régiment
de Marrakech auquel avait appartenu le colonel Abdenaour Harraou. Les hommes du
régiment seront partagés entre les régiments d‘Al Hoceima, d’Agadir et Darkla.
Les soldats seront soumis au régime des commandos de marine. Les militaires
n’acceptant pas cette mutation pourront retourner à la vie civile, mais sans
indemnité ! L’attaque du Palais Royal avait marqué durablement le
monarque.
Le problème restait en entier
sur le plan intérieur, l’ordinateur de Salim livrait beaucoup de noms, plus de
deux cents noms. La police militaire devra faire sa part de boulot, la Boutique
ne pouvait intervenir partout, seulement sur des cas particuliers. Salim avait
été emprisonné depuis la découverte de son ordinateur, il pouvait encore donner
des renseignements capitaux, son temps n’était pas encore venu ? Qui était le
nouveau gourou de cette mouvance salafiste ? L’on savait que quelque chose
se préparait, où, quand, comment ? Pour le moment ils étaient en avance
comme pour l’attaque du Palais.
Dans la nuit du jeudi au
vendredi, des dizaines de bateaux en caoutchouc firent des allers- retours en
glissant sur l’eau de la côte d’Essaouira aux îles Purpuraires, remplis
d’hommes en armes. Environ quatre cents hommes s’installèrent sur les îlots. En
mettant les pieds sur la plus grande des îles, Omar Hssain, planta le drapeau
de la République Wahhabite du Maroc. Il galvanisa une dernière fois ces hommes
prêts à mourir pour leur foi. Vous irez tous au paradis leur dit-il, c’est ici
que commence le nouveau Maroc, c’est ici qu’Allah vous attend. Il fit un geste
de salut et reprit le chemin d’Essaouira. Le lendemain matin, ce fut la
consternation, le Maroc est indivisible, cette République Wahhabite était une
insulte au Maroc. Le plus petit caillou, le plus petit grain de sable du
territoire appartiennent au royaume, les habitants de toute la côte d’Essaouira
s’étaient rassemblés devant les îlots. Ils s’enfuirent rapidement pour se
mettre à l’abri à l’arrivée de l’aviation royale qui pilonna sans discontinuer
les petites îles. L’arrivée des commandos de marine avec des ordres précis, pas
de survivants, jeta encore plus la confusion dans les esprits. Les militaires
creusèrent des fosses profondes et larges, ils y entassèrent les morts, puis
recouvrirent de terre. C’était leur linceul ! Si Omar, que personne ne
connaissait encore, pensait que le Roi allait composer, négocier, il se
trompait lourdement, comme son père l’avait fait avant lui, il avait très vite
réagi dans l’intérêt de la monarchie et du Maroc. La République Wahhabite du Maroc
avait trouvé sa marque au prix de quatre cents tués et martyrs, c’était un coup
d’éclat. De son côté le Roi avait rehaussé son prestige en tenant tête aux Wahhabites,
en liquidant très vite ces rebelles. Le peuple était de son côté et
l’approuvait sans compter ! Tant que la tête de l’hydre ne serait pas coupée,
le Maroc se trouverait confronté à cette marginalité. La police spéciale, la
police militaire, la Boutique depuis des mois, cherchait le responsable ou les
responsables de ces déclenchements de violences salafistes, en vain. Zohra
retourna à nouveau vers un iman interdit de pratiquer pour violence et haine
envers la Royauté et la religion du Maroc, le sunnisme malékite. Le Roi est Amir
Mouminine, commandeur des croyants et à ce titre il défend l’Islam sunnite
malékite dans le royaume. Cet iman ne pouvant plus entrer et prêcher dans les mosquées
dispensait sa haine dans la rue. Il avait du succès auprès des paysans pauvres,
sans travail qui pensaient qu’un retour au Moyen -Age, au temps du prophète
arrangerait leur situation. Abir Maksen avait toujours une cour importante venue
pour écouter ses discours. Zohra ne pensait pas qu’il était capable de
provoquer ces réactions violentes et de les télécommander, mais il aidait à l’insécurité
et à la haine de la religion officielle. Abir était devenu gênant, il fallait
l’éliminer. Il se déplaçait en vélo de village en village. Un jour il tomba
juste devant un camion, l’on ne sut comment, il mourut pendant son
transport à l’hôpital ! La
situation n’était pas réglée pour autant. Des foyers éclataient par- ci par- là
avec quelques agitateurs. La liste de Salim était chaque jour épluchée sans
trouver le pion recherché. Ce vendredi c’était à Agadir, une centaine de
salafistes défilaient dans les rues du mausolée de Sidi Bouknadel avec le
drapeau de la République Wahhabite du Maroc, en demandant un retour au temps du
prophète. Ils furent dispersés violemment par la police, l’on déplorait deux
morts et sept blessés dont un grave. Ces incidents devenaient de plus en plus
fréquents et bien orchestrés, jetant le discrédit sur le gouvernement et sur le
Roi. Il fallait reprendre l’enquête dès le départ. Qui était autour du colonel
Abdenaour Harraou, se mouvait dans sa sphère, connaissait les moindres détails
des opérations ? Avec la dispersion des officiers, et la suppression du
régiment d’artillerie de Marrakech réduit en plusieurs groupes, mutés dans
d’autres régiments, en particulier dans les commandos de marine, il devenait
difficile de repérer des meneurs.
Vous devriez allez faire un tour
à Darkla rencontrer le lieutenant-colonel -chef du régiment de marine,
capitaine, vous y apprendrez sans doute quelque chose d’intéressant. A chaque
fois que le colonel employait des phrases sibyllines, il y avait anguille sous
roche. Zohra commençait à bien le connaître. Un vol de Rabat la transporta
directement à Darkla. C’était la première fois qu’elle se rendait dans cette
ville, elle fut impressionnée par cette longue bande de terre, cette péninsule
d’une trentaine de kilomètres de long où était construite Darkla. La mer était
toujours furieuse et projetait ses vagues sur le littoral au grand plaisir des
amateurs de sports nautiques. L’histoire de Darkla était passionnante, citée du
Sahara Occidental revendiqué par le Polisario, elle a été annexée par le Maroc
depuis son évacuation par la Mauritanie en 1979. Chef-Lieu de la province d’Oued
Ed Dahab, elle est devenue très vite une ville touristique grâce aux sports
nautiques. Une autre originalité de la cité, elle est la dernière ville
marocaine avant la Mauritanie et se trouve seulement à trente kilomètres du
tropique du cancer tout comme Cuba ! Elle se dirigea vers le casernement
des troupes de marine après avoir revêtu son uniforme de parachutiste à l’hôtel
et se présenta au planton. Elle se fit accompagner jusqu’au bureau du
lieutenant-colonel Amar Mekhlaoui. Elle le salua, mon colonel,
-capitaine ravi de
vous recevoir.
Après ces échanges de
politesses, Amar Mekhlaoui aborda immédiatement le sujet pour lequel elle était
ici.
-J’ai un sujet
délicat capitaine, mon cuistot en chef a demandé à ne plus travailler en
cuisine, il demande un autre poste. Pour nous c’est important, c’est un
excellent cuisinier, un excellent acheteur, il est aidé par quatre aides -cuisiniers.
Ceux-ci proviennent du régiment dissous de Marrakech.
-Vous a-t-il signifié
son motif
-Il m’a laissé
entendre des incompatibilités d’humeur,
-je ne peux accepter
ces doléances !
-Il doit y avoir des
motifs beaucoup plus graves que des incompatibilités d’humeur.
-Je le pense aussi,
mais je ne peux accepter, si tous les soldats refusaient d’un seul coup le
poste qu’ils occupent, où irions-nous ?
-Mon colonel
pourrais-je disposer d’une pièce pour m’entretenir seul à seul avec votre
cuisinier ?
-Salam alékoum
sergent-chef Idriss Nafia,
alékoum salam mon
capitaine.
-Sergent-chef je vous
ai demandé de venir dans ce bureau pour discuter de votre affaire, j’appartiens
au groupe spécial de la police militaire, vous n’avez rien à craindre. Tout ce
que vous direz ne sortira pas de cette pièce. Sergent-chef, comment un soldat
de votre trempe, j’ai vos états de service en mains fournies par le colonel Amar
Meklaoui, blessé en Irak, rapatrié et muté dans les services auxiliaires à
cause de votre blessure. Pourquoi voulez-vous abandonner ce poste que nous
n’accepterons pas d’ailleurs, ce n’est pas vous qui décidez de la fonction dont
vous serez chargée, mais le commandement de la base. Le colonel Amar Mekhlaoui
est satisfait de vos services et de la qualité de votre cuisine apportée aux
hommes de ce régiment. Ceux-ci sont également satisfaits, c’est bon pour le
moral, vous ne serez pas transféré dans un autre poste ! Asmae, écoutez,
vous pouvez me faire confiance, je représente l’armée, le Maroc par mon titre
et mon grade auprès du Roi, ce que vous me direz, c’est une garantie, restera
entre nous deux.
-J’espère que je ne
serais pas trahi ? Mon capitaine, les autres aides -cuisiniers qui
travaillent avec moi, proviennent du régiment dissous de Marrakech, ils
continuent à diffuser les idées du colonel Abdenaour Harrou. Je ne veux plus
entendre leurs slogans, leur haine envers le roi et notre religion. Je suis
tout seul à entendre cela, personne ne me croira et je risque le tribunal
militaire.
-Shoukrane, merci
sergent-chef, je connais enfin le pourquoi du comment de votre attitude. Je
vous félicite pour votre fidélité envers notre Roi et notre religion dont le
Roi est le gardien. Je vais vous faire une proposition, je suis sur les traces
du commanditaire des émeutes qui éclatent ici et là sur le territoire du Maroc,
de Tanger à Safi. Asmae, anabihajat ‘iilaa’adhin, écoutez, j’ai besoin d’une
oreille pour m’aider à localiser ces extrémistes salafistes, et leur
commanditaire voulez-vous m’aider ? En restant à votre poste, vous écoutez
leurs propos, vous vous intégrez même et vous m’en rendez compte. Voici un
numéro de téléphone que vous pourrez appeler de nuit comme de jour, n’hésitez
pas, même si cela vous paraît anodin, pour le Roi, pour le Roi ! Mettez-le
dans votre tête pas d’annotation, pas de papier, pas de téléphone, tout dans
cerveau. C’était peut-être le début d’un fil de l’écheveau ? Elle resta
quelques jours à la caserne allante et venante d’ici, delà, les soldats étonnés
d’apercevoir un capitaine parachutiste dans leurs locaux. Zohra s’aperçut très
vite de la cassure entre les membres arrivés de Marrakech et les anciens de Darkla.
Tous les Marrakech n’étaient pas des extrémistes de la bande du colonel
Abdenaour Harraou, tant s’en faut, mais la sauce ne prenait pas. Il y avait
souvent des bagarres réprimées sévèrement par les gendarmes du poste. Trois
semaines plus tard, Zohra reçut un appel d’Idriss Nafia, capitaine, il
semblerait qu’ils aient appelé à une manifestation à Casablanca devant la
Grande Mosquée, mais je ne sais pas quand. Zohra appela le colonel qui avec la
police militaire organisa la répression à cette nouvelle manifestation
salafiste à venir. Ce fut le vendredi matin, cinq cents manifestants
déboulèrent sur le parvis de la mosquée Hassan II, drapeau de la République Wahhabite
du Maroc en tête et des slogans tels que Mohamed, abdication. Tout était prêt du côté du pouvoir, quarante
cavaliers au galop se projetèrent sur les manifestants, les jetèrent à terre et
les piétinèrent, ceux qui essayèrent de se relever étaient inexorablement
piétinés. Les manifestants déboussolés essayèrent de fuir, mais l’armée, le
régiment de parachutistes de Casablanca se terminait dans un bain de sang,
fustigé par le Roi et le gouvernement. Les extrémistes n’en tiraient que de la
publicité pour leur projet de République, mais rien de concret. Idriss Nafia
fut récompensé par une nomination au grade d’adjudant. Ses amis le
plaisantaient en l’appelant l’adjudant Popote, ce qui le faisait sourire.
L’adjudant Popote était arrivé à se faire des copains avec les Marrakech de la
cuisine, des tranches de rires entre deux critiques de Mohamed comme ils
appelaient le Roi d’une manière irrévérencieuse. Petit à petit, la sauce avait
pris entre les Marrakech et Idriss Nafia, à tel point qu’il n’y avait plus de
secrets entre eux, mais Idriss se méfiait. Ils parlaient du jour où la
République serait proclamée avec un retour au temps du prophète Mohamed. Ils
travaillaient pour cela en contact avec un gourou qui gérait toutes les
actions, organisaient chaque manifestation et appelaient à l’abdication du Roi
Mohamed, commandeur des croyants auquel il ne croyait pas, pour lui pas de
filiation entre le roi Mohamed et le prophète, cela n’était qu’une légende. Ce
gourou existait donc, mais il était inaccessible pour le moment, invisible,
inconnu. Il gérait tout de loin, bien loin des manifestations sanglantes dont
il semblait se délecter. Idriss ne savait pas qui était le commanditaire de
toutes ces actions, il se gardait bien de toute curiosité auprès des Marrakech.
Zohra fut appelée d’urgence à Darkla, Idriss était à l’hôpital dans un
état grave, sa vie était dans les mains d’Allah. Le colonel lui indiqua qu’il
avait reçu deux coups de couteau. Le couteau était l’un de ceux avec lesquels
l’on dépeçait la viande, pas d’empreintes retrouvées, elles avaient été
effacées. Si elle agissait à la caserne, elle serait immédiatement soupçonnée.
Elle retourna voir Idriss à l’hôpital, le couteau avait heureusement glissé
entre deux côtes épargnant le cœur. Opéré rapidement, il vivra, Zohra était
contente, elle se sentait responsable de cet attentat à son endroit. Idriss
avait envie de parler, les Marrakech lui avaient signalé qu’ils obéissaient à
un chef religieux nommé Omar Hssain, c’était le gourou de l’organisation. Zohra
était ravie, elle prévint le colonel qui fit des recherches sur Omar Hssain. Il
apparaissait sur la liste de Salim, mais son profil n’avait pas donné lieu à un
suivi. Il était évident que les quatre Marrakech aides- cuisiniers seraient
soupçonnés en premier. Zohra était persuadée que ce n’était pas de ce côté-là
qu’il fallait chercher. Idriss lui communiqua le nom de son agresseur, le
lieutenant Amar Beroud, lui aussi transfuge du régiment de Marrakech. Dès qu’il
eut la certitude qu’Idriss avait parlé, il déserta sur le champ et rejoignit le
groupe de protection d’Omar Hssain. Lorsque l’on aura retrouvé Amar, l’on sera
sur la trace d’Omar. Le régiment de Marrakech était pollué par cet esprit religieux
partisan et dangereux orchestré par le colonel Abdenaour Harraou. Le Roi avait
eu raison de le dissoudre, mais avec le risque de la tache d’huile. C’était une
partie habilement constituée, où les pièces étaient avancées suivant un plan
mûrement réfléchi. Ils avaient toujours une longueur d’avance. La tentative
d’assassinat d’Idriss montrait leur détermination. A Tanger une marche était
organisée très vite réprimée par un escadron de la marine, cette marche qui
devait réunir plusieurs centaines de participants s’était réduite à quelques
dizaines, les Amazighs n’ayant pas voulu se mêler à une manifestation qui
risquait de liquider définitivement les Berbères du pays du RIF. Zohara
s’aperçut également qu’elle était suivie par deux individus, militaires,
civils ? C’était son tour, en tant
qu’officiere de la police militaire, elle posait trop de questions et
commençait à en savoir trop. Elle se dirigea vers la mosquée de Darkla, entra
dans la partie des femmes, fit une courte prière et ressortit par la petite
porte des femmes. Ils étaient adossés au mur de la mosquée, le Glock de Zohra
les cueillit debout, ils s’effondrèrent sur les pavés entourant la mosquée.
Elle poursuivit son chemin jusqu’à la caserne. Le profil d’Hssain était revenu
dans les mains du colonel. Reçu quatrième de sa promotion d’ingénieurs en
électronique et informatique de l’école Moha&med V de Rabat, il était
souligné entre autres sa grande capacité d’organisateur et de formateur qui
devrait le propulser rapidement à un poste de direction d’une grande
entreprise. Comment les profileurs de la Boutique et de la police militaire
n’avaient pas repéré ce bonhomme ? Pour le moment, il était introuvable,
aucun indice ne permettant la plus petite piste.
Le lendemain de l’agression de Zohra, le colonel Amar Mekhloui réunit
toute la troupe dans la cour de la caserne.
Soldats, sous-officiers, officiers, depuis que des éléments de l’ancien
régiment de Marrakech sont inclus dans notre effectif, les problèmes ne font
qu’empirer, le dernier très gravement avec la tentative d’assassinat de
l’adjudant Idriss NAFIA et la désertion du lieutenant Amar Béroud. Le capitaine
Zohra Daghri qui ne devait rester que quelques jours restera avec nous jusqu’à
la fin de son enquête. Vous devrez vous conformer à ses désirs de vérité, elle
a tous les pouvoirs de par les ordres du bureau spécial de la police militaire.
Vous devrez répondre à ses questions sans vous dérober, en toute logique, en
particulier ceux de Marrakech qui sont ciblés en premier. Un adjudant s’avança
de deux pas vers le colonel.
-Mon colonel, nous
refusons d’obéir à une femme dont nous ne connaissons pas les antécédents.
-Vous obéirez au
capitaine, c’est un ordre !
-Nous sommes
plusieurs à vous désobéir, qui est ce capitaine que l’on nous met dans les
jambes ?
-Un soldat qui a fait
ses preuves au feu, qui a mérité ses galons, maintenant rentrer dans le rang.
Vous serez jugé pour rébellion et insubordination, en attendant vous êtes mis
en quarantaine.
-Vous permettez mon
colonel souscrit Zohra, je voudrais mettre des choses au point avec l’adjudant
Mohamed Hajjari.
-Je vous en prie
capitaine
-Mon adjudant vous
semblez avoir une très faible opinion de moi, accepteriez-vous un combat avec
moi-même ?
-C’est une
plaisanterie mon colonel ?
-Pourquoi pas puisque
vous êtes si sûr de votre supériorité de mâle, je vous laisse libre
d’accepter, il n’y aura aucune sanction pour le combat, mais les sanctions ne
seront pas levées pour insubordination !
Mohamed Hajjari
enleva très vite son blouson, se débloqua les épaules à grands coups de
roulements sur elles-mêmes. Il s’avança vers Zohra l’air dominateur et
tellement sûr de lui.
-Soldat lui dit-elle
comme une insulte alors qu’il était adjudant pour le mettre hors de lui, avez-
vous assez de couilles pour m’attaquer. Elle n’avait pas l’habitude de la
vulgarité, mais c’était une façon de le mettre en rage. A deux mètres d’elle,
sa jambe droite se détendit comme un ressort, le pied droit atteignit son
menton, fractura la mandibule, elle tournoya sur elle-même, son pied gauche
frappa avec force la mâchoire et lui occasionna également des dégâts
importants.
Mohamed Hajjari
s’écroula inconscient sur le sable de la cour de rassemblement.
-Soldats dit-elle
devons-nous continuer ?
Personne ne s’avança,
la démonstration avait été positive ! Mohamed Hajjari avait été conduit à l’infirmerie
puis à l’hôpital pour une opération délicate, mais il n’échapperait pas aux
sanctions pour insubordination. Zohra s’était fait respecter, restait à tirer
le fil ténu de la subversion. L’adjudant
Idriss Nafia sorti de l’hôpital a été transporté en ambulance jusqu’à la
caserne, et là surprise tout le régiment réuni avec le colonel entama l’hymne
national marocain, ensuite dans un élan de solidarité toute la troupe scanda,
pour l’adjudant Popote, hip hip hip hourra, hip hip hip hourra, hip hip hip
hourra ! Idriss ne s’attendait pas à cette réception, très ému, il lança
un sonore salam alékoum, la main sur le coeur et rejoignit rapidement ses
quartiers. Zohra attendit le lendemain pour lui rendre visite. Vous êtes un
héros, adjudant Popote, j’en suis heureux pour vous. D’après ce que le docteur
m’a dit, vous en aviez encore pour trois semaines de rééducation avant de
reprendre votre boulot à la cuisine.
-Hal mazalt adhni, êtes-vous
toujours mon oreille ?
- Plus que jamais mon
capitaine
Bien, nous
reparlerons de tout cela plus tard, reposez-vous adjudant.
Le lendemain du retour d’Idriss
une nouvelle action était prévue, s’emparer du lieutenant -colonel -chef de la
base de Darkla, de le destituer et de le remplacer par un Marrrakech au grade
le plus élevé. Dès qu’il fut mis au courant de la situation par l’un des Marrakech,
Idriss prévint Zohra. Celle-ci mit autour du colonel Amar Mekhlaoui une garde
fidèle et fortement armée et de réagir immédiatement en cas d’intervention des terroristes.
C’était le dernier coup des extrémistes, heureusement qu’Idriss avait été
prévenu. Ils tentaient le tout pour le tout, diminué dans leurs effectifs après
leurs différentes attaques réprimées sévèrement, ils cherchaient à s’emparer du
régiment et à marcher sur le commandement du port et de prendre l’amiral en
otage. Quatre heures du matin, le brouillard enveloppait tout l’environnement
du petit matin, les extrémistes s’approchèrent du bâtiment où logeait le
colonel. La garde du colonel ne bougeait pas, les Malfrats auront une belle
surprise. Ils forcèrent la porte à coups de pied, quand ils furent entrés, ils
furent hachés menus par la mitraille de la garde, certains voulurent s’enfuirent
peine perdue, ils furent rattrapés et aussitôt occis ! Ils avaient tout
perdu, c’était terminé, le groupe de Marrakech était anéanti. L’Etat- major en
fut informé, mais cela n’arrêtait pas l’ambition d’Omar Hssain toujours
introuvable. Il avait perdu la guerre de Darkla mais il avait dans le cœur
cette haine farouche, et ce fanatisme tant qu’il ne serait pas abattu, il
sèmerait la terreur et la mort. A plus de mille kilomètres de Darkla à Kénitra,
le terminal du train à grande vitesse Tanger Kénitra, gare d’échanges pour Fes,
Tanger et Casablanca par les lignes d’arrêts dans les gares situées sur le
parcours de ces lignes étaient passé au peigne fin, chaque centimètre carré
était analysé. Un communiqué parvenu à la presse notait que la gare était piégée
et sauterait à quatorze heures vingt, signé la République Wahhabite du Maroc.
Omar Hssain avait changé de méthode, n’ayant plus d’effectif suffisant, il
employait les moyens les plus les lâches, ceux des poseurs de bombes ! Les
démineurs s’activaient du sol au plafond sans rien trouver. Il semblerait
qu’Omar Hsain ait raconté une histoire. A quatorze heures, la police fit
dégager tout le monde, passagers et employés, la gare était complètement vide.
Un périmètre de sécurité de deux cents mètres avait été établi autour de la
gare. A quatorze heures vingt, une violente déflagration fit tomber murs et
plafonds du hall d’entrée, où avait bien pu être caché l’explosif ? Les
démineurs étaient consternés. Ils avaient été trompés, joués, la colère leur
remplissait l’esprit. Ils décidèrent de se réunir et de réfléchir à la
situation. Tout avait été vérifié, centimètre par centimètre, qu’avons-nous
manqué ? La fumée s’était dissipée, ils retournèrent sur le lieu de
l’explosion. Ils examinèrent soigneusement les lieux sans rien découvrir de
spécial. Zohra arrivée sur les lieux leur dit : arrêtez de vous effritez
le cerveau, vous n’êtes pas responsables, l’explosion a été provoquée par un
petit drone de l’armée, elle se rappelait ceux du désert en Afrique. Devant
leur air ébahi, elle leur expliqua que l’armée possédait des petits drones de
quinze centimètres de long. Il devait donc y avoir au moment de l’explosion un
véhicule militaire garé en première ligne. C’était à la police de se rappeler
les éléments qui étaient en première ligne. Un policier se rappelait
effectivement qu’une Jeep était garée en première ligne, mais suivant les
consignes dans le périmètre de sécurité. Omar Hssain était intelligent, il se
servait de toutes les techniques possibles. Le colonel rechercha si à Kénitra
il existait un régiment de transmissions. Il existait un régiment à Sidi Slimane
tout près de la Boutique avec une unité d’aviation légère. Le colonel eut
rapidement les éléments nécessaires pour boucler cette enquête. Le caporal
Youssef Irfane, préposé aux différents drones du régiment, avait volé un petit
drone, le matériel de gestion et une camionnette. Il est entièrement
responsable de l’explosion de la gare ONCF de Kénitra au nom la République Wahhabite
du Maroc. Il a avoué sa responsabilité dans l’explosion de la gare et son
engagement auprès la République Wahhabite du Maroc. Incarcéré, il sera jugé par
le tribunal militaire dans plusieurs mois. Quatre mois après le tribunal
militaire le condamnait à trente années de prison sans possibilité de réduction
de peine. Douze mois étaient passés, Zohra était venue le visiter.
-Caporal Youssef Irfane,
je suis venue vous faire une proposition, je peux vous faire alléger
considérablement votre peine et même obtenir votre libération conditionnelle si
vous me donnez suffisamment de renseignements sur Omar Hssain.
-Que voulez-vous
savoir ?
-Tout ce qui le
concerne, où loge-t-il, comment vous joint-il ?
-Je n’ai pas
grand-chose à vous dire, personne ne sait où il habite, pour nous joindre,
c’est toujours lui qui nous appelle, il se sert de son portable, une
conversation très rapide, nous savons que c’est lui, car il commence toujours
par : le Bouregreg coule à Rabat !
-C’est tout, je n’ai
pas grand-chose pour lui mettre la main dessus ?
-Malheureusement je
n’ai pas autre chose à vous dire
-Bien, je reviendrais
vous voir, peut -être aurez-vous retrouvé des éléments oubliés
aujourd’hui ?
Zohra n’avait rien à
se mettre sous la dent, il fallait pourtant que la situation se décante. L’on
chuchotait qu’Omar Hssain serait un descendant de juifs berbères du Haut Atlas,
si c’était le cas, il y aurait peut- être une solution ? Une association avec la mafia israélienne, Israeli
Connection qui règne sur le monde entier de la pègre serait une bonne idée. Ce
ne serait pas la première fois qu’une telle association aurait lieu dans
l’intérêt du Maroc. Le colonel étant d’accord, Zohra se retrouva attablée avec
Eli Golstein, le patron de la mafia juive au Maroc, la police fermerait les
yeux sur le trafic de hachich de la mafia jusqu’à l’arrestation d’Omar Hssain,
après Inch Allah. Cela prendra du temps, mais la mafia avait les moyens de le
retrouver. Omar Hssain devait s’assurer du soutien de quelques flibustiers pour
réussir ses coups fourrés, sans doute la mafia marocaine. Si c’était le cas,
l’on assisterait à l’élimination réciproque des soldats du crime de chaque côté,
ce qui ne serait pas une mauvaise affaire pour la société civile.
Cela n’avait pas été long, Zohra
comptait les points, le premier à être éliminé a été le check de la mafia
marocaine Malek E Allam, service bien fait, tirs de kalachnikov depuis une
automobile et le caïd entouré de ses gardes du corps n’était plus disponible. Issac
s’occupait de ses intérêts, il avait le champ libre. Achraf Farrath préparait
un convoi de cent kilogrammes de cannabis vers l’Espagne, la marchandise était
entreposée dans un tout petit garage de Oujda, petit garage impersonnel,
surveillé par quatre de ses hommes. Au jour J, Achraf était là avec une vieille
camionnette Susuki toute rouillée, il ne fallait pas se faire remarquer, la
came était bien cachée. En plus de la Susuki, une deux chevaux Citroen, toute
plissée suivait directement au cul de la Susuki, chargée de quatre hommes armés
prêts à tout. Derrière la Citroen, une Laguna là aussi chargée de quatre nervis
à la solde de Achraf. Devant la Susuki un camion Berliet en protection optimum.
Ils avaient pris la direction de Nador où un bateau sardinier les attendait. A
un moment, un accident barrait provisoirement le passage, le convoi s’arrêta. Achraf
prudent sortit de la Laguna pour s’informer de la situation. C’était vraiment
un accident, deux voitures s’étaient rentrées dedans, une sortie de route,
l’une s’était même encastrée dans le capot moteur de l’autre. Achraf venait
juste de se réinstaller dans la Laguna quand la fusillade éclata, le chauffeur
du camion gisait à terre, les quatre truands de la Citroen n’avaient pas eu le
temps de dire ouf, ils étaient occis, recroquevillés sur leurs sièges, seuls
les passagers de la Laguna avaient eu le temps de sortir du véhicule. Leurs
assaillants étaient camouflés derrière les rochers du bas-côté de la route. Ce
n’était pas leur jour, les assaillants avaient prévu leur attaque avec une
précision d’horloger, ils furent fusillés par- derrière, ils sombrèrent
lamentablement dans des flaques de sang. Elie vint se rendre compte du résultat
de l’opération, il eut un sourire satisfait, la Susuki fit demi-tour vers Oujda.
Zohra se doutait que l’opération Achraf était montée par Elie. Il avait
distribué par ailleurs les photos d’Omar Hssain à tout le réseau mafieux de
l’Israéli Connection du Maroc, il y allait de sa crédibilité. Pour le moment la
mafia marocaine n’avait pas fait le rapprochement des évènements avec l’Israéli
Connection. Le bar Charit Bar, Maroc Aujourd'hui, à côté de la bibliothèque de
Salé était le quartier général du caïd de la mafia marocaine de toute la région
de Salé jusqu’à Kénitra, Youri M’Feddal. Toute la pègre régionale se réunissait
là pour discuter affaires, escroqueries, prostitution, attaques de
banques. Le cafetier était également le trésorier de toute cette bande de
voyous. Il avait un coffre-fort dernier cri, l’ouverture forcée ne pouvait se
faire qu’avec l’aide de la dynamite. Le bar du Maroc Aujourd'hui était une
place forte imprenable. Un fourgon Mercedès s’arrêta sur le bord du trottoir en
face du café, sept malfrats s’engouffrèrent dans le bar Sharit Almaghrib Alyam
en aspergeant toute la clientèle de mitrailles, les corps tombaient sans avoir
eu le temps de répliquer. Le cafetier était tenu en respect, il refusait de
parler, une balle dans la tête l’envoya au paradis. Une chaîne accrochée au
coffre traîna le coffre jusqu’au fourgon. Ils disparurent en laissant sur le
trottoir l’un de leurs hommes touchés à la jambe par une réplique. La police
arrivée sur les lieux amena le blessé à l’hôpital de Rabat. Le quidam, Moïse Abecassis
était connu des services de police pour attaques à mains armées, mais il avait
toujours échappé à la justice. Il était maintenant évident que l’attaque du café
était l’œuvre d’Israéli Connection, ce
qui allait amener une guerre entre les bandes mafieuses. Elie n’était pas
mécontent de ce coup-là même s’il avait perdu un soldat qu’il croyait mort. Il
avait fait appel à un maître pour l’ouverture du coffre-fort. Il était en acier
spécial, si l’on employait la dynamite, l’on risquait de tout faire sauter et
de brûler en même temps les papiers et l’argent. La solution serait de percer
tout autour de la serrure des trous à un centimètre de distance l’un de l’autre
avec des mèches spéciales qui coûtent une fortune avec des rechanges parce
qu’elles s’usent vite. Il faudra beaucoup de patience, tout le percement
prendra une bonne journée sans doute plus vue la lenteur du travail, mais la
réussite vaut bien une journée de travail et de patience. Il n’avait toujours
pas de nouvelles d’Omar, à croire qu’il n’existait pas. Dans un sens cela
l’arrangeait bien, pendant ce temps il faisait impunément ses affaires. Son
quartier général se trouvait au restaurant juif de Rabat, Mathal Almanzil, Comme
Chez Soi, curieusement écrit en arabe, pourquoi pas en hébreu, de peur de
représailles ? Elie avait disposé ses hommes pour résister à une attaque
toujours possible des Arabes, une première ligne de soldats se trouvait avec
les serveurs armés de pistolets, à l’entrée du restaurant, entre les tables,
une seconde ligne à l’entrée de la cuisine et derrière le bar pour repousser
l’adversaire avec des kalachnikovs. Minuit, le restaurant fonctionnait
toujours, l’homme à l’entrée donna l’alarme, une automobile venait de s’arrêter
juste en face du Mathal Almanzil, les hommes n’eurent pas le temps de
s’approcher du restaurant, les soldats d’Eli les avaient occis sur le trottoir.
Les clients présents eurent leur repas payé par la direction. La police
interrogea les témoins, les clients, les serveurs qui avaient remisé leurs
armes. Ils n’avaient rien vu, tout se passait sur le trottoir. La police
n’était pas dupe, les cadavres sur le trottoir étaient des maghrébins, la
guerre de la drogue venait de commencer, la mafia marocaine contre l’Israéli
Connection. Un inspecteur avait trouvé une douille de sept millimètres
soixante-cinq près de la porte, signe que la bagarre était partie d’ici, Si Zohra
voyait cela d’un bon œil, il n’en était pas de même pour la police qui s’attendait
à une recrudescence de violence, les deux mafias n’allaient pas se faire des
cadeaux.
De son côté Omar ne chômait pas,
il bougeait beaucoup, à Sidi Slimane il avait révolutionné la cité, aidée par
deux voyous en exercice en jouant les kamikazes avec des tirs de mortiers
d’artifices en pleine ville, repoussant les forces de l’ordre de l’autre côté
de la ligne de chemin de fer. Brandissant le drapeau de la République Wahhabite
du Maroc, les deux sbires se sont retrouvés tous seuls sous les tirs de la police
après la fin des tirs de mortiers, Omar avait disparu, il avait eu ce qu’il
avait voulu, créer de l’agitation dans cette petite ville. Les deux voyous
tombèrent sous les balles de la police, sacrifiés par Omar. Les dossiers et les
archives des entités juives du Maroc n’avaient pas de trace d’Omar. Il était
difficile de retrouver sa judéité, car le nom des juifs n’ont été donnés qu’à
partir de Napoléon premier. Les rabbins n’avaient rien dans leurs livres.
C’était une course difficile pour retrouver Omar surtout s’il n’était pas
d’origine hébraïque. Il sacrifiait sans vergogne les vies qui l’accompagnaient.
C’était un tueur par intermédiaire. A Kénitra, il s’était entouré de quatre
malfrats, ils devaient faire sauter le port avec le plus d’éclats possible. Ils
avaient déposé les pains de plastique dans plusieurs endroits différents du
port avec un détonateur réglé à la même heure. Il avait prévenu la presse qu’il
y aurait un feu d’artifice à seize heures qu’il avait signé la République Wahhabite
du Maroc. La police, la gendarmerie nationale, l’armée étaient là, tous les
ouvriers avaient été déplacés. A seize heures, une terrible explosion retentit
aux quatre coins du port détruisant les structures métalliques, grues,
matériels de levages et le petit cargo qui faisaient le trafic entre les ports
côtiers du Maroc. Un malfrat était blessé par l’explosion, il avait commis une
erreur d’appréciation, les trois autres et Omar avaient disparu bien avant
l’explosion commandée par un téléphone relativement loin du port. Seul l’un des
leurs par curiosité morbide était resté. L’interrogatoire du blessé n’avait
rien donné, comme d’habitude ils avaient été contactés et payés, ils ne
savaient rien d’Omar. Ils avaient fait le travail qu’on leur avait commandé,
point à la ligne. Sa blessure n’étant pas grave, il rejoignit la prison de Salé
menotté et accompagné par deux gendarmes. Omar devait être loin, sa dernière
mission avait été spectaculaire, mais cela s’éternisait. Le Roi, le Parlement
demandait des comptes à la police qui n’arrivait pas à le loger, la Boutique
attendait le moment où il serait capturé, Omar était un pro de la
dissimulation. Zohra était confiante, la mafia juive était puissante, il
fallait attendre !
Saïd El Idrisy avait décidé de
s’attaquer à Elie. Il observait depuis des semaines ses déplacements. Une
voiture en protection devant, sa voiture ensuite et une autre derrière la
sienne. C’était le système de défense américain des gros caïds de la pègre de San
Francisco. Le ciel était bleu, il faisait bon avec une brise bienfaisante et
pourtant le chaos se déchaîna, la bande à Said avec des armes de guerre, des
lances -grenades MK 19 de quarante millimètres de l’armée américaine. Installés
dans l’entrée de l’immeuble face au restaurant d’Eli, ils ouvrirent la porte de
l’immeuble quand Eli et ses hommes furent montés dans les automobiles. Ils
explosèrent les trois véhicules en quelques secondes. C’était la guerre, SAÏD
n’y avait pas été de mains mortes ! Rapidement ils mirent le MK19 dans la
voiture, démarrèrent et disparurent de la circulation.
La disparition d’Elie était un
coup dur pour l’Israéli Connection. La guerre avait pris une autre dimension,
terminé les tueurs à la sauvette, les pistoléros de quartiers, les traquenards
de papa, l’on était plus au temps de la lampe à pétrole, les meurtres se
réfléchissaient longuement à l’avance, tout était mis à niveau avant de passer
à l’action. Avant il suffisait de sortir son arme, de tirer et de foutre le
camp, aujourd’hui c’est toute une réflexion, repérage des lieux, armement,
possibilité de fuite. Said avait organisé un gros coup, personne avant lui
n’avait utilisé des armes de guerre de ce calibre. Il savait qu’il risquait des
représailles à la hauteur de son attaque contre Elie. L’Israeli Connection
réunit ses principaux collaborateurs au Maroc pour élire le nouveau patron de
la mafia israélienne au Maroc. Après plusieurs tours de table, Abbas Gotmann
fut élu en remplacement d’Elie. Abbas avait la réputation d’être un type
coriace, volontaire, intelligent, retord, prêt à venger Elie. Zohra le contacta
rapidement et lui demanda si l’accord passé avec Elie tenait toujours ? Un
accord est un accord, dit-il, Inch Allah Imurmura Zohra ! Elle était
persuadée que l’Israéli Connection mettrait la main sur Omar.
Omar une nouvelle fois avait
fait parler de lui à l’université de droit de Rabat. Il avait loué une mini
grue qui afficha sur le fronton de l’université en pleine nuit le drapeau de la
République Wahhabite du Maroc, aussitôt détachée par les pompiers, mais la
presse avait été avisée et en faisait ses choux gras ! Omar avait bien
entendu disparu. Abbas ne savait pas qui avait commis cet attentat contre Elie
et son équipe, il devait se méfier doublement, celui qui avait couché Elie
était un malin. Si Abbas ne connaissait pas Said, il en était de même pour Said,
il ne connaissait pas le remplaçant d’Elie ni son quartier général, en fait ils
s’étaient réinstallés au restaurant Mathal Almanzil. Abbas organisa la défense
du restaurant. Il fit construire devant l’entrée un sas en béton avec de
grandes vitres résistantes aux chocs, deux hommes lourdement armés étaient en
permanence dans le sas avec un changement toutes les quatre heures. L’intérieur
avait été également modifié, les piliers avaient été remplacés par des poutres
au plafond qui soutenaient l’édifice pour une meilleure visibilité. Le bar
tenait toute la place sur l’arrière de la salle, laissant une grande porte à
battants ouverte sur la cuisine. Les serveurs, les hommes du bar, les hommes du
sas étaient armés, de même en cuisine. Une véritable armée tenait lieu
d’employé. Une porte avait été ouverte dans la cuisine sur l’extérieur, une
ruelle qui donnait sur la place où se garaient les automobiles. Le premier
étage au-dessus du restaurant avait été acquis donnant accès à une visibilité
accrue et à une plage de tirs en cas d’attaque. Au menu, les incontournables Falafels,
boulettes de fèves et de pois chiches hachées grossièrement mélangées aux
épices, persils, coriande, cumin, frites dans l’huile, faisaient le bonheur des
gourmets avec le vin rosé d’Israel. Abbas était satisfait, il avait rénové
l’établissement enrichi d’un premier étage à l’air de tour de contrôle. Deux de
ses hommes tournaient depuis la disparition d’Elie dans toute la ville pour
découvrir où se trouvaient les assassins, pour le moment en vain. Said avait
remarqué les transformations que subissait l’établissement. Il avait remarqué
la porte ouverte derrière sur la cuisine. Une heure du matin, le restaurant
venait de fermer. Le lance- grenades installé dans la ruelle avait craché son
feu, la porte déchiquetée ainsi qu’une partie du mur avait sautée, une dizaine
d’hommes de Said entrèrent en courant dans le restaurant, objectifs, détruire,
ils y réussirent, les hommes d’Abbas retranchés dans la grande salle ne pouvaient
pas grand-chose contre le MK19 à bande. Quand toute la salle fut ravagée, la
bande à Said disparut sans laisser de traces. Aucun blessé, c’était encore une
réussite, mais du côté d’ABBAS quatre mort et autant de blessés ! Abbas ne
décolérait pas, tout ce travail pour rien. La politique de Said, c’était la
mouche du coche pour l’obliger à sortir de son antre. Un minable voleur, drogué
fournit enfin une information intéressante le caïd se nommait Saïd El Idrisy,
il logeait dans une petite maison isolée sur la route qui menait à l’autoroute.
Quatre automobiles stationnèrent devant la maison. Said demanda que l’on sorte
la mitrailleuse. Les hommes d’Abbas donnèrent l’assaut, ils furent stoppés net
par les tirs de mitrailleuse, onze morts dont Abbas et blessés. Said ne perdit
pas de temps, tout l’armement fut enlogé dans une voiture et la bande disparut.
Abbas était tombé dans le piège, en pensant que le nombre primerait sur le
choix des armes, c’était une erreur, il l’avait payé de sa vie. Zohra
commençait à douter de l’efficacité des hommes de l’Israeli Connection.
Omar avait trouvé une nouvelle
trouvaille, il avait payé le capitaine d’un caboteur pour afficher le drapeau
de la République Wahhabite du Maroc en haut du mât, qui naviguait ainsi de Rabat
à Nador. Le drapeau fut arraché par un patrouilleur de la marine nationale, le
caboteur mis à l’arrêt sur le port de Saidia, le capitaine mis en prison en
attendant son procès. Omar était toujours introuvable, l’invisibilité faite
homme. Il trouvait à chaque fois une formule médiatique qui mettait à mal
l’autorité marocaine. N’ayant plus la troupe importante qu’il avait au début,
il jouait avec des individus en mal de reconnaissance, c’est ainsi qu’à Imzouren,
Omar lance l’idée chez un épicier d’emballer les marchandises avec du papier
imprimé aux couleurs de la République wahhabite du Maroc. Ce fut une belle
pagaille, la police investissant brutalement la boutique, repoussant la
clientèle au fond de l’établissement, saisie du papier incriminé et saisie
immédiate de l’épicier avec comparution immédiate au tribunal pour crime contre
le Roi et l’Etat du Maroc et apologie d’une religion non reconnue par l’Etat du
Maroc. Zohra chercha dans toutes fabriques de drapeaux du pays, il y en avait
une qui avait fabriqué ou qui fabriquait ces drapeaux de la République Wahhabite
du Maroc. A partir de là, Omar devait être retrouvé. l’Israéli Connection avait
fort à faire en ce moment, se réorganiser à nouvelle fois, trouver ceux qui
avaient commis cet attentat et se venger brutalement pour affirmer leur
supériorité. Zohra trouva dans le Bottin des entreprises, trente-trois
fabriques et quatre-vingt-quatre points de vente de drapeaux et banderoles sur
le territoire du Maroc. Ce n’était pas gagné ! Zohra décida de déléguer les recherches à la
mafia juive mais aussi à la mafia marocaine. Dans sa position d’attente, elle
jouait avec tous les participants sans état d’âme. Omar avait plus d’un tour dans son sac,
plusieurs loustics avaient accroché des banderoles de la République Wahhabite
du Maroc sur les façades des
supers-marchés de Fes, qui furent enlevées rapidement par les pompiers, mais le
mal était fait, les loustics ne furent pas retrouvés. OMAR triomphait pour le
moment. Said avait rejoint son point de repli, un bâtiment en béton qu’il avait
récupéré à peu de frais, il y avait déjà pas mal de temps. Ancien entrepôt de
pneus usagés, il avait dès son arrivée protégé les accès, les armes lourdes
qu’il possédait lui donnaient l’avantage sur les assaillants potentiels. Depuis
quelques années il s’était mis en tête de se doter d’un armement acheté aux
tribus maliennes de renégats. Il était devenu au fil des années le caïd de la
mafia marocaine. Pour le moment personne ne connaissait son nouveau quartier
général. Il avait affaibli considérablement la mafia juive, mais il savait
qu’elle était capable de se redresser rapidement et de redevenir dangereuse, il
se tenait sur ses gardes. Il connaissait ses petits soldats camouflés en
restaurateurs, vendeurs de bijoux, il frapperait petit, mais il décimerait la
troupe. Au Jérusalem, le restaurant était petit, mais accueillait une clientèle
fidèle. Abarbanel Benguigui avait une
corpulence complice ave l’obésité, toujours le sourire, mais derrière le
retroussement des lèvres une complicité sans faille avec l’Israéli Connection.
Toujours soigné, chemise blanche, gilet noir, nœud papillon noir, pantalon noir
et chaussures vernies, portant toujours la yarmoulke, la kippa sur sa tête
rasée. Dans son large pantalon, un Beretta logeait dans sa poche en permanence.
Youssouf se présenta pour dîner, il avait vécu en Israel plusieurs années, pour
y travailler, il parlait l’hébreu parfaitement et sans accent. Il commanda des
Böreks, pâte garnie d’épinards avec du fromage et du caviar d’aubergine et pour
faire local un verre de rosé d’Iserla. Il s’attarda à table, fuma une cigarette
et demanda l’addition, Abarbanel s’approcha, Youssouf sorti un Luger de sa
poche et tira à bout portant sur Abarbanel qui s’effondra sur le carrelage du
restaurant devant les consommateurs apeurés. Youssouf sortit tranquillement,
héla un taxi et disparut de la circulation. Samuel Bitoun, tenait une
bijouterie en face de la gare ONCF de Rabat, portant comme Abarbanel la kippa
sur la tête, il était toujours habillé d’un tablier noir avec une poche sur le
devant, logement du pistolet de défense au cas où ? Youssouf était l’homme
de main de Said, efficace, prompt à l’attaque comme la vipère des sables du Sahel.
Il passa devant la boutique et repassa plusieurs fois, s’arrêta comme s’il
était intéressé par un bijou. Il finit par entrer le Luger à la main, avant que
Samuel réagisse, il était déjà mort allongé sur le sol de sa boutique. Il
sortit, prit un taxi et disparut comme d’habitude dans la nature. Said savait
que les Juifs allaient s’organiser, qu’il faudrait changer de méthode. La
réplique ne se fit pas attendre. Marrakech, la ville de tous les vices, quatre
loustics incriminés dans la prostitution ont été retrouvés dans les rues, le
corps troué par des balles de forts calibres. Un vendeur de drogues à Rabat
subit le même sort. C’était dans l’ordre des choses. De l’autre côté, l’on
s’activait à la préparation d’un gros coup. Said avait repéré une banque à Sidi
Yahya El Gharb, en plein centre-ville, relativement loin de la gendarmerie. Son
plan était relativement simple, bloquer la gendarmerie pour éviter leur sortie,
ensuite ouvrir la banque avec une lance grenades, ceci fait, piller le coffre
et le distributeur, en pleine nuit cela devrait être facile ? Il ne mit
pas son projet à l’état de réalisation, une autre idée était apparue suite à un
renseignement d’un complice. Il devait y réfléchir, il fallait surtout éviter
une mort d’hommes. Le fourgon de convoyage de fonds partait à quatre heures du
matin pour prendre l’argent nécessaire aux banques de la région au centre régional
des fonds. Il commençait sa tournée à sept heures du matin par les banques de Rabat.
Le fourgon avait trois hommes armés à l’intérieur du véhicule, dont le
chauffeur. L’agression se terminerait dans un bain de sang, les convoyeurs
n’hésiteraient pas à faire feu. L’attaque devait se faire en douceur, sans
violence, mais comment ? Sed quod est questio, mais c’était la
question ? Said prit le temps de réfléchir, cette histoire rapporterait
gros, mais les risques étaient énormes. Said se rappela les attaques de
camping-cars avec des gaz soporifiques qui avaient fait la une des informations
des journaux et des radios marocaines. Voilà, se dit-il, la solution est
trouvée. Il fallait trouver le gaz, la police utilisait ce gaz lors
d’interventions majeures, prises d’otages, tentatives de suicide. Les voyous
ont toujours des amis dans la police. Mohamed avait un cousin au peloton de la
police spéciale, il obtint un litre de gaz. Il acheta un vaporisateur qu’il
remplit de gaz, tout était prêt. Ils arrivèrent à cinq à sept heures devant la
banque centrale, au moment où le convoyeur ouvrit la porte du fourgon pour
monter rejoindre ses collègues, Mohamed envoya la totalité du vaporisateur à
l’intérieur du fourgon. Il referma très vite la porte pour que le gaz fasse effet.
En cinq minutes seulement, les convoyeurs étaient endormis et sans violence. Mohamed
se mit au volant et prit la direction du quartier général. Les cinq hommes de Said
se dépêchèrent de transférer les fonds dans le QG, puis suivis par une
automobile de la bande à Said, Mohamed conduisit le fourgon sur l’autoroute de
Tanger. Il abandonna le fourgon, sauta dans leur véhicule et disparu en
direction de Kénitra, là il reprit la route du QG. Said se frotta les mains,
une belle opération, sans effusion de sang avec des millions et des millions de
dirhams à se mettre sous les dents. Cette attaque eut une grande répercussion
sur tout le Maroc, sur la détermination des voyous sans effusion de sang et la
perte pour les banques d’un pactole difficile à rembourser par les assurances.
Elle hissa encore plus haut Said sur son piédestal.
Omar s’était fait plus discret, il n’avait pas
fait parler de lui depuis plus d’un mois, serait-ce que le filet se resserrant
autour de lui et que malin comme il l’était, il restait assis comme l’oiseau sur
sa branche. l’Israéli Connection avait un nouveau patron au Maroc, Abergel
Cadosh, celui qui avait commandé les représailles de Marrakech. Il répliquait
coup pour coup à Said qu’il ne connaissait pas, mais qu’il reconnaissait comme
un adversaire redoutable. Il saluait le coup de poker de Said dans le vol du
fourgon, il lui reconnaissait du génie. Peut-être une piste sur une fabrique de
banderoles et drapeaux à Fes, Omar avait commandé cent drapeaux de la
République Wahhabite du Maroc, le patron de la fabrique était un juif du nom
d’Abécassis Bamberger qui avait prévenu immédiatement l’organisation, mais pas
d’Omar à la réception, seul un gamin chargé d’amené les drapeaux à la gare ONCF
et de donner le colis au contrôleur. Avant d’arriver à Sidi Kacem, le colis
avait disparu, jeté par la porte à l’extérieur du train par le contrôleur payé
pour cela où l’attendait Omar. C’était toute une organisation à base de
bakchich, d’enfants et de clochards. L’on avait perdu à nouveau OMAR. Renouer
le fil serait difficile, qu’Allah nous aide ! Abergel et son équipe avaient
repéré une bande de voyous à la petite semaine, vols, exactions, prostitution
clandestine à Salé. Ils se réunissaient au café de l’Espagne dans la Médina
tous les soirs. Attablés sur la terrasse devant le thé brûlant à la menthe, ils
discutaient de leur journée. Un coup de frein brutal, puis la mitraille jaillit
par les portières et fenêtres de l’automobile, les voyous s’effondrèrent en
emportant dans leur chute leur chaise sur le trottoir. C’était du menu fretin,
mais c’était des éléments du caïd. Abergel se félicitait de faire tomber ainsi
des soldats d’en face. Ni l’Israéli Connection, ni Said ne connaissaient leur
repaire de leur adversaire malgré un repérage minutieux. Un grand commerce de
vêtements hommes et femmes à Kénitra était tenu par Abensur Bounchwig religieux
pratiquant, portant sur la tête une kippa blanche. C’était un homme bon et
honnête. Rondouillard, il portait une veste ouverte sur le ventre, laissant
apercevoir une chemise toujours blanche sur un ventre arrondi. Ce jour-là, Youssouf
entra dans la boutique, demanda à voir une veste, Abensur lui tournant le dos,
il lui tira une balle dans la tête. Cette guerre était improductive pour les
uns et pour les autres, ces meurtres n’apportaient rien aux mafias concernées.
Les recherches sur Omar continuaient sans résultat pour le moment, il y avait
eu une trace à Fes et puis, puiff disparu. Il réapparut à Sidi Kacem pour la
fête de la cité. Le défilé empruntait la route principale, celle qui longeait
la mairie, la gendarmerie, le centre commercial, au moment où il arrivait
devant la mairie, un camion s’infiltra dans le cortège avec le drapeau de la
République Wahhabite du Maroc. Stupeur dans la foule, le Maire avec le
commandant de gendarmerie qui assistaient au défilé, s’étranglèrent et
faillirent s’étouffer devant cette provocation. Le camion s’était arrêté au
milieu du défilé empêchant le cortège d’aller plus loin et le chauffeur avait
rapidement disparu. Le drapeau arraché du pare-brise, un chauffeur anonyme
rangea le camion volé sur le chantier voisin. Un matin, Tanger se réveilla avec
toutes les antennes de la ville et ses alentours réhaussés du drapeau de
la République factice. Les pompiers travaillèrent toute la matinée à décrocher
ces emblèmes provocateurs. La police n’arrivait plus à résoudre toutes ces
affaires, contestation de la royauté et de son régime ainsi que sa religion
partagée par l’immense majorité des Marocains, meurtres réitérés de commerçants
de religion juive, meurtres de voyous marocains dans tout le pays. C’était
comme une pandémie, un virus qui s’était développé dans tout le Maroc ! La
police n’ignorait pas que les mafias jouaient un rôle important dans ces
crimes, mais les assassinats successifs des chefs de l’Israéli Connection et de
la mafia marocaine ressemblaient à un jeu d’échecs. La police savait que Saïd
El Idrisy était devenu le caïd de la mafia marocaine, entouré en permanence
d’une vingtaine de pistoléros de la pire espèce avec un armement à résister à
un siège de longue durée. Elle connaissait également le curriculum vitaé de Bamberger.
Nettoyeur des zones des colonies, des empêcheurs de s’installer sur de
nouvelles terres en Israel, liquidateur de trafiquants et proxénètes au Liban,
bras droits du chef de l’israéli Connection en Tunisie et patron de la mafia
israélienne au Maroc. C’était un tueur au sang-froid tout comme Youssouf, aucun
état d’âme, mais avec une qualité supérieure d’organisation et de constance
dans ses actions. Il installa son quartier général dans un bar de Kénitra, A Maghrib,
Le Maghreb, petit café niché près du centre commercial sur une grande place
pour les automobiles. Abecassis pouvait voir tout ce qui se passait à
l’extérieur, personne ne pouvait le surprendre. Les armes étaient fixées par du
ruban adhésif sous le plateau des tables. Un fusil d’assaut et une Kalachnikov
étaient placés sous le comptoir. En été
des tables étaient placées sous des parasols sur la terrasse. Deux soldats
étaient toujours attablés, armés d’armes de poing. Le meurtre d’Abensur avait
mis en rage Abecassis, il s’était promis de le venger, fallait-il encore qu’il
connaisse le quartier général de Said et ce n’était pas le cas. Ces meurtres de
commerçants juifs inoffensifs pour la plupart étaient ressentis comme une haine
contre les juifs, le judaïsme. Le rabbin Aaron Traupmann appelait la colère de
Dieu sur les assassins de ces commerçants et menaçait le Maroc des foudres de
l’Enfer. Il appelait les juifs marocains à se lever et à manifester par
milliers contre une religion qui n’était pas venue de Dieu, mais du Diable, de
condamner en bloc les musulmans. La riposte ne se fit pas attendre. Youssouf
passa devant la synagogue, entra et calmement alla jusqu’à Aaron Traupmann, il
le fusilla à bout portant, il s’effondra de tout son long sur le carrelage de
la synagogue. Personne ne lui barra le chemin, une fois dehors, il prit un taxi
et disparu. C’était une fois de trop, leur grand rabbin disparut, toute la
communauté israélite tomba dans la douleur avec la volonté de venger très vite
Aaron. Le vendredi suivant, le jour de
la grande prière à la mosquée L’imam officiait dans le silence des croyants. Il
récitait un verset du coran quand quatre individus entrèrent brutalement dans
la mosquée, certains essayèrent de les arrêter, ils furent tués avec Yassine Belkrouch
l’iman de la mosquée. Cette guerre finira par un bain de sang, les autorités se
décidèrent de protéger les mosquées, les églises et les synagogues ainsi que
les prêtres, les imans et les rabbins. Cela ne pouvait pas durer ainsi, le Maroc
était une terre d’accueil, de refuge, ces massacres risquaient de s’étendre à
la population tout entière. Omar jouait avec le feu, il se déplaçait beaucoup
pour que l’on ne puisse le localiser. Il se trouvait momentanément, à Essaouira,
son idée était de doter tous les bateaux de plaisance du drapeau de la
République Wahhabite du Maroc. Il se rapprocha des enfants qui dormaient la
nuit sur le port avec un bakchich, ils acceptèrent de monter sur les bateaux la
nuit et d’afficher le drapeau, il y avait une centaine de bateaux. Le matin,
consternation des propriétaires de bateaux, consternation des autorités
portuaires, consternation de la police. Il a fallu toute la matinée pour que
les drapeaux disparaissent.
Zohra
reçut un message d’Idriss, cela faisait plus de deux années qu’elle n’avait pas
reçu de nouvelle de lui. Ils se rencontrèrent au café espagnol de Salé. Il
était revêtu de son uniforme de parachutiste. Mon capitaine, lui dit-il, je
suis toujours intéressé par l’idée de travailler avec vous. Je me suis conformé
aux désirs du colonel, j’ai changé de corps d’armée, de l’infanterie, je suis
passé par les parachutistes, vous connaissez le processus, l’on m’a envoyé au Sahel
combattre les tribus rebelles du Mali, j’ai eu l’occasion de sauter quatre
fois. A mon retour j’ai demandé à participer au stage de commandos
parachutistes et voilà mon parcours mon capitaine. Vous savez bien Idriss que
je ne suis pas celle qui peut vous engager, seul le colonel a cette possibilité.
Je vais lui en parler, laissez-moi votre numéro de téléphone pour vous
rappeler. A la Boutique Zohra indiqua au colonel avoir parlé avec Idriss
toujours motivé pour intégrer le groupe. Capitaine, je le suis depuis son
engagement dans les parachutistes, il est motivé, opiniâtre, il a fait un
parcours sans faute, il est digne de nous rejoindre, allez le chercher dans son
régiment, je donne des consignes pour sa sortie. Elle prit une Jeep et se
rendit chez les parachutistes de Salé en grand uniforme. A son arrivée elle fut
saluée par les gardes et les hommes de troupe jusqu’au commandement. Là, le
colonel Ibrahim Elfadili reçut Zohra, il la fit asseoir et lui dit sans
préambule, vous nous enlevez Idriss, dans quel service sera-t-il affecté ?
Mon colonel, répondit Zohra avec son plus beau sourire mensonger, je n’en sais
pas plus que vous, ma hiérarchie décide de tout et vous savez bien que nous
sommes laissés à l’écart ! Elle se leva, suivie le colonel qui fit appeler
Idriss devant le poste de commandement. Vous nous quittez Adjudant, je vous
regretterai, je vous souhaite bonne chance dans votre nouveau corps. Au revoir,
mon colonel, je vous remercie.
-Où m’emmenez-vous ?
-Dans votre nouveau quartier général
-C'est-à-dire ?
-Là où vous souhaitiez vous rendre depuis
des années.
La Jeep traversa Salé puis Sidi Bouknadel,
Kénitra, Sidi Yahya en direction de Sidi Slimane, Idriss se taisait, impatient
d’arriver à destination. La Jeep tourna dans un chemin empierré et roula
pendant deux kilomètres jusqu’à des murs hauts, une bâtisse surplombant les
murs et un château d’eau de vingt mètres de haut dans l’enceinte de la
propriété. La Jeep arrivée devant la porte, celle-ci s’ouvrit automatiquement,
la Jeep stationna devant le bâtiment. Le colonel était là debout,
-Bienvenue à la Boutique adjudant Idriss.
Je suis content de vous revoir. Vous avez décidé de vous joindre à nous ?
-Mon colonel cela fait plus de deux années
que je travaille pour cela
-Je sais Adjudant je vous suis depuis votre
changement de corps.
-Vous avez juré sur le coran que rien de ce
qui se passerait ici ne serait divulgué
-Oui mon colonel, je tiendrais parole
-Bien, à partir d’aujourd’hui vous faites
partie de la Boutique pas comme agent, mais comme accompagnateur, c’est un mot
qui me plait bien. Vous devrez obéir, à votre agent, le protéger, accomplir ce
qu’il vous demandera de faire. Notre travail est difficile, il s’agit d’effacer
des rangs de la population tous ceux qui se mettent en travers de la route du
Roi et du gouvernement de notre pays. Il vous faudra trahir, tuer pour notre
pays, acceptez-vous cette tâche difficile et ingrate ?
-Je ne me renie pas mon colonel
-Très bien vous aurez à travailler avec des
agents différents, à aucun moment vous ne devrez dévoiler l’identité de cet
agent.
-C’est entendu mon colonel.
Un employé de la boutique lui montra sa
chambrée qu’il partagera avec cinq autres accompagnateurs. C’est un métier où
le silence est d’or.
Omar
continuait ses provocations, la dernière, a créé des troubles importants au
mausolée de Sidi Bouknadel d’Agadir, celui qui par le passé a combattu les
portugais, en nappant le mausolée de banderoles de la République Wahhabite du
Maroc, la population d’Agadir se mobilisa et défila devant le mausolée pour
crier son indignation. Malgré les photographies et son réseau, l’Israéli
Connection, ne parvenait pas à loger Omar, la mafia juive piétinait, ce qui
n’était pas du goût du patron. Avec des centaines
de photographies, des sbires de l’Israéli Connection sur tout le territoire et
l’incapacité de coincer Omar, cela confinait au ridicule. De plus, Said
harcelait la mafia juive, éliminant des soldats, des hommes importants du
cartel, commerçants, artisans même des chefs d’entreprises réputés. Noha Bensoussan
mariait sa fille Ilana, fille du directeur de la banque du Maghreb à Aaron Benkémoun.
Noha était le directeur de l’entreprise électrique Kahraba’ Eamat Lilgharb, la Générale,
Electrique du Gharb, deux grosses pointures de la finance marocaine, qui
finançait l’Israéli Connection avec qui ils avaient des contacts pour
différentes affaires dans des transactions difficiles. La mafia juive était de
toutes les combines financières au plus haut niveau. Cette union scellait un
pacte entre deux grosses entreprises, la banque récupérait l’entreprise
électrique parmi sa clientèle. C’était un partenariat qui valait des millions
de dirhams. Said avait décidé de frapper fort mais il ne voulait pas de retombées
collatérales, juste les parents des mariés. C’était impossible dans la
synagogue, il fallait attendre la sortie des mariés. Les mariés sortirent en
premier, suivis par les familles, Youssouf avec un appareil photographique
autour du cou faisait un journaliste parfaitement crédible. Au moment où les
familles montèrent dans les voitures, Youssouf abattit le banquier et très vite
l’électricien, une voiture arriva en trombe et s’arrêta devant Youssouf qui
s’infiltra rapidement à l’intérieur. L’automobile disparut aussi vite qu’elle
était arrivée. Le mariage de Illana et Aaron a bien eu lieu, mais le contrat
liant les deux grosses entreprises était repoussé aux calendres grecques. Said
avait réussi son coup, l’union sacrée de deux grosses entreprises juives n’aura
pas lieu. Toutes ces attaques étaient teintées de racisme et d’intolérance,
mais surtout avec l’idée de s’accaparer de l’entreprise d’électricité, place au
jeu financier. Rentrer dans le capital de la Générale Electrique du Gharb était
plus difficile que la suppression des capitalistes. Un homme de paille acheta
pour deux pour cent des actions à la bourse pour commencer, ensuite par le jeu
d’intimidations, il racheta cinq pour cent d’actions au prix du marché à un
actionnaire. De ce fait avec sept pour cent d’actions, il entrait au Conseil
d’Administration comme actionnaire minoritaire. En deux années, il était à la
tête de quarante- quatre pour cent des actions de l’entreprise, actionnaire
majoritaire, remettant du même coup l’entreprise à la mafia marocaine. Aaron
était pilote de ligne sur Air Arabia, il n’entendait pas abandonner son métier
pour se consacrer à la finance. Il décida de vendre ses parts comme actionnaire
de la Générale Electrique du Gharb, il souhaitait céder ses parts à la banque
du Maghreb, dont son épouse détenait la majorité des actions. Aaron détenait trente-six
pour cent des actions de la Générale Electrique du Gharb. Ceci dit, l’actionnaire
majoritaire se prononça contre la vente à la banque du Maghreb, souhaitant que
les parts d’Aaron soient revendues au sein de la société. Cette affaire traîna
des mois, puis Aaron consentit à la vente de ses actions aux actionnaires de la
société. Ce fut une bonne affaire, les actions montèrent à un plafond rarement
atteint et la mafia marocaine se trouvait confortée dans ses objectifs
financiers. Elle avait effectué plusieurs opérations de ce type dans plusieurs
villes du Maroc acquérant ainsi un patrimoine industriel et immobilier colossal,
sans que la police financière puisse y trouver à redire !
Omar notre triste bonhomme
continuait ses fantaisies, à Safi Il arriva à convaincre des clochards contre
des bakchichs d’orner les façades du château de drapeaux de la République Wahhbite
du Maroc. En pleine nuit, ils s’activèrent pour exécuter ce travail sans se
faire prendre par la police, tous n’ont pas eu cette chance. Ils ont été jugés
en procédure immédiate le lendemain matin, récoltant dix années de prison sans
réduction de peine. La population de Safi manifesta violemment le lendemain
matin de cette violation caractérisée contre la monarchie et la religion
officielle. Omar avait encore gagné un round contre le régime. Il avait échoué
à embrigader les berbères du RIF, il avait abandonné la région. Il avait une
autre idée, celle d’attacher une banderole à la queue d’un avion de tourisme, Zohra
ne comprenait pas comment tous ces gens se laissaient manipuler et risquaient
gros. Sur l’aérodrome de Tarfaya ancien aérodrome de l’aéropostale, il trouva
un pilote disposé à voler avec l’emblème de la République Wahhabite du Maroc
attaché à la carlingue. C’était un casse-cou, l’aventure l’amusait, voler avec
une banderole interdite. Il savait qu’il serait arrêté dès son atterrissage. Il
aurait une histoire à raconter, pensait- il ! Il se plaça en bout de
piste, accrocha la banderole et décolla sur cinq cents mètres, la banderole se
lisait très bien du sol, il fit des allers-retours au-dessus de Tarfaya, il
atterrit par manque de carburant. A peine sorti de sa carlingue, la police lui
passa les menottes et l’incarcéra immédiatement, la banderole fut brûlée. Au
procès il ne sut que dire que cela lui avait plu de braver les autorités pour
rien. Le bougre écopa de dix années de détention sans possibilité de réduction
de peine. Ainsi agissait Omar, il se dissimulait derrière les autres. Il avait
des idées plein la tête. Il profita de la fête du village de Souk E Arbaa du Gharb
pour faire accrocher des banderoles avec les banderoles du village par des
ouvriers analphabètes. Quand le Maire, la population, la gendarmerie
s’aperçurent de la situation, il était trop tard. Les pompiers enlevèrent en
urgence ces banderoles de la République Wahhabite du Maroc et les brûlèrent sur
la place publique. Il avait le diable dans la peau, rien ne l’arrêtait. A Sidi Yahya petite ville du Gharb en pleine
expansion, cinq ou six immeubles en construction montaient rapidement vers leur
finition. Omar soudoya des ouvriers du bâtiment pour accrocher des banderoles
de la République Wahhbite du Maroc, les ouvriers, ont été pris à partie le
lendemain matin, la gendarmerie a dû intervenir sous les insultes et les jets
de pierres de la population.
L’Israeli
recherchait toujours Omar, pourtant les photographies d’Omar circulaient dans
tout le Maroc, mais il était toujours invisible. Leur crédibilité en prenait un
coup, même Zohra, commençait à douter. Il fallait le retrouver, sa Majesté le
Roi, le Gouvernement ne pouvait plus tolérer les exactions de cet individu. En
attendant, la mafia juive liquidait les petits trafiquants, soldats implicites
de Said. Celui-ci s’était impliqué dans les magouilles financières qui
rapportaient gros. La dernière affaire était le rachat d’une petite banque
régionale, Bank Wadayle Gharb, Banque de Dépots du Gharb devenue le coffre-fort
de la mafia marocaine. Toutes les sociétés ayant un lien avec la mafia
marocaine transférèrent leurs fonds à la Banque de Dépots du Gharb, devenue en
quelques années un géant bancaire régional. Said maîtrisait parfaitement son
sujet. Il était entré par la grande porte dans Avia Moroco, une compagnie
d’aviation régionale, transportant les passagers d’un point à un autre du Maroc.
Il espérait en prendre le contrôle dans quelques années ? Sa reconversion
était spectaculaire, même s’il devait de temps en temps rappeler qui il était
par des méthodes périmées ! Il avait tissé une toile qui couvrait tout le
Maroc, se heurtant souvent à l’Israéli Connection, par manque de place. Des
accords avaient eu lieu sur certains points avec la mafia juive, pragmatique en
particulier sur les impôts des restaurateurs et hôteliers et les points de
vente du cannabis. La guerre s’était arrêtée pour faire place aux discussions,
aux accords, chacun à sa place, chacun était content et y trouvait son compte.
Les conflits étaient résolus par les hommes désignés par les caïds. Cela
convenait aux deux parties, mais n’exonérait pas le doute d’une arnaque
toujours possible de l’une ou l’autre des parties. Elles avaient réussi à
s’entendre sur le marché de prolongement de quarante kilomètres de l’autoroute.
Les entreprises payaient une dîme aux deux mafias, elles les avaient aidées à
obtenir les contrats, elles en attendaient un retour lucratif. Elles
discutaient point par point en ce moment sur le prolongement du réseau du
tramway. Les entreprises ne voulant pas se coucher. Après des mois de tergiversations,
il fallait revenir au bon vieux temps. Albert Sucasse le patron de l’entreprise
française La Générale du Rail qui devait assurer le prolongement de la ligne du
tramway, a été retrouvé dans son appartement cloué au lit par une balle dans la
tête. Curieusement, la situation s’éclaircit rapidement pour arriver à un
accord longtemps souhaité. Ce n’étaient pas les seuls accords qu’Isréli
Connection et la mafia marocaine avaient conclus entre elles. L’agrandissement
du port de Nador a donné lieu à de profitables accords de partenariats sur les
bétons. Les éoliennes maritimes au large des côtes du Sahel, transportées par
des cargos adaptés appartenant à l’Isréli Connection, les ouvriers du montage
de l’infrastructure appartenant à l’entreprise Alhadid Waliarkib, Fer et Montage
dont le patron était l’un membres de la mafia marocaine. Tout se connectait
parfaitement avec des rouages bien huilés. La guerre était enterrée sauf sur le
plan financier où les collaborateurs, avocats, comptables des mafias
multipliaient les approches auprès des financiers. Ils étaient là pour financer
un projet et ainsi entrer dans le capital de l’entreprise. Ils avaient le nez
pour déceler l’entreprise qui réservait le plus de fromage. Les soldats étaient
devenus des gardes du corps autour du caïd, mais n’agissaient pratiquement plus
à l’extérieur. Un évènement allait modifier ce schéma. La mafia marseillaise
essayait de s’implanter au Maroc en détruisant les structures existantes des
deux mafias solidaires sur le sol marocain. Elle avait liquidé tout le réseau
de cannabis du RIF en quelques semaines. Les trafiquants avaient été trucidés. Said
était privé de revenus importants, la guerre allait recommencer, il s’agissait
de connaître les auteurs de ces exactions, la suite viendra ensuite. Youssouf
parti en reconnaissance dans le RIF, effectivement tous les hommes de Said
avaient été liquidés et remplacés par des Marseillais. Youssouf rendit compte,
il demanda dix hommes à la gâchette facile. Said lui envoya ces hommes une
semaine plus tard. Il fallait frapper en une seule fois pour reprendre
l’avantage. Youssouf distribua les rôles dans l’oriental. D’Oujda à Nador, les Marseillais
furent abattus par des pistoléros qui retrouvaient leur raison d’être. La
deuxième partie se jouait de Nador, à Septa. Les Marseillais furent cueillis
sans qu’ils puissent répliquer, le nez sur les pavés. Pour la partie
occidentale du RIF, de Larache à Septa ce fut une autre manche, les malfrats Marseillais
s’étaient organisés en commandos dans des postes bien précis difficile
d’attaquer de front sans avoir des dégâts dans la troupe. Said envoya deux
émissaires avec des lance-grenades de quarante millimètres. A Larache, les Marseillais
s’étaient regroupés au Qahwat Almuhit, café de l’Océan. Deux heures du matin,
le café ferma ses portes, les deux lance-grenades en batterie crachèrent leurs
projectiles qui anéantirent le bâtiment et les hommes à l’intérieur. Ils rangèrent
les armes dans leurs véhicules et disparurent sans laisser de traces. Les Marseillais qui avaient subi tant de
pertes avaient pris des précautions à Tanger. Ils ne s’attendaient pas à de
telles réactions des Marocains. Petits truands de la banlieue nord de Mardeille,
tueurs occasionnels pour une poignée de cannabis, ils s’imaginaient en caïd
après leur nettoyage surprise et prises de contrôle du RIF. C’était par trop
facile et surtout sans compter sur une organisation comme la mafia marocaine installée
depuis des lustres au Maroc. Said ne pouvait admettre que ces loustics de bas
étage viennent compromettre les fruits d’un travail patient et générateur de
profits. Il fallut du temps à Youssouf pour dénicher la planque des Marseillais.
Le Shams Tunajatan, le Soleil de Tanger était un rafiot en fin de vie, mais qui
continuait à naviguer pour du petit cabotage, des trafics de drogues et de
cigarettes depuis l’installation des Marseillais dans le RIF. Ancré à l’entrée
du port, un Bombard faisait la navette avec les quais. Youssouf l’avait repéré
ainsi que les vas et viens du bateau en caoutchouc. Il resta pratiquement toute
l’après-midi à la terrasse du café du port à observer le manège des Marseillais.
Ils sortaient l’un après l’autre, jamais tous ensemble, la prudence est mère de
sureté, semblaient-ils se dire. Quatre heures du matin, sur une vedette rapide
arrêtée à cinquante mètres du Soleil de Tange,r Youssouf accompagné de deux
autres hommes de main de Said appuya sur la détente du lance-grenades, Le
Soleil de Tanger, s’enflamma et s’enfonça doucement en se couchant dans l’eau à
la suite d’une large ouverture dans la coque occasionnée par l’arme de Youssouf.
La vedette prit la fuite avant l’arrivée de la police maritime. Il semblerait
qu’il n’y aurait pas de survivants ? Si la presse disait vrai,
effectivement il n’y avait pas de survivants. Toute cette bande était
constituée de maghrébins des cités nord de Marseille, voyous à la petite
semaine, mais extrêmement dangereux, canardant des gamins de quatorze, quinze
ans pour un joint vendu sur un point interdit, prostituant leur sœur et leur
copine dans les caves des immeubles, c’étaient d’ignobles crapules. La disparition
de ces malfrats redonnait de la fraîcheur aux actions de Said. La disparition
de ces canailles n’était pas supportable pour un caïd de la pègre Marseillaise
qui pensait se servir de ces petits voyous comme pions pour prendre le contrôle
du trafic du RIF. C’étaient des amateurs avec des esprits de grandeur
incompatibles avec leur cerveau de porcelet. Ils s’étaient attaqués à un caïd
de la pègre marocaine sans réflexion, sans essayer d’obtenir un accord. Ils
sont arrivés en tiraillant de gauche à droite en liquidant les types en place
et croyant être arrivés à destination ! S’attaquer à la mafia demande de
la réflexion, de la pondération, de l’attention. Omar s’était un moment posé la
question, devait-il s’allier avec ces trublions ? Ils les avaient trouvés
trop tendres pour Said, du poulet de grain, il n’avait rien fait de concret. Il
lui fallait du solide pour continuer sa propagande, pas une bande de garnements
de vingt ans qui seront prochainement fusillés par Youssouf. Il avait vu juste.
A Chefchaouen, il eut l'idée de mettre à
mal la population de la ville bleue et des environs. Il attendit que la ville
s’endormit, puis à l’entrée de la zone commerciale avec ses petites ruelles, il
tendit une banderole de la République Wahhabite du Maroc. Le matin, ce fut la consternation dans la
ville bleue, Chef-Lieu de la province, cette ville aux vingt mosquées de
religion sunnite, ville sainte, s’est sentie salie. La population a bruyamment réagi
contre cette provocation, demandant des comptes au Maire de la ville ainsi qu’aux
gendarmes qui ne pouvaient rien répondre à la colère des habitants. Omar avait
de nouveau parfaitement réussi son coup ! Les Marseillais anéantis, Said
avait repris son territoire. Il avait dans l’idée d’acheter des terres aux
paysans, de leur payer un très bon prix et de planter du cannabis à leur place
pour avoir sa propre production. Il y réussit en partie, les paysans sont très
attachés à leurs terres familiales, c’étaient leurs seuls biens, même payées
bien au-dessus du cours, ils auraient l’impression de trahir la famille et
leurs ancêtres. Said s’établit comme protecteur, car il n’était pas rare que
l’on vienne voler la production de résine. Il n’exigea rien de la part de ces
paysans, mais ceux-ci payaient aux hommes de Said ce qu’ils croyaient
raisonnable, c’était bien comme cela, c’étaient des relations basées sur la
confiance. Il y avait de temps en temps des coups de feu contre des prédateurs
venus de nulle part, voleurs de barrettes ou de feuilles de cannabis. Les
brigades de Said intervenaient rapidement pour nettoyer le secteur. Elles
intervenaient jusque sur les ports côtiers de la Méditerranée pour contrôler le
transport. Là, Zohra intervenait de temps en temps dans les intérêts de Said,
elle voulait le calme tant qu’Omar ne serait pas arrêté et mit hors d’état de
nuire. Si elle n’agissait pratiquement pas, elle surveillait la situation et
tirait la ficelle à certains moments sans que les joueurs du cénacle s’en
aperçoivent. Elle était déçue de l’Isréli Connection, elle avait pensé à une
réussite beaucoup plus rapide dans la capture d’Omar. Il fallait attendre,
celui-ci était très malin, mais il finirait par tomber dans les mailles du
filet de la mafia juive. Celle-ci venait d’acquérir une grosse partie des
vignobles de vins rosés de Sidi Kacem. Les juifs étaient amateurs de vins rosés
bus en dégustant leurs Böreks ou leurs Falavels, ce vin était un excellent
produit d’exportation vers Israel. Ils avaient également investi dans
d’immenses troupeaux de moutons de plusieurs milliers de bêtes dans la région
du Moyen Atlas, ils n’oubliaient pas l’Aïd el Kébir, il y avait une fortune à
faire en cette occasion. Les moutons se vendaient même au Soudan et au Mali,
sans oublier l’Algérie, en clandestinité, les frontières étant fermées depuis
mille neuf cent quatre-vingt-quatorze. Ils
avaient également investi l’une des plus grandes études notariales du Maroc, ‘Ildarat
Altawthiq Bitanaja, Gérance Notariale de Tanger, leur permettant de contrôler
les opérations immobilières à leur profit. La fin de la guerre des clans leur
permettait de s’épanouir chacun de leur côté dans le domaine financier. Elle
eut à répondre à un hobereau régional à Zagora, intéressant pour son marché à
bestiaux. Arif Aït Merchad était le mokkadem de la commune et profitait de sa
situation pour s’enrichir sur le dos de la population et des étrangers. Pour vendre
ses moutons au souk, ARIF réclamait cent dirhams par tête, refusés par Abergel Cadosh
le nouveau patron de l’Isréli connection. La semaine d’après il vint au souk
avec cinquante moutons. Arif survint et réclama cinq mille dirhams à Abergel,
venu en personne. Le regardant bien dans les yeux, il lui dit :
-Tu n’auras rien, tu viens, tu réclames et
tu exiges
-Je vais vous faire expulser
-Par qui, la gendarmerie, pour qu’il soit
au courant de tes magouilles
-Par le personnel de la mairie
-Baraka mokkadem, fous le camp, tu n’auras
rien avec moi
Quelques instants plus tard, une dizaine de
loustics menés par Arif voulaient entreprendre de chasser du souk les hommes d’Abergel.
Ils furent surpris quand tous les hommes de la bande sortirent leurs armes de leurs poches.
-Comment vois-tu la suite mokkadem ?
-Arrêtons là, pas de panique
-Mais c’est toi qui voulais jouer aux gros
bras, je viendrais quand je voudrais sur le souk et je vendrais mes moutons. Tu
vas arrêter de prendre de l’argent aux marchands, si tu continues je te garantis
que tu le regretteras.
-Nem, nem, on arrête tout !
Abergel fit un signe à Noha, quelques
instants plus tard, Arif n’existait plus, allongé sur le pavé dans une ruelle
menant à la mairie. L’affaire de Zagora se terminait bien, mais elle fit grand
bruit, cela commençait à fuiter sur les malversations d’Arif. La police ne fut
pas longue à relier ces extorsions à son assassinat, mais pas le moindre
indice, cela sera encore une fois, une affaire classée. Les mafias ne
supportent pas les interdictions. L’adjoint d’Arif, grand abruti, n’avait pas
compris le message, il voulait continuer le trafic pour son compte. Abdelmalek
Akhrif était un grand gaillard qui pensait mieux s’en tirer qu’Arif, sa bêtise
était aussi grande que sa taille, mais l’argent amène les individus dans des
chemins tortueux. Il reçut une raclée mémorable, il était dans un triste état,
un visage boursouflé, un bras cassé avec deux côtes qui l’empêchait de respirer
normalement. Il n’avait aucun élément à fournir à la police, il n’avait rien
vu, cela avait été si vite. Cet évènement avait eu l’avantage avec la douleur de
lui faire retrouver une juste vision des choses.
Une
bonne nouvelle, Omar avait enfin été repéré à Sidi-Ifni, il fut pris en chasse
immédiatement, Omar était malin, quand il avait l’impression d’être suivi, il
prenait les transports en commun, revenait en arrière, s’arrêtait dans une
station pour la quitter aussitôt. A la descente du train d’Oujda, il fondit sur
le premier et seul taxi disponible, c’était fini, à nouveau Omar avait disparu.
Zohra en voulait à l’Isréli Connection d’avoir fait dans l’amateurisme, qui
n’avait pas pris son rôle au sérieux, elle ne se gêna pas pour le dire à Abergel.
Le pisteur était nul, en plus Abergel n’avait pas couvert ses arrières en
mettant une automobile également sur les traces d’Omar, ce qui aurait évité sa
disparition. Abergel se sentait discrédité dans son rôle de chef, il réunit ses
hommes avec ordre de retrouver Omar et de ne plus le lâcher. Ils retrouvèrent
le chauffeur de taxi qui avait pris Omar, il l’avait amené sur une petite route
de campagne, là une automobile l’avait emporté. La piste s’arrêtait là !
Le chauffeur de taxi se souvenait que c’était une Dacia Laguna rouge, c’était
tout. Le rendez-vous avait été fixé par téléphone. Zohra via le colonel demanda
que l’on retrouve le numéro de téléphone incriminé, le réceptionniste. Il
s’agissait d’Ahmed Ben Oukhri marchand de fruits à la sauvette à Oujda. Il fut
facile à retrouver. L’on avait également le numéro d’Omar mis sous
surveillance. Ahmed ne put rien dire de plus, Omar l’avait appelé, le Bouregreg
coule à Rabat, il lui avait fixé rendez- vous et il l’avait déposé à Oujda à
côté de la grande mosquée. Nouvelle échappée, c’était du grand art, digne de la
prestidigitation. Il aurait été vu une nouvelle fois à la frontière algérienne
pour disparaître à nouveau, dans la fumée de cheminée. Amar Beroud, l’assassin,
déserteur de Darkla avait été remarqué par la gendarmerie de Sidi Kacem, il rôdait
dans les parages, en se faisant tout petit. Omar serait-il à ses côtés ? Ce
serait un fil à tirer. Amar disparaissait à son tour, laissait un grand vide
autour de lui. Il y avait gros à parier qu’ils s’étaient rejoints pour
organiser un coup dont ils avaient le secret ! Zohra faisait du sur place,
mais elle savait qu’il fallait de la patience, beaucoup de patience pour
appréhender un individu de l’intelligence d’Omar. C’était la politique de
l’anguille, il se faufilait entre les pierres de la rivière pour réapparaître
dans les herbiers. Il avait jusqu’à maintenant bénéficié de nombreuses
complicités, mais celles-ci avaient fondu comme neige au soleil. L’hécatombe de
ses partisans morts dans ces actions suicides avait anéanti ses troupes, il ne
pouvait plus compter que sur quelques individualités rescapées des tueries. Zohra
savait qu’il tirait ses dernières cartouches, mais il restait dangereux. Il
fallait le localiser, elle comptait toujours sur l’Israéli Connection pour
cela, elle couvrait tout le territoire marocain du Sahel au RIF, en concurrence
avec la mafia marocaine, celle-ci était surtout implantée dans le RIF et le
centre du Maroc autour de Marrakech. Amar
Béroud avait été de nouveau remarqué à Sidi Kacem, la gendarmerie ne le lâchait
plus avec l’intuition qu’Omar ne devait pas être loin. Amar était son homme de
confiance, mais aussi son épine plantée dans son pied. Les sbires de la mafia
juive suivaient comme son ombre Amar Béroud sans se faire remarquer par les
gendarmes spécialisés dans ce genre d’enquête. Omar avait besoin d’Amar, il
était trop isolé, il lui fallait de l’aide. Ils avaient rendez- vous devant les
écuries royales de Sidi Kacem, les quatre hommes de l’Israeli Connection se
séparèrent pour mieux contrôler la situation. Amar attendait devant l’entrée
des écuries quand il vit arriver Omar suivi par des hommes de la mafia juive,
il tira son pistolet et s’écroula à terre touché par un tir des gendarmes. Omar
couru pour s’enfuir et échapper à la gendarmerie, il tomba dans les bras de la
mafia juive qui l’amena très vite hors circuit.
Zohra eut une communication du patron de l’Israeli Connection, Amar avait
été ceinturé et gardé à vue dans des locaux de la mafia juive. En accord avec
le colonel, elle s’entoura d’Ibrahim et d’Abdéramane et demanda une escorte de
policiers. En arrivant à Dar El Gueddari dans le garage d’Ethan Alaoui, ils
trouvèrent Omar Hssain, les mains derrière le dos, menottées, les jambes
également ficelées pour éviter les escapades. Zohra invita le patron de la
mafia juive à venir avec elle jusqu’à la forêt qui court jusqu’à Sidi Yahya
Arrivé à une clairière, Omar fut descendu de l’automobile. Ibrahim fusilla Omar
d’une balle dans la tête. Nous avons fait justice, sa Majesté le Roi pourra dès
ce soir dormir sur ses deux oreilles. Au moment où les membres de l’Isréli
Connection voulaient rentrer, la police les arrêta sur le champ en leur passant
les menottes.
-Vous êtes une belle garce de nous avoir joué ce tour de cochon
-Je vous remercie d’avoir rajouté cette épithète, je n’ai fait que suivre
notre accord, vous faisiez ce que vous vouliez tant qu’Omar était libre, dès
son arrestation, la police retrouvait tous ses droits, c’est ce qui a été fait.
Je ne vous ai pas trahi.
-Je vous garde un chien de ma chienne, nous nous retrouverons.
Dès que la police eut amené au commissariat le patron de la mafia juive et
ses quatre soldats, Ibrahim et Abdéramane, roulèrent le corps d’Omar dans une
toile et le mirent dans le coffre de la voiture. Ibrahim roula sous la conduite
de Zohra jusqu’à une casse importante située dans la nature. Arrivé devant le
portal, un coup d’avertisseur suffit pour que Malek Farhat ouvre les portes.
Une fois à l’intérieur, Abdéramane aspergea le corps d’Omar et l’intérieur du
véhicule d’essence, une allumette suffit pour allumer le feu. Ils restèrent sur
place pour assister à l’avancement de la crémation. Quand il ne resta plus que
des cendres, Malek mit son engin en route, l’automobile fut happée, écrasée
comme un vulgaire pot de yaourt et réduit en quelques secondes en un cube de
ferraille d’un mètre de côté. C’était terminé, personne ne viendrait s’incliner
sur la dépouille d’Omar. Cette presse venait d’Italie, construite par la
société Projac, un véritable bijou de technicité. Il était l’heure de se dire
au revoir, Malek s’approcha, Zohra le fusilla de son Glock, aucun témoin. Ils
reprirent la route de la boutique.
Des
installations du terminal de phosphates de Safi ont été sabotées, retardant le
transfert du minerai sur les minéraliers à quai. La police accusa immédiatement
les tenants de la République Wahhabite du Maroc d’avoir saboté les
installations. Zohra n’était pas convaincue, en général Omar prévenait de ses
intentions par des déclarations tonitruantes avant ses forfaits. Elle pensait
que le Maroc était à nouveau confronté aux extrémistes islamiques du Polisario
et de ses alliés. Elle avait raison, un communiqué du Groupe Islamique du Sahel
revendiquant l’attentat rétablit l’ordre des choses. A la tête de dix hommes,
elle coinça un petit groupe de terroristes du Polisario entre Dakla et la Mauritanie.
Peu armés, ils furent exécutés par un feu nourri des partisans de Zohra. Le Maroc
ne pouvait relâcher sa vigilance, il était attaqué de toute part, les services
spéciaux du pays avaient du travail, chaque jour la police exécutait des
opérations menant à l’arrestation de groupes ou d’individus dangereux pour la
stabilité de l’Etat. Les agents des services spéciaux avaient très souvent la
responsabilité de plusieurs affaires en même temps qui se recoupaient, se
chevauchaient, se complétaient, Zohra en était à ce stade. Omar était traqué
par la police et l’Israéli Connection, le colonel l’avait dirigé vers d’autres
affaires en attendant l’arrestation d’Omar.
La semaine fut
difficile pour la police d’Agadir, d’autant que c’était une région relativement
calme dans le Souss. Une série d’attentats individuels contre des policiers
attaqués au couteau, heureusement sans gravité. Un problème beaucoup plus
important se produisit quelques jours après, une voiture fonça dans la foule,
un policier anticipa,et a tiré sur le
véhicule, tuant les deux occupants. Malheureusement la voiture devenue folle et
incontrôlable s’encastra sur la terrasse du grand café. Quatre consommateurs
furent blessés dont l’un plus gravement avec un pronostic vital engagé !
Les habitants de la région du Souss étaient sous le choc, ces évènements
n’étaient pas habituels dans la région, mais cela démontrait que le Maroc était
toujours sous la menace des musulmans extrémistes. Peu nombreux, ils exerçaient une pression sur
le gouvernement du royaume. A peine coupés de leurs belligérants, ils se
reconstruisaient très vite et repassaient à l’attaque. Il fallait couper la
tête ! Nous avons commis une erreur Capitaine en croyant avoir anéanti
toute l’organisation, il n’en est rien, il reste une poignée d’irréductibles
qui seront difficiles à repérer. Il faudra des semaines, voir, des mois,
répondit Zohra.
Zohra se fit remettre
la liste de tous les fichiers des musulmans radicaux fichés par la police dans
la région d’Agadir. Des mois d’enquêtes, de filatures discrètes, rien de concret !
Les attaques avaient cessé, mais il suffisait de peu de choses par un
renforcement du groupuscule pour que cela devienne endémique. Elle avait eu des
soupçons un moment sur un élément qui fréquentait assidûment la mosquée de Sidi
Bouknadel construite à côté du Mausolée après le tremblement de terre de mille
neuf cent soixante, à l’entrée d’Agadir. L’homme, Adam Akram habitait une toute
petite maison en pierres en face du souk, entre une épicerie miniature et un
réparateur de bicyclettes. Après une longue filature, elle n’avait rien
remarqué de suspect. Elle décida de revenir quand même s’occuper d’Adam,
quelque chose, sans savoir quoi au juste l’interrogeait ! Devant la maison
d’Adam, un large trottoir en terre servait de garage aux nombreux chariots
tirés par les ânes et les chevaux livrant les produits pour le souk et les arrêts
obligés des cars pour Casablanca. En
fait la maison d’Adam chaque jour durant la durée du souk était entièrement
cachée. Derrière la maison, un jardin minuscule non entretenu était colonisé
par les chardons et les herbes hautes. Un chemin de terre montait et s’évacuait
vers les champs des collines alentour. A une centaine de mètres, une grande
ferme d’élevage de poulets était abandonnée. Elle était intriguée par ce grand
bâtiment en béton abandonné si près de la maison d’Adam. Elle décida de visiter
les lieux. A l’intérieur du deuxième bâtiment parallèle au premier, une vieille
table en bois et deux bancs pas très reluisants étaient posés sur ce qui devait
être du béton. Elle fit demi -tour, elle reviendrait la nuit explorer ces lieux
qui risquaient de lui apporter de précieux éléments.
Deux heures du matin,
armée du fusil lance- grenades, elle s’approcha furtivement du bâtiment. Un
groupe tenait un conciliabule, ses jumelles infra rouges lui permettaient de
voir comme en plein jour, Adam était-là ! Elle s’approcha davantage, son
pied s’accrocha à une branche alertant les malfrats. Armés, ils sortirent en
groupe, ne voyant rien, ils entrèrent à nouveau dans le bâtiment, sans doute un
chien pensèrent -ils ? Zohra s’approchait encore à plat ventre sur la
terre cachée par un eucalyptus. Les techniciens de la boutique avaient mis au
point un instrument d’écoutes jusqu’à dix mètres. La discussion portait sur un
projet d’attentat à la gare ONCF de Salé avec tous les détails, les approches,
la pose d’explosifs, la fuite. C’était d’un grand intérêt pour eux, la gare
était au-dessus d’un grand magasin et jouxtait un bâtiment sportif, ils feraient
un massacre.
Trop près, elle se recula jusqu’au chemin,
ajusta la mire du fusil qui lui donna la distance exacte de l’objectif, le
chargea d’une roquette, appuya doucement sur la détente, une colonne de feu monta
vers le ciel, le bâtiment explosa, envoyant les terroristes en enfer ! Il
n’y aura plus d’attentat à la gare de SALE. Sur le chemin elle enfourcha sa
moto qu’elle avait poussée là en arrivant silencieusement, remonta ses cheveux
sur la tête, vissa son casque sur la tête et se dirigea vers la nationale, là
elle prit la direction de Tan-Tan. Quelques kilomètres plus loin sa caméra,
(chaque véhicule de la boutique était équipé d’une caméra à l’arrière du
véhicule et un écran sur le tableau de bord), lui indiquait qu’un véhicule
arrivait à toute vitesse derrière elle, prudente, elle tourna la poignée des
gaz de sa BMW qui prit rapidement de la distance. Sa caméra lui indiqua que la
voiture avait également accéléré, elle était suivie, le chauffeur tenterait de
l’écraser, cela passerait pour un banal accident de la route. Elle changea de
vitesse, tourna la poignée des gaz, la BMW bondit à cent soixante kilomètres à
l’heure, elle entendit le crépitement des balles tirées par la fenêtre du
passager avant, elle slaloma sur l’asphalte pour éviter les projectiles. Dans
un réflexe, elle passa sur le côté opposé de la chaussée roula une centaine de
mètres en sens contraire de la circulation puis vira brusquement sur la roue
arrière dans un crissement de pneu quand la roue avant retomba sur la chaussée,
la BMW fit un bond et se rua sur la voiture poursuivante, elle arma d’un reflex
son fusil enfilé dans un fourreau sanglé sur le guidon, arrivée côte à côte de
son poursuivant, elle lâcha une salve qui tua le chauffeur et le passager à l’arrière
la voiture devenue folle s’écrasa contre un poteau en béton, se disloqua tous en
flammes. Elle continua sa route, car une deuxième voiture la poursuivait elle
la dépassa rapidement et revint dans sa ligne, arrivée à cinquante mètres, elle
s’écarta légèrement sur la droite et envoya une nouvelle fois une salve
meurtrière tuant le tireur à côté du chauffeur et le passager à l’arrière, elle
doubla la voiture à toute vitesse et reprit de la distance. Sa caméra lui
indiqua que la voiture s’était arrêtée, elle fit de même pour observer la
situation, en fait les survivants jetaient les morts sur le bas- côté de la
chaussée. Le chauffeur accéléra à fond les pneus crissèrent, la voiture fit du
sur place quelques secondes et bondit en avant, Zohra avait anticipé, elle
gardait une distance convenable avec ses poursuivants. Elle connaissait leur
intention, attendre qu’elle atteigne son but pour s’occuper d’elle. Arrivée au
pont sur l’oued Souss elle s’engagea à droite dans le boulevard du petit port
de pêche, arrivée au port de pêche, elle arrêta la BMW et la déposa contre une
coque en réfection. Elle courut en slalomant entre les barques posées sur le
quai, elle entendait l’impact des projectiles sur les coques en bois. Elle
avisa un vieux bateau pourri, jeta son sac sous la coque et plongea dans l’eau
froide du Souss, elle se laissa couler au fond du fleuve. Sept mètres d’eau
empêcheraient les projectiles de la toucher, elle nagea rapidement vers l’autre
bord. C’était un exercice habituel dans les commandos, de nombreux entraînements
l’avaient aguerri à la nage en apnée à des profondeurs allant jusqu’à quinze
mètres. Elle pouvait tenir huit minutes en apnée sous l’eau ce qui déconcertait
l’adversaire, mais c’était encore bien loin du record du monde homologué de
l’espagnol Aleix Ségua Véwrel avec vingt- quatre minutes !
Elle toucha le quai de l’autre côté du fleuve, elle laissa juste sa tête
dépasser de l’eau et observa la rive d’en face brillamment éclairée. Les trois
assassins semblaient déconcertés, ils scrutaient avec attention les eaux du
fleuve. Ils étaient sûrs de l’avoir touché, ils guettaient sa réapparition au
bout d’une quinzaine de minutes, ils tournèrent les talons persuadés qu’elle
s’était noyée emportée par le courant du Souss et de la marée de l’Atlantique,
Zohra resta encore par prudence une dizaine de minutes au cas où ils
reviendraient sur leurs pas. Ne voyant pas le retour des malfrats, elle
replongea dans l’eau et nagea jusqu’à la berge du départ, récupéra son sac et
la BMW. Toute mouillée, elle fonça à la planque d’Agadir. Elle sonna, suivant
le code convenu, la porte s’ouvrit automatiquement. Youssef la regarda et
tourna les talons sans mot dire. Quelques instants plus tard, une femme entra
avec des vêtements secs, elle entraîna Zohra dans la salle de bains, l’aida à
se déshabiller et se déshabilla également. Elle fit couler l’eau chaude sur
tout le corps de Zohra, la savonna avec du savon parfumé au gingembre et la frotta
avec une pierre ponce sur toutes les parties du corps, Zohra sentait la chaleur
l’envahir. Après un rinçage long et bienfaisant, toujours sans un mot, la femme
l’aida à se sécher, Zohra s’allongea sur le lit, la femme entreprit de la masser
avec de l’huile d’argan jusqu’au moment où la peau l’aurait absorbé ! La
femme se rhabilla et disparut. Zohra en profita pour faire sa prière sur le
petit tapis, puis elle appela le Colonel et le mit au courant des derniers
évènements. Quelques instants plus tard, la femme revint avec une théière
remplie de thé brûlant à la menthe, un verre d’eau et un cachet d’aspirine
effervescent. Tous les membres des planques de la Boutique étaient des
commandos parachutistes, triés sur le volet par le colonel.
Elle se réveilla de
bonne humeur, le traitement subi la veille avait été bénéfique, elle reprit une
douche sans se mouiller la tête et s’habilla de vêtements secs déposés par la
femme, plus tard elle eut la surprise de revoir sa BMW démontée entièrement
repeinte et les plaques d’immatriculation remplacées, avec un signe discret,
police militaire. La femme revint avec un grand plateau garni pour le petit
déjeuner, thé, petits pains au chocolat, croissants, crêpes marocaines, olives
noires et huile d’argan. Elle était traitée comme une reine. Elle plongea son
croissant dans l’huile d’argan qu’elle avala avec des olives, le thé servait à
faire couler tout cela. Elle était contente d’avoir retrouvé son sac, c’était
son outil de travail. Le sac était en fibres de jute réversible, un côté vert
avec un lion de l’Atlas, l’autre rouge avec la tour Hassan, avec un cordon
passé sur l’épaule, le sac descendait sur la hanche, pratique pour mettre la
main dans le sac et se saisir de l’arme de son choix ! Elle avait toujours
une burka à l’intérieur au cas où elle devrait changer de physionomie et des
deux joujoux, un Glock 18 petit pistolet mitrailleur de 9 millimètres
automatique et semi- automatique, avec une cadence de tir incroyable, 1100
coups par minute et une petite merveille, le pistolet pneumatique STOEGER en
polymère anti corrosion modifié par les armuriers de la boutique envoyait des aiguilles
d’acier jusqu’à dix mètres. A quatre mètres, la cible était réduite au silence,
l’aiguille perçait les os du crâne et se logeait dans le cerveau sans coup
férir ! D’un poids de six cents grammes, sa vitesse de tir était de cent
trente mètres secondes. Elle resta deux jours dans la planque de Youssef, elle
en profita pour démonter entièrement ses joujoux, les nettoya et les remonta
soigneusement. Elle réfléchissait également à ses poursuivants du deuxième
cercle, elle n’aurait jamais dû passer avec la moto sur le chemin, le deuxième
cercle de gardes devait se loger à une centaine de mètres du local anéanti, si
non, comment expliquer le succès de son entreprise ? Il y avait eu une
faille dans leur système de sécurité !
Le groupe d’Agadir avait
été anéanti ! L’agresseur au couteau n’avait pas été retrouvé, celui-ci
pouvait être n’importe qui et pas forcément l’un des membres surveillés par la
police. C’était comme rechercher une aiguille dans une botte de paille !
L’un des témoins de l’attaque au couteau décrivait l’agresseur comme plutôt
maigre, pas très grand, les cheveux coupés courts, mais pas rasés sur les côtés
à la mode marocaine avec un visage jeune, pantalon Jean troué à la mode et pull
de couleur verte. C’était peu ! Les dessinateurs de la boutique avaient
fait plusieurs portraits- robots, aucun ne correspondait à ce qu’avait vu le
témoin. Retour à la case départ, plutôt maigre, visage jeune, cheveux coupés
courts non rasés sur le côté, habillé d’un jean troué et d’un pull vert.
Quelque chose titillait l’esprit de Zohra, les cheveux courts non rasés sur les
côtés de la tête, plutôt maigre.
-Colonel, si cette
description donnée par le témoin de l’attaque était celle d’une jeune femme,
nous chercherions alors que dans une seule direction ? Elle doit être très
jeune, Colonel, elle portait des jeans troués, à la mode, sa coiffure courte
est le signe d’une fille dans le vent ! Son pull vert fait référence au
drapeau du Hamas, c’est aussi la bande verte de la République Arabe Saharoui
démocratique. Colonel, je pense que nous avons à faire à un cas isolé qui peut
répéter son geste, mais ne serait pas coordonné avec un groupe d’individus.
Il faisait très beau, Zohra juchée
sur la BMW de la boutique se laissait aller à son inspiration sans but
particulier. Elle se retrouva au mausolée Sidi Bou El Quenadel, lieu sacré,
sanctuaire vénéré. Sidi Bouknadel appelé aussi Sidi Abi Al Kanadil avait de
nombreux antécédents historiques. Protecteur des pêcheurs, ce Saint était aussi
un héros, mort en martyr contre des combats l’opposant aux envahisseurs
portugais. Elle posa sa moto sur son trépied et s’engagea dans le chemin
rocailleux amenant à la basilique, elle ressentit le besoin de faire sa prière
devant le mausolée. Relevée, elle se dirigea vers l’entrée du mausolée, elle
croisa, elle en était sûre la jeune femme en pull vert qui avait attaqué les
policiers. Elle se retourna et la suivit du regard. Zohra se dirigea vers un
groupe de masures en pierres un peu plus bas et décida malgré les risques de la
suivre. L’escalier de pierres était des plus rustiques, à un moment une dalle
en pierres plates stoppait l’escalier provisoirement. Elle s’apprêtait à
descendre la deuxième partie de l’escalier quand la garde rapprochée de la
fille en pull vert intervint menaçante, Zohra avait été repérée. Les trois hommes s’approchèrent avec
l’air méchant. La fille en vert avait disparu. L’un des hommes s’approcha avec
l’insulte facile : alkhuruj min hunak 'aw tafjir famakin, (tire- toi de là ou j’te fais sauter
la gueule). Devant cette tirade
pour le moins inamicale, Zohra leva sa jambe droite, le talon de sa chaussure
perça l’œil de l’immonde crapule il s’écroula dans des cris. Quelle surprise
cria Zohra tu ne t’attendais pas à cela hein mon coco ! Un autre de ces
assassins, trop sûr de son fait courut vers elle un couteau à la main, c’était
toujours le même scénario, Zohra leva avec dextérité comme un élastique la
jambe gauche, le talon aiguille de sa chaussure perça le tympan de l’individu.
Le troisième croyant maîtriser les évènements se courba pour abattre Zohra,
celle-ci le cueillit dans la gorge d’un formidable coup de pied, il s’écroula.
C’était fait, la placette était vide, mais où était passée la fille au pull
vert ? Zohra avait fait le nettoyage du premier cercle de l’entourage du
pull vert, il devait en rester encore planqué autour du mausolée protégeant
miss pull vert, personne autre que les assassins n’étaient intervenus !
Elle remonta l’escalier et s’assit au petit café fleuri devant un thé brûlant à
la menthe. Là elle regarda l’environnement avec attention, une multitude de
petites maisons de pierres mitoyennes jouxtaient le mausolée de Sidi BouknadelL
coincée dans des ruelles tortueuses avec des niveaux différents. Elle n’était pas dans son assiette, parfaite
inconnue, elle ne pouvait agir comme elle le souhaitait. L’effet de surprise
avait été des deux côtés, pour elle avec l’attaque- surprise des assassins de
la demoiselle au pull vert et un effet de surprise pour les assassins qui ne
s’attendaient pas à cette défense impitoyable déployée par Zohra. Des
chaussures de femmes en armes fatales ! Il y avait une planque chez Amine
à Kénitra, elle pensait se servir d’un drone piloté depuis le zouk d’Agadour.
Deux jours plus tard,
Amine et Zohra s’étaient réfugiés dans le champ après le souk avec un drone
militaire de quatre- vingt centimètres de long pouvant se déplacer avec un
propulseur électrique silencieux jusqu’à quarante kilomètres. Le drone s’envola
et survola en silence le quartier du mausolée Sidi Bou El Quenadel. Pendant des
heures, il survola les ruelles par des allées et venues à quatre -vingt mètres
de hauteur sans rien de notable piloté par Amine et surveillé sur un écran. Ils
stoppèrent le survol pour recommencer durant la nuit. Ils prendront patience,
si ce n’était aujourd’hui, la surveillance devrait continuer durant plusieurs
jours si ce n’est plusieurs semaines. En général, ces gens -là n’aimaient pas
changer de place. La môme en vert s’était éclipsée, volatilisée, mais Zohra
était persuadée de sa présence dans le quartier du mausolée. Le drone d’Amine
était sans doute trop imposant pour rester invisible tout ce temps. La
situation était provisoirement bloquée. Le quartier du mausolée était habité
depuis longtemps par les mêmes personnages même avec une burka Zohra ne serait
pas invisible. La solution serait de se servir d’un habitant du quartier contre
un pourboire conséquent pour amener des renseignements à Zohra. Amine avisa un
vieillard qui marchait difficilement avec une canne. Le vieillard s’appelait
Abad, il habitait depuis toujours le quartier du mausolée, il connaissait tout
le monde sans exception. Amine lui remit pour preuve de sa bonne foi, cinq-
cent dirhams, Abade devra aviser Amine des allées et venues de la fille en
vert. Ils se rencontreraient chaque soir au petit café fleuri. Zohra était
obligée de travailler avec Amine car aucune personne du quartier ne lui
donnerait de renseignements, son statut de femme jouait contre elle ! Abad
était un homme affable, souriant connaissant toutes les histoires du quartier
et son rôle d’espion l’amusait beaucoup. La fille en vert s’appelait Aafrae, c’était
la fille du gardien du mausolée, elle avait fait de hautes études tout le quartier
en était fier. Elle était partie deux années en Syrie pour s’initier au djihad,
revenu à Sidi Bouknadel elle semblait s’être rangée et suivre une vie de
prières, fréquentant assidûment la mosquée de la ville. Abad disait que le
diable dormait avec elle. Elle était toujours entourée de quatre ou cinq hommes
à l’air mauvais. Tout cela était en contradiction avec sa vie de prières ?
Zohra avait un peu plus d’éléments sur la demoiselle au pull vert, mademoiselle
Aafrae, mais comment l’atteindre, ni Zohra ni Amine ne pourraient
intervenir directement dans le quartier ! Vu l’aura qui l’entourait, il
était impensable de lever trois ou quatre hommes pour en finir avec elle. Le
seul avantage dans l’état était qu’elle se sentait traquée, elle restait
prudemment dans son quartier. Le vendredi, jour de la grande prière, Abad était
retrouvé égorgé derrière le mausolée, Amine et Zohra étaient en danger, la
population serait certaine que c’était eux les responsables. Il fallait qu’ils
quittent le quartier, c’était bien joué au prix d’un crime, elle avait desserré
l’étau autour d’elle. Intelligente, futée, elle avait éloigné le danger, elle
pourrait désormais aller et venir dans le quartier à sa convenance. Le site de Bouknadel
resterait en constante surveillance. Aafrae était prisonnière dans son propre
quartier !
Zohra avec une équipe de quinze
commandos parachutistes partait sur les traces des sbires d’Aqmi. Comme la
première fois, elle se fit conduire dans la petite oasis à une quarantaine de
kilomètres d’Agadir par les Jeeps de la Boutique. Elle retrouva Aanan le chef
Touareg qui accepta une nouvelle fois de l’accompagner avec deux autres
Touaregs. Ceux-ci seront récompensés par la saisie des armes et munitions ainsi
que les vivres prisent sur les restes des rebelles. Durant deux jours la petite
troupe de Zohra apprit comment monter sur les chameaux et les manœuvrer. Le
dressage des chameaux est très long en un peu plus, un peu moins d’un an,
ensuite ce sont des animaux dociles à piloter. Avant de partir, les Touaregs
choisirent deux chameaux de bâts, ceux-ci pouvaient transporter jusqu’à cent
soixante -dix kilogrammes sur leur dos. A raison de soixante kilomètres par
jour, ils feront du chemin ! Toute la troupe sur les conseils d’Aanan
avait appris à nouer le foulard bleu autour de leur tête pour se protéger de la
poussière de sable.
A deux heures du matin,
Aanan commanda le départ, les chameaux se dirigeaient très bien la nuit.
L’information qu’avait eu le Colonel concernait Oulad D’riz sur un commando
d’Aqmi replié dans les dunes à quelques kilomètres du village était très
importante, vitale. Zohra considéra qu’attaquer la nuit serait la meilleure
formule, approuvée par Aanan. Les chameaux n’ayant pas de sabots, l’approche se
fit dans le silence. Curieusement les sbires d’Aqmi n’avaient pas posté de
gardes, ils se pensaient en sécurité ? Zohra mit une partie de sa troupe
derrière leur campement pour répliquer immédiatement. A son commandement la
troupe ouvrit le feu, l’ennemi surpris n’eut pas le temps de répliquer
efficacement. Les extrémistes anéantis, les Touaregs récupérèrent les armes,
les munitions et les provisions de bouche qu’ils sanglèrent sur les chameaux de
bâts. Ils reprirent leur marche à deux heures du matin. La savane s’étendait
sur plus de deux cents kilomètres. Aanan fit stopper la troupe pour alimenter
les chameaux qui se gorgèrent d’herbes sèches et d’épineux. Ils purent admirer
une gazelle qui détala à cent à l’heure. Au bout d’un moment, Aanan assis dans
l’herbe, se leva d’un bond : sanadhab, on y va ! Chacun remonta sur
sa monture et la petite troupe prit la direction indiquée par le chef Touareg,
les deux autres Touaregs n’étaient pas militaires comme Aanan et n’obéissaient
qu’à lui-même. Une autre information venant de caravaniers croisés en chemin
indiquait que des hommes lourdement armés, sans aucun doute des membres d’Aqmi
se trouveraient à quatre -vingt kilomètres d’Oula D’Riz tout près de la
frontière de la Mauritanie, s’il fallait traverser, cela se ferait. D’après les
informations reçues par Aanan ces hommes avaient des armes lourdes, lance
-roquettes, fusils d’assauts et deux Jeeps armées de lance-roquettes. Sans
doute l’avant-garde d’Aqmi. Zohra lança un message au Colonel. En retour il lui
annonçait qu’ils étaient entrés en Mauritanie, les Pleiades étaient d’un grand
secours. Aanan changea de direction et la troupe de Zohra avec. Les Touaregs
étaient alléchés par l’idée de récupérer un armement moderne dont ils ont
besoin face aux bandes armées du Mali. Les Touaregs ne sachant pas piloter une
automobile laisseront donc les deux Jeeps aux militaires conduits par Zohra
mais en raflant les lance-roquettes. Ils étaient nombreux, Zohra sortit son
arbalète de trente centimètres en acier flexible qui possédait une incroyable
détente et qui touchait une cible à cent mètres. Ils dormaient dans une grande
tente berbère, trois hommes montaient la garde. Zohra visa le premier qui
s’effondra sans bruit, elle changea de position pour viser le second qui s'écroula
à son tour dans le silence. Elle se déplaça encore une fois pour aborder en
meilleure position le troisième garde n’eut pas le temps de réagir une flèche
lui avait percé la gorge. Au moment de rejoindre ses hommes, un homme sortit de
la tente pour se soulager, une flèche mit fin à sa vie en le frappant dans la
tête. Zohra donna des ordres, ne pas réveiller autant que possible les
assassins d’Aqmi, les commandos était des habitués des attaques à l’arme
blanche, elle fit un geste, tous s’engouffrèrent sans bruit dans la tente en
dehors de quatre ou cinq assassins, tous furent exécutés par des poignards de
combats. Le nettoyage effectué sans dommage pour les assaillants, mais avec
quelques coups de feu après que les Touaregs aient récupéré les armes et les
munitions, ceux-ci se dépêchèrent de rentrer sur le territoire marocain, il
fallait éviter tout problème frontalier avec la Mauritanie. Le Colonel avisé du
succès de l’opération ordonna le retour immédiat à la Boutique.
Le retour se fit dans une relative tranquillité
pour rejoindre l’oasis des Touaregs. Une nuit, la grande tente berbère dressée
pour le repos de la troupe avec deux hommes de garde remplacés toutes les deux
heures. Les Jeeps étaient garées à proximité de la guitoune. Un cri retentit
vers une heure du matin, Zohra se leva d’un bond, le fusil à la main avec le
gros de la troupe. Un soldat avait été mordu au bras par une vipère des sables
qui s’était promptement éclipsée et parfaitement indiscernable dans la nuit. Zohra
constatant les faits, réagit très vite, prenant sa trousse de secours, elle
nettoya soigneusement la plaie, fit un garrot bien serré au-dessus de la
morsure, cassa l’ampoule de l’antivenimeux, aspira le vaccin dans la seringue,
la veine gonfla, elle introduisit l’aiguille et injecta par une poussée
progressive le vaccin antivenimeux adapté, l’effet serait de plusieurs heures.
C’était douloureux, le soldat se plaignait d’une brûlure à l’endroit de la
morsure. Zohra lui administra un comprimé d’Izalgi, un opiacé anti douleur.
Vingt minutes après la douleur s’était envolée, disparue. Durant ce temps Aanan
avait demandé à ses deux hommes d’aller cueillir des herbes dans la savane.
Malgré les dangers que la lumière représentait, celle-ci se voyait à des
kilomètres dans le désert, Zohra avait doublé la garde, une petite bouteille de
gaz était allumée, un petit réchaud la couvrait. Quand l’eau du récipient se
mit à bouillir, Aanan jeta une grosse poignée d’herbes dans l’eau bouillante et
laissa l’eau infuser et se gorger du jus d’herbe durant près d’une heure. Ceci
fait, il fit boire au militaire deux gros gobelets de cette tisane artisanale
et ancestrale, il n’aura pas de fièvre, dit- il. Le lendemain ils restèrent sur place pour que
le militaire ait complètement récupéré ! Les Touaregs, les Bédouins et les
Amazigs de cette partie du territoire avaient conservé précieusement l’héritage
venant du moyen-âge des usages des herbes et des plantes qui avaient fait le
renom de la médecine arabe. Ils auraient pu éviter le vaccin en restant à
l’oasis, certaines plantes sont très efficaces contre le venin de la vipère des
sables. Le lendemain matin, au réveil du militaire, Zohra et Aanan constatèrent
l’amélioration de l’état de santé du soldat effectivement il n’avait pas de
fièvre, juste encore la sensation de brûlure à son bras. Un demi cachet
d’Izalgi améliora rapidement son état. Il pourra reprendre la route demain,
tout allait bien ! C’était la dernière fois qu’il avalait de l’Izalgi, ce
produit produisait une adaptation rapide à l’opium contenue dans le médicament
auprès du consommateur, il convenait de stopper les prises.
Dès l’arrivée à
l’oasis Zohra se lava abondamment avec du savon de lait de chamelle, elle se
nettoya consciencieusement le visage pour enlever toutes traces de teinture
bleue générée par le foulard. Elle se sentait revivre, elle déplia le petit
tapis de prière et récita quelques versets du coran ! Le Colonel envoya
des Jeeps pour transporter la troupe de Zohra jusqu’à Safi. Le Colonel avait
fait le voyage jusqu’à Safi. Capitaine, lui dit- il, Afrae a été abattue avec
deux de ses hommes, ce n’était pas bon pour Aqmi qu’elle reste bloquée et
isolée dans le mausolée. Ceux-ci ne reculaient devant rien ! Il préférait
la trahison, la clandestinité, les attentats aux combats frontaux. La réussite
de la troupe de Zohra au SaheL et en Mauritanie était exceptionnelle !
Vous avez fait du bon travail, de ce fait vous avez stoppé l’avance d’une
centaine d’hommes réfugiés en Lybie. Je vous remercie d’avoir sauvé la vie de
votre soldat, les cours à l’Ecole militaire vous ont été bénéfiques, Inch Allah.
Avec les Touaregs, nous avons trouvé des alliés de poids, ils seront à nos
côtés quand l’occasion se présentera, ce sont des guerriers de qualité. Avec l’armement qu’ils ont récupéré, ils nous
aideront également contre les tribus hostiles du Mali. Aanan m’a beaucoup aidé
mon colonel, il a cueilli des herbes dans la savane et constitué une décoction
qu’il a fait boire au soldat pour faire tomber la fièvre d’une manière durable.
Ils ont encore la science des plantes, ils peuvent pratiquement tout soigner de
cette façon. Ils sont les héritiers des médecins arabes du seizième siècle.
, je vous charge une
nouvelle fois d’une mission délicate, vous partirez à la fin de la semaine avec
Abdéramane à Riyad. Les services des USA nous signalent que l’Arabie Saoudite continue
de financer Al Qaida et Aqmi qui leur permettent de s’armer et de payer des
nervis pour des attentats. Votre rôle sera d’éliminer ces financiers, mais leur
famille est grande, importante, très riche, tout près du pouvoir sans
appartenir à la famille royale. Ce sera très difficile, mais je vous confiance,
vous serez munis de passeports diplomatiques, l’Ambassade vous couvrira en cas
de besoin. Quand vous arriverez à RIYAD, présentez- vous à l’ambassadeur, il
vous remettra vos armes. L’ARABIE SAOUDITE n’est pas un pays démocratique, ce
pays pratique la torture, la maltraitance des enfants, trafics d’êtres,
humains, sans parler de la condition de la femme. Une pauvreté chronique règne
dans le pays en particulier pour les travailleurs étrangers alors que la
richesse pétrolière explose et enrichit la famille royale et quelques
nantis. C’est en mille neuf cents
trente- deux qu’arrive au pouvoir Ibn SAOUD qui est proclamé roi. La richesse
du pays provient de l’or noir, l’ARABIE SAOUDITE est devenue le chef du cartel
des pays pétroliers. Dans les années mille neuf cent quatre -vingt, les ultras
conservateurs et fondamentalistes prennent le pouvoir après la prise de la
mosquée de LA MECQUE. La Muttawa, police des mœurs s’assure que tout ce qui se
passe dans le royaume n’enfreint pas les règles de l’Islam rigoriste. La
musique n’est pas autorisée en public, encore moins le théâtre, la ségrégation
sexuelle est fortement accentuée et le port du voile intégral obligatoire.
Voilà très rapidement présenté le tableau, vous devrez vous habiller d’une
burka chaque jour et ABDERAMANE comme tous les hommes. Ce sera très difficile.
La famille dont vous allez vous occuper est la famille xxxxxxxxxxxxxxxxx Elle
se compose du père, potentat, il règne sans partage dans sa famille, et dans le
monde des affaires, de ses deux fils et de trois neveux, cela fait beaucoup de
monde à approcher.
RIYAD, on y était.
Ils passèrent de suite à l’ambassade du MAROC, l’ambassadeur les attendait, il
leur remit une valise. ZOHRA l’ouvrit elle trouva son arbalète, son Glock dix-
huit et le petit pistolet à aiguilles ainsi que le Béretta d’ABDERAMANE.
L’ambassadeur ne dit mot, mais resta un moment interloqué devant l’armement en
particulier devant l’arbalète en acier. Rentrés à l’hôtel, ils tinrent
conciliabule sur la famille xxxxxxxxxxxxxxxxx. Ils sont six, il faudra beaucoup
d’idées pour arriver à notre fin. Nous aurons toute la police royale à nos
trousses sans compter les agents de la Muttawa. Réfléchissons, ayons des idées
et agissons. ABDERAMANE, proposa de commencer par le patriarche et ses fils,
les abattre avant le reste de la famille serait un exemple. Ils se replieront
sur eux-mêmes, s’enfermerons avec une armée de garde du corps, nous pourrons
mieux les loger, mais plus difficile à les abattre. De toute façon nous
laisserons le temps au temps. ABDERAMANE regagna sa chambre. ZOHRA réfléchit à
ces propositions et s’endormit après avoir faite sa prière. Le lendemain sans
armes ils déambulèrent dans RIYAD pour mieux connaître l’environnement. La grande mosquée AL RAJHI était magnifique,
tout en face un hôtel somptueux. RIYAD avait deux côtés, les palais et toute la
pauvreté inscrite dans ce pouvoir autocratique avec des masures qui
s’alignaient le long de rues peu engageantes. Tout ceci contrastait avec les
lieux de cultes érigés pour ALLAH. La KAABA aurait été édifiée par ADAN,
mosquée sacré lieu incontournable pour les croyants en ayant les moyens. Le
vendredi jour de la grande prière du JUNAH, le midi, était pratiquement une
obligation pour tous les hommes, parfumés pour rendre grâce au seigneur.
L’ARABIE SAOUDITE aurait dépensé quarante -cinq milliards de dollars pour
financer la construction de mosquées en particulier dans les pays où les
musulmans sont minoritaires, soit mille cinq cents mosquées. L’ARABIE SAOUDITE
impose le courant rigoriste du wahlabite dans la pensée sunnite. La Boutique
avait fabriqué un faux certificat de mariage à ABDERAMANE et ZOHRA pour qu’ils
puissent se promener en paix l’un derrière l’autre sans être coincés par la
Muttawa. Ils habitaient provisoirement à l’hôtel, la situation n’était plus
gérable, cette proximité n’était pas du goût de ZOHRA. Ils louèrent très vite
une villa avec un certain panache, ils n’oubliaient pas qu’ils avaient un
passeport diplomatique, aussitôt installé ils haussèrent le drapeau marocain au
fronton. Les apparences étaient sauves.
Ils avaient fait le
tour de la ville en enregistrant soigneusement dans leur mémoire les quartiers,
les rues, les ruelles, les particularités de RIYAD, les villas de la famille
xxxxxxxxxxxxxxxxx. Ils étaient étonnés de tant de taudis encore debout. Ils
voulaient commencer par le père et les deux fils sortant de la grande mosquée,
cela s’était avéré impossible. La mosquée donnait accès à une grande place et
aucun emplacement susceptible de se mettre à l’abri lors des tirs. Il faudra
trouver un autre environnement. Le frère aîné logeait dans une splendide villa.
Un jardin décorait l’emplacement avec des palmiers. ZOHRA demanda au COLONEL de
lui faire parvenir par la voie diplomatique dix flèches explosives fabriquées
par la Boutique. Ils attendirent le bon moment, il n’avait pas lieu de
s’inquiéter, c’était son erreur. L’arbalète exécutée et modifiée par la
Boutique, envoyait un trait jusqu’à cent vingt mètres. Les portes s’ouvrirent
devant une dizaine de gardes du corps, la somptueuse automobile conduite par le
chauffeur en costume sortit doucement de la propriété. ZOHRA et ABDERAMANE s’étaient
postés derrière un palmier et une petite clôture de bougainvilliers. ZOHRA
ajusta son arbalète, chargea avec une flèche explosive, l’automobile explosa
tuant ses occupants. Ils disparurent sans être inquiétés, l’absence de coups de
feu éliminait leur présence et surtout d’où venaient le ou les tireurs. Cette famille tout prête du pouvoir avait été
agressée, la famille royale se confondit en regrets et s’en prit aux nombreux
contestateurs du royaume menaçant toux ceux qui s’en prenaient aux familles dominantes.
Une dizaine de contestataires furent arrêtés et torturés l’un deux décéda après
ces sévices. C’était la première fois qu’un tel évènement apparaissait en
ARABIE SAOUDITE, la police était sur les dents. Une arme nouvelle avait été
employée, il était techniquement impossible que l’automobile ait été piégée. Ce
qui intriguait la police était le silence qui entourait l’arme du projectile.
Elle ne trouva pas le lieu exact d’où avait été lancé le projectile. Une lance-
roquettes aurait produit une détonation permettant de situer le tireur. Quelle
était cette arme silencieuse ? ZOHRA et ABDERAMANE se devaient d’être
prudents, la famille xxxxxxxxxxxxxxxxx était sur ces gardes avec une troupe de
nervis renforcée. Le check était en ce moment intouchable, il fallait cibler
les autres membres de la famille.
Le frère aîné
habitait une villa de rêve, entouré de serviteurs lui étant entièrement
dévoués. La villa était défendue par une armée de gardes à l’extérieur et à
l’intérieur, pas question d’une attaque frontale. Il aurait fallu un drone,
mais difficile à dissimuler. ABDERAMANE fit le tour de la villa en se promenant
et en faisant très attention à la garde. Toute la villa était défendue,
difficile d’approcher. Pourtant il faudra trouver une idée. Elle est venue
d’ABDERAMANE. Il y avait une masure en destruction en face de la villa, en
venant la nuit il serait possible de cibler la villa. Un mur permettait de se
hisser dessus et de voir l’emplacement de la villa. De là il serait possible de
détruire la villa avec les traits explosifs. Deux nuits après, ils revinrent se
hisser sur le mur. Un éclairage agressif illuminait la villa. Des gardes
montaient la garde devant l’entrée. Un trait bien ciblé détruirait une grande
partie de la villa et mettrait le feu avec la certitude de la mort du frère
aîné. Le problème c’était les femmes qui résidaient à l’intérieur de la villa,
ZOHRA ne voulait pas de dommages collatéraux. Ils redescendirent du mur et
rejoignirent leur villa. C’était pourtant une bonne idée ! Ils surveillaient
toujours la villa sans progrès notables.
Le cadet habitait
avec son frère dans un endroit qui lui était réservé environ deux cents mètres
carrés. Il était célibataire, il avait une vie très particulière loin des
dogmes de l’Islam. Il s’adonnait aux plaisirs de la chair et buvait de
l’alcool. ZOHRA et ABDERAMANE eurent une meilleure connaissance de l’individu
par une rencontre impromptue. Un soir une jeune femme se présenta à la porte,
croyant que c’était une annexe de l’ambassade. Elle demanda de l’aide, elle
était Marocaine d’OUJDA. Elle raconta son histoire. Elle était venue travailler
avec un contrat de trois ans chez ce monsieur de la famille xxxxxxxxxxxxxxxxx.
Dès son arrivée, il lui confisqua son passeport. Elle travaillait douze heures
par jour, courses, lavages, repassages, cuisine et nettoyages. Elle n’avait
reçu aucun salaire depuis deux années.
Dernièrement il lui demanda de coucher avec lui, elle refusa, elle était
fiancée et devait se marier en rentrant au MAROC. Il fut brutal, la battit et
la menaça. Devant ses nombreux refus, il la viola et la fouetta puis la jeta à
la rue. C’est ainsi qu’elle aboutit dans la villa de ZOHRA et ABDERAMANE. ZOHRA
la consola comprenant son traumatisme, elle était passée par là en AFRIQUE.
Vous allez rester ici lui dit-elle, vous ne répondrez pas à la sonnerie de la
porte, bloquez votre téléphone pour effacer vos traces. J’ai besoin d’en
connaître plus sur la situation de la villa et de ses propres appartements.
La villa est très
grande et très riche, le frère aîné à la moitié de la villa, l’autre moitié est
séparé par un grand corridor. Le grand salon donne sur le jardin protégé par le
mur en béton, la cuisine est du côté du corridor, les chambres sur le côté
opposé au salon. Il n’y a pas de femmes sauf quand il organise des fêtes
orgiaques, en général ce sont tous les mercredis dans la piscine.
- Bon vous avez bien
comprise LEILA vous ne sortez à aucun prix de cette villa.
-Elle acquiesça
-Nous allons faire quelque chose pour vous.
Le salon donnait sur
le jardin protégé par un mur. A l’extérieur quatre hommes montaient la garde,
autant à l’intérieur. Il faudra se débarrasser des nervis en premier,
l’arbalète sera d’un bon secours. Pour les gardes à l’extérieur cela ne posait
pas de difficultés majeures, pour l’intérieur c’était autre chose. Ils seraient
immédiatement repérés sur le mur. C’est LEILA qui amena une solution Il
existait une petite porte en fer dans le mur côté des chambres. De cette porte
ZOHRA pourra fusiller le garde à proximité, la porte ouverte à l’aide
d’instruments, ils s’occuperaient des autres gardes. ZOHRA s’occuperait de
l’un, ABDERAMANE et son Beretta doté d’un silencieux de l’autre. Cela semblait
réalisable. Ils entreraient dans la villa, la tête cagoulée, menaceraient le
cadet et lui ôteraient la vie après avoir récupéré la somme d’argent et le
passeport qu’il devait à LEILA. Ils s’enfuiraient par la petite porte. ZOHRA
aurait remis sa robe à la mode d’ARABIE SAOUDIE et ABDERAMANE ressemblait copie
conforme à un natif du pays. Ils réfléchirent encore sur l’action à développer.
Le jeudi deux heures
du matin, pleine lune, ils se faufilaient avec prudence dans l’ombre restante.
L’arbalète de ZOHRA abattit le premier garde qui lui tournait le dos en fumant
une cigarette. De la même place, elle sacrifia le deuxième debout contre
le mur d’un trait dans la gorge. Il fallait qu’elle se déplace sans bruit, elle
trouva le troisième larron adossé à la porte d’entrée, un genou replié, la
chaussure contre la porte, un trait le meurtrit irrémédiablement, ABDERAMANE,
venu de l’autre côté ne laissa aucune chance au quatrième gardien en lui
logeant une balle de sa Beretta, mode incognito dans la tête. Ils coururent
retrouver la petite porte en fer dans le mur côté chambres. ZOHRA l’ouvrit avec
un passe-partout électronique. Elle grinça, mauvais augure, un garde arriva
curieux, il tomba percé par un trait de l’arbalète à la tête. Il en restait
trois. ZOHRA et ABDERAMANE s’avancèrent en catimini en longeant le mur de la
villa, au coin du mur, les trois autres étaient en conciliabule. ZOHRA arma son
outil, le premier tomba, rejoint par les deux autres exécutés par ABDERAMANE
dans un silence le plus total. Ils firent marche arrière pour rejoindre les
chambres. ZOHRA coupa une vitre et ils s’introduisirent dans la villa. Ils
avaient chaussé des chaussures à semelle de crêpe silencieuses. D’après les
détails de LEILA, le salon était sur le côté opposé aux chambres. Le cadet
était assis dans un super sofa avec un verre de champagne à main et un havane
aux lèvres, il ne se refusait rien ce croquant. Il sursauta en les voyant
arriver, la cagoule sur le visage, la peur se voyait sur son visage, la sueur
coulait de ses tempes.
-Nous voulons
l’argent que tu entreposes ainsi que le passeport de LEILA !
-C’est cette garce
qui vous envoie ?
-Pas tout à fait, tu
as commis un crime envers ALLAH, tu vas payer, mais avant sort le flouse.
Il leur remit
cinquante mille dollars et le passeport, une balle du Beretta le coucha
définitivement sur le sofa. Ils se rhabillèrent façon saoudienne et sortirent
tranquillement. Et de quatre commenta ZOHRA. Il reste un frère celui-ci sera
difficile à approcher, entouré de ses quatre femmes et de ses enfants, il est
très entouré. LEILA avait été d’un atout précieux en indiquant précisément les
lieux de la villa. Ils lui remirent en rentrant l’argent et le passeport, un
large sourire éclairait le visage de la jeune fille sans lui indiquer la
punition que son patron avait subie. C’est encore elle qui fournit une
indication concernant les femmes. Celles-ci se rendaient chaque semaine avec
les enfants apprécier un défilé de mode très prisé par celles-ci. Une créatrice
saoudienne Mashel ALRAJHI avait beaucoup de succès. LEILA les avait déjà
accompagnés pour s’occuper des enfants. Elles s’y rendaient tous les mercredis
laissant l’aîné des frères seul avec ses gardes du corps à la villa. C’était
enfin l’opportunité d’agir. Le mercredi ils assistèrent au départ des femmes,
des enfants protégés par une armée de garde du corps. Montés sur le mur de la
masure, ZOHRA arma son arbalète d’un trait explosif, elle visa le centre de la
villa, la flèche fusa à grande vitesse en atteignant sa cible le bâtiment
explosa et sombra dans les flammes, elle se dépêcha de réarmer et tira à
nouveau sur le côté droit, tout fut détruit en quelques secondes. Rapidement
ils se fondirent dans la foule apeurée et inquiète. La presse accordait une
place importante à ces évènements. Quel groupe s’en prenait ainsi à l’une des
familles les plus riches du pays La police penchait pour une vengeance d’un
groupe terroriste qui n’aurait pas obtenu satisfaction sur le plan financier,
mais sans preuve ! La famille xxxxxxxxxxxxxxxxxx avait été meurtrie dans
le sang depuis quelques temps. La presse rappelait les faits, le chef de la
famille, ses deux fils, ses deux frères, qui seront les suivants ? Le pays
était devenu une terre de ragots, de trahisons, tout était analysé par les
spécialistes par la torture s’il le fallait. Les opposants étaient
systématiquement emprisonnés, battus, humiliés. La moindre suggestion était
immédiatement traitée en complot contre la monarchie et réglée par des tortures
et assassinats. Le Roi voyait une tentative de déstabilisation de son régime
venu du YEMEN qu’il avait réduit au silence par les armes. La muttawa avait
reçu le feu vert pour mettre son nez partout. Arrogante elle s’arrogeait des
droits bien loin de la liberté. Tout individu suspecté d’homosexualité ou de
vivre à l’encontre de la charia était immédiatement supprimé, liquidé sans
aucun procès. Heureusement ZOHRA et ABDERAMANE étaient protégés par leur
passeport diplomatique, mais en tant qu’étrangers ils avaient été souvent
arrêtés et maltraités plusieurs fois par la muttawa, poussés contre le mur.
L’ARABIE SAOUDITE sombrait dans le cauchemar de la peur et de l’autoritarisme.
Leur villa n’avait pas été fouillée du fait de leur représentation marocaine.
Un jour, deux membres de la muttawa les avaient à nouveau arrêtés avec des
insultes à la clef, ZOHRA ne put le supporter de la part de ces nervis abrutis
par un pouvoir usurpé. Sa jambe se détendit sur le premier de ces nervis, il
s’effondra la gorge bloquée, le second eut le même sort touché à la tempe, tous
les deux rejoignirent rapidement le pays des enfers du roi Shaiitane. Ils
sortirent très vite de la ruelle. La muttawa devenait dangereuse, elle
s’attaquait à quiconque. Cette police s’octroyait des droits et des devoirs
incompatibles avec la liberté de croire ou de circuler. Le pouvoir s’en servait
dans le but de créer la peur et faire recroqueviller le peuple des croyants sur
eux- mêmes. Il faudra être très prudent
dorénavant.
En rentrant à la
villa, ZOHRA s’isola avec LEILA.
-Aimez- vous toujours
votre fiancé ?
-Oui mais que faire,
celui-ci ne voudra plus de moi après le viol que j’ai subi.
-Chouffé, écoutez
LEILA il vous faut oublier ce drame, j’ai subi la même chose en AFRIQUE, mais
je suis militaire, je ne me marierai pas, je reçois un ordre, je
l’exécute ! Vous, il faut penser à
votre avenir, être heureuse, avoir des enfants, avoir de la tendresse, de
l’amour pour votre époux. Il existe en FRANCE et à TANGER des cliniques de
réparation de l’hymen vous redeviendrez une vraie jeune fille. Cette
intervention chirurgicale est à votre portée, les cinquante mille dollars
changés en dirhams marocains vous amèneraient dans la poche quatre cent
soixante- huit mille quatre cents dirhams marocains. Vous n’avez pas de soucis
à vous faire. Avouez la vérité à votre fiancé, la maltraitance et les coups que
vous avez subis, les zébrures sur votre dos attesteront de la vérité de vos
dires. Ne parlez pas du viol, dans la vie il y a quelques fois des choses à
cacher, ALLAH est miséricordieux, il vous aidera.
Revenue près d’ABDERAMANE, elle lui
dit nous avons fait un bon et excellent ménage, mais il nous reste encore les
trois neveux qui habitent des villas différentes. Il faudra des jours, des
semaines sans doute pour observer les derniers membres de la famille
xxxxxxxxxxxxxxxxx gardés comme à la banque du MAROC. L’un des neveux habitait à
une quarantaine de kilomètres de RIYAD. Ils se décidèrent d’aller visiter le
village et par là même la villa du neveu.
Effectivement, une véritable armée protégeait la villa. Il n’y avait
aucune possibilité d’entrer. Une dune s’était plantée sous l’effet du vent
au-devant le grand portail à deux cent mètres environ, mais pas assez grand
pour s’y cacher, de plus elle était isolée et l’environnement ne se prêtait pas
à une attaque. Une palmeraie se situait à quatre ou cinq cents mètres de la villa,
bien loin pour lancer un trait explosif et occupé en permanence par des
bédouins ! Cette enquête demandait beaucoup de réflexions, d’attentions, chaque
cas était particulier. Il n’y avait aucun endroit où se protéger. Ils
s’installèrent plusieurs jours avec les bédouins accueillants au demeurant.
Dormants sous la tente, participants aux discussions avec eux ce fut un court
séjour intéressant de par la découverte des habitudes des nomades. C’était un
monde à part, ils n’avaient aucun lien avec les gens des villes et villages
sauf pour le commerce. Ils n’en parlaient pas, mais ils avaient une forte
animosité pour la muttawa qui leur occasionnait beaucoup de problème du fait de
leurs moeurs et coutumes de vie. Le neveu de la villa était le chef de la muttawa
emmagasinant beaucoup de pouvoirs entre ses mains dont il abusait et recevait
en retour une haine féroce. ZOHRA se dit que c’était peut- être une
ouverture ? ABDERAMANE en parla au chef des nomades, en tant que femmes
elle n’aurait pas eu le crédit attendu, qui n’était pas contre une expédition
punitive contre le caïd de la muttawa qui l’empêchait de se rendre à MEDINE. Un
plan fut discuté avec le chef bédouin. Le caïd ne se méfiera pas des nomades
qui abriteront ABDERAMANES et ZOHRA. A cent mètres maximum, l’arbalète armée
d’un trait explosif qui sera lancé sur la garde extérieure, rechargée,
l’arbalète par la brèche ouverte dans le mur fera exploser la villa. Le plan
fut exécuté comme sur le papier, les bédouins n’ont pas été les derniers à
tirer sur les gardes. Arrivés à proximité de la villa en caravane prête à
partir, les gardes de la villa ne s’en préoccupèrent pas habitués à leurs
déplacements. Montés sur des chameaux, ZOHRA et ABDERAMANE le visage enturbanné
de bleu était anonyme. L’arbalète cachée
entre la bosse de l’animal et son cou détendit son ressort sur un geste de
ZOHRA, la flèche atteignit la garde extérieure et le mur par une explosion
nettoyant l’environnement Une autre flèche vite rechargée sur l’arbalète frappa
la villa, ce fut l’enfer, flammes et destructions. Nettoyé, il restait deux
frères du neveu encore à s’occuper. Le colonel était satisfait du résultat,
mais conseilla à ZOHRA et ABDERAMANE d’être très prudents, ils devaient en être
au stade de rechercher les cloportes dans les tapis.
Les deux derniers
frères habitaient aussi une villa différente, la disparition de leur frère
avait été un rude coup ainsi qu’à l’organisation de la muttawa. Ceux-ci
s’étaient volatilisés, plus de traces, rien, de la fumée, évanouis dans le
brouillard. ZOHRA et ABDERAMANE durant une semaine remuèrent ciel et terre sans
succès. Ils avaient été bernés ! Un bruit courait sur la possibilité d’un
refuge à JUBAIL Le port de JUBAIL offrait des perspectives d’évasions dans ce
qu’était devenu le petit port de pêcheurs. C’était aujourd’hui sur une
superficie de soixante -quinze hectares une ville industrielle et commerciale
moderne dénommée MADINAT AL JUBAY AS SINA IYAH, ( JUBAIL INDUSTRIEL CITY). Il était l’un des ports de l’ARABIE SAOUDITE
les plus importants, chimie, engrais, sidérurgie, port industriel et
d’industries diverses. Défendu par une base navale importante de la marine
royale saoudienne avec une base aérienne de la Royal Saoudi Air Force. Rendons
à César ce qui est à César la misère est endémique au Royaume, mais l’ensemble
abrite la plus grande compagnie pétrochimique du Moyen Orient et au niveau
mondial elle se place à la quatrième place ABDERAMANE souffla à ZOHRA que
JUBAIL abritait également La SABIC l’une des plus grandes usines au monde de
dessalement d’eau de mer appartenant à la compagnie MARAFIQ, elle fournit
cinquante pour cent de l’eau douce du pays. Arrivés à JUBAIL ils se mirent à la
recherche du bateau de plaisance des deux frères. Ils le trouvèrent amarré sur
le quai destiné aux bateaux de plaisance. C’était un bateau confortable de
trente- mètre de long à moteur au nom de : JOUJ JEMOULA, des DEUX
CHAMELLES. En plus de l’équipage, une armée de gardes du corps hantait les
espaces. Ils passèrent de nombreux jours à observer Ils allaient sans doute
bientôt lever l’ancre, car des provisions arrivaient sans cesse passées au
crible. Les deux frères étaient invisibles gardés par une armée de nervis payés
à prix d’or. Il n’y avait pas de femmes à bord, tant mieux, il n’y aurait pas
de débordement. Le jour J approchait, un camion- citerne de fioul s’approcha et
le chauffeur aidé par un matelot remplit le réservoir du bateau. L’ambiance
était morose, la joie ne se reflétait pas sur les visages pour le voyage
envisagé. Le golfe persique débouchera sur l’océan indien, il y aura de
l’espace. Le capitaine du navire avait fait et refait le point, s’éloigner au
plus vite de JUBAIL trop d’interrogations et de soucis hantaient les esprits,
la peur aussi. C’était une échappatoire, une fuite, mettre de la distance entre
l’ARABIE SAOUDITE et les derniers membres de la famille xxxxxxxxxxxxxxxxxxx
encore vivants. La mer était le seul espace encore garanti pour un refuge et
fuir suffisamment loin. D’autant qu’ils ne savaient toujours pas, qui voulait
la destruction de la famille. Cette interrogation alimentait la peur, elle
disparaitrait que lorsqu’ils sortirent du golfe. ABDERAMANE et ZOHRA étaient
toujours assis au bout du môle à surveiller JOUJ JEMOULA. L’heure était venue,
le grand bateau de plaisance s’éloigna du quai en se dirigeant tout doucement
vers la sortie du port. ZOHRA déplia son arbalète, fixa un trait explosif et
attendit que le bateau sorte du port et s’engage sur la route du golfe. La
flèche zébra la nuit, atterrit sur la coque du JOUJ JEMOULA provoquant une
énorme explosion. C’était fini, sans se presser ils revinrent vers le complexe
industriel sans être inquiété. Revenu à leur villa, ZOHRA appela le COLONEL et
lui fit part du succès de l’opération.
Ils étaient de plus en plus
surveillés par la muttawa, soupçonnés d’être à l’origine de l’attentat pour
leurs déplacements dans la région. Leur statut d’émissaire officiel du Royaume
du MAROC les empêchait d’être conduits aux bureaux de la muttawa, d’être
interrogés. Ils ne pouvaient pas faire un pas sans être suivis par l’un de
leurs sbires. L’ambassadeur se plaignit auprès des autorités saoudiennes du
sort réservé à leurs ressortissants.
Le décès de tous les membres de la
famille xxxxxxxxxxxxxxxxx mettait un terme à leurs trafics financiers, le temps
viendra pour se partager l’héritage, ce sera un long parcours, les lois de
l’ARABIE SAOUDITE ne sont pas construites sur l’égalité, la justice. Il était
temps de reprendre le chemin du MAROC, accompagné de LEILA munie
exceptionnellement d’un passeport diplomatique. ZOHRA avait demandé de rester
avec des vêtements saoudiens. Elle avait remarqué un individu dans l’avion qui
semblait trop attentionné à leurs faits et gestes. La muttawa n’avait pas dit
son dernier mot. Après un long vol, l’avion atterrit à RABAT. Sur ordre du
Colonel, ils se dirigèrent vers le ministère des affaires Etrangères. Reçus par
le Secrétaire d’Etat qui voulait les recevoir, ils furent complimentés pour
leur travail, le MAROC leur en serait reconnaissant. ZOHRA l’informa de l’homme de la muttawa qui
les suivait partout. Faut-il le rapatrier ou je m’en occupe monsieur le
Secrétaire d’Etat ? Faites de votre mieux Capitaine. C’était très clair pas de
complication, suppression. Tous les trois étaient heureux de se retrouver chez
eux loin d’une dictature religieuse de fait, de la misère, des crimes commis au
nom de l’Etat. LEILA malgré la fatigue reprit le train pour TANGER, ZOHRA
l’avait convaincu qu’il y avait une vie après ce qu’elle avait subi. Le
chirurgien lui donnerait à nouveau une virginité. ZOHRA lui souhaita bonne
chance, bien entendu, ABDERAMANE n’était au courant de rien.
Il se dirigèrent vers
le chantier du nouveau pont sur le BOUREGREG, un ouvrage colossal entrepris par
la CHINE. Le sbire de la muttawa avait compris, et avait fait demi-tour pour
mieux les suivre les jours d’après. Ils ne rentrèrent pas à la Boutique, ils
réservèrent une chambre à l’hôtel de RABAT. Ainsi ils l’auront toujours à l’œil
et il ne connaîtra pas l’adresse de la Boutique. C’est toujours le jeu du chat
et de la souris, le jeu de cache-cache. Elle prit une bonne douche, déplia son
petit tapis et fit sa prière, demanda à ALLAH de lui pardonner les crimes
commis sur ordre et dans l’intérêt de son pays. Elle déplia le recueil de
poésie de Wafaa LAMRANI, lut une dizaine de pages et s’endormit. Elle eut un
sommeil agité, sa mission en ARABIE SAOUDITE n’avait pas été facile l’obligeant
à employer une extrême violence, éliminer une famille tout entière tout en
respectant les femmes et les enfants. Elle eut des cauchemars, elle se retourna
de droite à gauche, se réveilla. Calmée elle se rendormit jusqu’au matin.
Onze jours plus tard,
capitaine, la gendarmerie venait d’arrêter Ali BENKRAME le plus gros trafiquant
de drogues du MAROC, il régnait sans partage sur ce trafic avec des
ramifications en Espagne grâce à des complicités à tous les niveaux. Son
arrestation n’a pas mis fin à son réseau tenu par ses lieutenants et une bande
de loustics malfaisants. Faites attention, car ce sont des professionnels du
crime. TANGER, le Colonel lui avait fourni un renseignement capital. L’un de
ses revendeurs les plus influents Adam BENKRICH dit la VALISE opérait quartier
de la gare ONCF. Elle avait reçu le soutien d’ABDERAMANE. Habillée d’une burka
et ABDERAMANE en employé de la commune balayait les caniveaux. Sur un petit
tréteau devant la sortie de la gare, il vendait des cacahouettes, sous les
graines, de la résine de cannabis et de l’herbe. Commerce discret,
indiscernable. Il distribuait également la marchandise à d’autres revendeurs.
ABDERAMANE en avait repéré deux. Il suivit l’un d'eux qui s’installa devant la
gare des autobus. Ils choisissaient la foule, pour mieux se fondre parmi elle.
Revenu à la gare ONCF il balaya consciencieusement le caniveau. La VALISE avait
disparu, le balai d’ABDERAMANE avait été trop voyant. Celui de la gare des
autobus avait également disparu, il y avait donc un relais entre tous les
revendeurs de poison. Ils restèrent dans les environs une semaine pour
surveiller leur retour, sans succès. Ali
BENKRAME était natif d’un tout petit village de montagne proche de TETOUAN. Il
avait constitué son empire à partir de TETOUAN et de MELLILA, l’enclave
espagnole au nord du MAROC. Il était raisonnable de penser que tout le trafic
existant profitait à Ali BENKIRANE. ZOHRA et ABDERAMANE firent leurs bagages
pour TETOUAN. TETOUAN était en pleine transformation avec la construction d’un
port gigantesque qui sera le plus grand de la Méditerranée, drainant une
quantité d’ouvriers arrivés du MAROC et des pays d’EUROPE. C’était tout bonus
pour les trafiquants de drogues. ZOHRA et ABDERAMANE auront du pain sur la
planche !
Chacun de leur côté
ils arpentèrent les rues de la ville, jetant un coup d’œil par ici et par là,
observant avec attention la situation. ZOHRA avait l’impression d’avoir
découvert quelque chose, elle en parla à ABDERAMANE. Il se rendit seul sur le
port. Il observa avec attention un kiosque comme il y en a tant au MAROC. En
bois et en toiles, le petit établissement vendait des cigarettes, des
téléphones et des friandises, rien que de très banal. Quelque chose
l’intriguait lui aussi, certains individus repartaient avec de petits paquets,
rien à voir avec des téléphones portables, serait-ce une piste ? Ils revinrent
tous les deux à la fermeture du kiosque à une heure du matin. Salem Aleikoum,
ZOHRA entra à l’intérieur du kiosque, ABDERAMANE resta dehors
-Qu’est-ce que tu
vends krouya ?
-Tu veux un portable
mon frère ?
-Non, je veux mieux
que cela, je veux de l’herbe
-Je ne vends pas ce
produit, c’est interdit et cela coûte très cher si l’on se fait prendre
-Qu’est-ce que tu as
sous la planche ?
-Rien, des chiffons
-ZOHRA lui mis son
Glock dans les reins, et ça, c’est un chiffon ?
Il haussa la planche
sur lesquels s’alignaient les téléphones portables, des paquets tout prêts à
être vendus Elle en prit un, c’était de la résine de cannabis Elle en prit un
autre, l’ouvrit, c’était de l’herbe
-Tu appelles cela des
chiffons ?
Le bougre n’était
même pas désarçonné par les découvertes de ZOHRA. C’était un dur à cuire.
-Ecoutes lui suggéra
ZOHRA dis-nous qui est le caïd en remplacement d'Ali BENKIRANE.
-Je ne le connais pas,
il est invisible caché dans un village de la montagne.
-Fais un effort
krouya où je te troue la peau
-Par ALLAH je ne le
connais pas puis se ravisa, de toute façon, vous ne le trouverez pas. Nous
l’appelons El ALRAAEL, le BERGER il a des troupeaux de moutons dans la
montagne. Nous ne le connaissons pas, il vit loin des villes. Il s’effondra,
une aiguille du pistolet pneumatique de ZOHRA lui avait transpercé la tête. Il
fallait faire le ménage ! La méthode employée sera de liquider les
revendeurs pour faire venir LE BERGER jusqu’à eux. L’observation continua, un
autre revendeur fut repéré près de la mosquée. Une aiguille lui transperça le
cœur. Il n’y avait pas de débandade de la part de ces loustics à la suite des
suppressions radicales de leurs partenaires, mais une mise au vert momentanée
de ceux-ci, dictée vraisemblablement par le BERGER, ils avaient disparu,
s’étaient volatilisés. Une mise au vert soit, mais le trafic devait continuer,
le téléphone portable devait servir de relais avec des lieux choisis à l’avance
et différents à chaque fois. Il y avait donc un intermédiaire entre les
revendeurs de poisons et EL ALRAAEL. C’étaient des professionnels, ils devaient
changer à chaque fois de téléphone pour éviter que la police les repère. Ils
étaient organisés pour continuer leur trafic, la survie du réseau en dépendait.
Des coursiers avaient dû prévenir les consommateurs en les approchant.
Elle voulait connaître la
fabrication de la résine de cannabis. Un pharmacien, expliqua à ZOHRA sa
confection, (La résine de cannabis sera effritée et consommée à l’aide d’un
vaporisateur. Au MAROC, la plante est séchée puis la sève est récupérée,
ensuite passée au tamis. Elle est frappée avec des baguettes sur le feuillage.
La poudre de sève sera chauffée et compressée en blocs.) Il faut donc des
petits laboratoires pour confectionner le produit, d’où une gestion
professionnelle du réseau avec des spécialistes. C’était toute une équipe de professionnels
que le réseau a créé. Cette équipe était le nec plus utra de la bande de
voyous. Plusieurs problèmes se posaient à ZOHRA et ABDERAMANE, mettre la main
sur les laboratoires, dénicher les revendeurs et EL ALRAAEL Les revendeurs
reviendraient se poster dans des endroits stratégiques, il fallait
attendre ! Ils avaient le don de disparaître, de se cacher. Zohra avait un
atout en mains, le Colonel lui avait fait faire un stage de six mois dans un
institut de langue berbère à RABAT il y a plusieurs mois. Elle se demandait si
le Colonel n’avait pas le don d’ubiquité, de prémonition des évènements ?
Ainsi, elle parlait parfaitement et écrivait en plus de l’arabe, le berbère, le
français, l’espagnol, l’anglais et l’italien, c’était un sérieux patrimoine
linguistique. Elle pouvait dialoguer avec la population du RIF dans leur langue,
sans problème, ce n’était malheureusement pas le cas d’ABDERAMANE.
Depuis plus d’un mois, ils
attendaient le retour des revendeurs à la sauvette. Elle eut une information
sur un petit laboratoire qui se trouverait dans un village de montagne. C’était
risqué, chacun se connaissait dans les villages. Ils seraient de tout de suite
repérés. Zohra décida de se rendre seule dans le village. Elle loua une
Kawasaki pour une semaine, s’arma du Beretta d’ABDERAMANE et de son Glock 18.
Elle se coiffa de la perruque blonde qu’elle avait achetée en Espagne lors de
son enquête sur les maisons closes. Au village, elle fut entourée des soldats
du poison. Elle demanda de voir le chef du laboratoire. C’était en fait un
entrepôt en plein air jouxtant une maison en pierres de montagne. Une dizaine
de femmes s’occupaient du produit. Un grand gaillard barbu, s’exprimant en
berbère, l’air pas commode lui demanda ce qu’elle voulait. Mes commanditaires
ne souhaitant pas être connus, m’ont envoyé pour négocier avec vous dix
tablettes de résine de cannabis que je viendrais récupérer lorsque vous l’aurez
décidé.
-Dites- moi quand
vous voulez venir les chercher ?
-Il n’en est pas
question dit-elle d’un air assuré, c’est à vous à me dire le jour que vous
souhaitez
-Mercredi après-
midi.
Bien, je serais là
mercredi après -midi, elle sauta sur la Kawasaki et disparut.
Ouf, cela s’était
relativement bien passé. Elle enleva sa perruque et rentra à l’hôtel retrouver
ABDERAMANE rassuré. Le mercredi après-midi elle retourna au village la tête
recouverte de sa perruque et toujours armée des pistolets. Deux hommes en plus
avaient été placés par le Berger avisé elle se devait de faire très attention
de ne pas blesser ou tuer les femmes du laboratoire. Arrivée sur place, elle ne
laissa pas le temps aux voyous de réagir, des deux mains elle tira, les hommes
s’écroulèrent. Elle était ambidextre et tirait des deux mains avec précision,
ce qui avait étonné les instructeurs de l’école militaire. Les femmes hurlèrent
et s’enfuirent dans le village. Elle aspergea le laboratoire rapidement
d’essence et mit le feu, dans quelques instants il ne restera plus rien du
laboratoire et de la maison. Elle sauta sur la Kawasaki, se faufila dans le
village et disparue avant une riposte toujours possible des villageois. Elle
savait que ce n’était qu’un coup d’éclat, il y avait une dizaine de ces
laboratoires dans le RIF, si ce n’est plus, EL ALRAAEL en ferait une jaunisse.
Le problème maintenant c’était celui de leur sécurité, EL ALRAAEL allait leur
faire payer au prix fort. Ils devaient se méfier à chaque instant, la mort
pouvait survenir. Ils sortaient toujours armés et s’asseyaient dans des
endroits et terrasses de cafés découverts. Un matin ABDERAMANE dit à ZOHRA,
j’ai déjà vu cette Nissan noire hier soir, je la revois ce matin, mais
accompagnée par quatre hommes. Bien, dit ZOHRA nous allons sortir par la porte
de service. L’hôtel faisait un angle avec une autre rue, chacun de nous
essaiera de les prendre à revers, ne ratons pas notre coup. Elle arriva
habillée d’une burka elle s’approcha d’eux sans se presser, à deux mètres elle
envoya ses aiguilles dans le crâne des deux assassins, pour ABDERAMANE, le
silencieux de son Beretta amortit le bruit des projectiles. Les deux autres
assassins s’écroulèrent, la foule s’amassait devant les quatre cadavres, la
police ne tarderait pas à arriver. Noyés dans la foule, ils s’éclipsèrent. Il
fallait changer d’hôtel et vite, TETOUAN n’en était pas dépourvu ! Un nouvel hôtel, un nouveau quartier,
mais très vite ils s’aperçurent qu’ils avaient été pistés, normal, pour des
professionnels du crime. Les enfants sont les meilleurs pisteurs des criminels,
tout était à rejouer ! Dans sa chambre à coucher, ZOHRA entendit un bruit
bizarre sur le palier, elle réveilla ABDERAMANE, tous les deux s’armèrent. Tout
contre le mur du fond, ils entendirent la serrure tourner, c’était bien pour
eux. Les chambres étaient dans le noir les assassins connaissaient le périmètre
ils tirèrent à répétition sur le lit, ZOHRA d’un seul coup alluma la lumière et
tira immédiatement sur les deux malfrats éblouis, ils sombrèrent dans le néant.
Il fallait fuir, les silencieux n’avaient pas occasionné de bruits. Ils
montèrent sur la terrasse et avisèrent l’environnement, un petit immeuble
jouxtait le mur de l’hôtel à trois mètres plus bas. ZOHRA et ABDERAMANE se
laissèrent tomber sur la terrasse de l’immeuble et redescendirent par
l’ascenseur jusque sur la rue. Là ils prirent le temps de surveiller
l’environnement, ils n’étaient pas convaincus qu’il n’y avait plus personne qui
les recherchait. Au moment où ils sortirent de l’immeuble, ils furent la cible
de tirs d’automatiques, banco, ils avaient joué à la loterie de la vie et de la
mort. Ils s’abritèrent derrière une automobile et repérèrent le tireur qui
heureusement n’était pas très précis. Il se trouvait dans l’encoignure de la
porte du garage d’à côté. Impossible de se dégager de ce foutoir l’homme tirait
mal, mais il finirait par avoir leur peau. Les projectiles perçaient la tôle de
la voiture sans traverser l’intérieur. L’envoyé d’EL ALRAAEL mettait du cœur à
son ouvrage en acculant ainsi ZOHRA et ABDERAMANE derrière le véhicule. ZOHRA
comptait sur la fin de ses réserves de munitions, il ne pouvait pas asperger
indéfiniment la pauvre Fiat qui ne lui avait rien demandé, surtout sans dommage
pour ses adversaires. Il était déterminé à en finir avec ZOHRA et ABDERAMANE,
ce fut son erreur, il sortit de son encoignure, il fut cueilli par ABDERAMANE
au thorax, ils prirent la fuite. Le taxi les amena jusqu’au port, après une
discussion en Berbère avec le chauffeur, elle eut une adresse. Une rue du port,
une maison parfaitement anonyme et un couple pas trop regardant contre un petit
paquet de dirhams étaient une garantie provisoire contre EL ALRAAEL. ABDERAMANE
ne sortait plus, trop voyant, mais fort enragé de ne pouvoir suivre ZOHRA
toujours armée, revêtue d’une burka qui se promenait tranquillement sur le port
et dans la Médina. Elle repéra enfin un revendeur dans la Médina, assis sur un
caisson en plastique très bas, il jouait les handicapés, il récoltait les dons
des fidèles et vendait de l’herbe aux consommateurs, c’était révoltant !
Elle avait bien observé le manège du triste sire. Elle s’avança et demanda un
renseignement, sorti le pistolet pneumatique et tira sans bruit, le voyou s’effondra
en silence la tête en avant toujours assis sur son caisson plastique. Elle
continua son chemin comme si de rien n’était, elle se dirigea vers la moquée,
elle ne s’était pas trompée, un autre sans honte officiait presque à la porte
du lieu sacré. Elle mit la main dans son sac, saisit le pistolet pneumatique et
balança une aiguille de trois millimètres de diamètre dans le crâne du malfrat.
Les fidèles essayèrent de le ranimer, en vain. Elle se dirigeait maintenant sur
le port en pleine transformation, celui-ci sera prochainement le plus grand
port de la Méditerranée. Sa construction donnait lieu à un brassage de peuple
différent et par conséquent aux trafics de toutes sortes. Elle était rodée à
leur cinéma, elle était capable de les repérer. Sur le mur en béton qui
surplombait le port de plaisance à raz du trottoir, ils étaient deux cette
fois-ci, les ports étant depuis toujours des lieux dangereux. Sur un linge ils
avaient étalé des portables, des cigarettes, à terre une boîte en carton
recelait les produits illicites. Elle passa devant eux, descendit les marches
de l’escalier, puis remonta de quelques marches. Les voyous occupés à leur
commerce ne virent pas l’évènement venir. ZOHRA le pistolet pneumatique à la
main à hauteur de hanche tira deux fois, les deux malfrats ne revirent jamais
le jour. Elle rentra dans la maison, ABDERAMANE était comme un lion en cage, il
fut soulagé de revoir son officier. Elle lui communiqua qu’elle avait éliminé
quatre revendeurs, très peu par rapport à l’importance du trafic. Demain sera
difficile, ils auront tous les nervis de la filière de la drogue sur le dos. EL
ALRAAEL sera forcé de réagir, si c’est le cas, ils auront réussi leur
opération. Le lendemain, ABDERAMANE
resta de nouveau dans la maison, ZOHRA habillée de sa burka se promena dans le
quartier comme la veille. Elle devait faire attention aux pièges du BERGER,
d’autant qu’ABDERAMANE n’était plus en couverture. Elle remarqua au même
endroit que la veille un revendeur, trop beau pour être vrai, un pion poussé
par le BERGER pour l’attirer. Elle passa devant incognito. Pour le moment elle
était invisible sous la burka, les seules descriptions que l’on avait d’elle,
provenaient de sa première visite au laboratoire de montagne. Tout à -côté du
revendeur bidon, une voiture avec quatre hommes. Ce serait un suicide de tenter
quoi que ce soit ! Elle retourna à la maison et expliqua la situation à
ABDERAMANE. Nous ne connaissons pas EL ALRAAEL, était-il dans le véhicule, cela
semblait impensable de la part d’un chef tel que LE BERGER, il était ailleurs,
tout prêt sans doute, à une intervention. ABDERAMANE fit une liste de produits
pour confectionner un explosif artisanal de faible puissance. Elle repassa sa
burka et acheta du fioul, de l’engrais et de la lessive, ABDERAMANE se mit au
travail, trois heures plus tard, il avait confectionné un explosif artisanal
capable de liquider l’automobile et ses locataires ainsi que le vendeur de
drogues et ses produits. C’est encore ZOHRA qui sortit avec sa petite boîte,
ABDERAMANE n’était pas tranquille. Elle marcha tranquillement, arrivée devant
l’automobile, elle se recula suffisamment pour ne pas être touchée par
l’explosion. Elle jeta la boîte sous la voiture celle-ci sauta en l’air, se
disloqua puis s’enflamma. Il ne restait plus rien, elle sentit le souffle de
l'explosion, elle disparut comme si de rien n’était au contraire de la foule
étonnée et amassée. Quelque chose lui
disait qu’EL ALRAAEL était toujours vivant et qu’ils seraient appelés à se
rencontrer. ABDERAMANE ne voulait plus rester seul.
La situation devenait critique, Le
BERGER avait été touché et humilié, il ne le pardonnerait pas, son empire
s’écroulait sous les coups de ZOHRA et ABDERAMANE mais aussi de concurrents qui
commençaient à avoir les dents longues en grignotant de nombreux territoires.
Qui était LE BERGER ? Tout dépendait de sa visibilité, de son habitat.
Pour le moment c’était lui qui avait la donne, d’où la prudence redoublée de
ZOHRA et ABDERAMANE. Elle décida de
sortir sans la burka, sans foulard, la jupe mi- mollets, les cheveux sur le
dos, un corsage très légèrement échancré, ses vêtements étaient provocateurs,
le loup sortirait il du bois ? Attablés à la terrasse d’un café avec
ABDERAMANE, ils attendaient à l’affût. Il fallait s’armer d’une patience
infinie, dans le jeu du chat et de la souris ce n’était pas toujours le chat
qui gagnait. Leurs armes, le silencieux vissé au canon étaient dans le sac de
ZOHRA et à l’intérieur de la veste d’ABDERAMANE. Un geste, une grande habitude
et les armes crachaient le feu ! Leurs consommations réglées, ils se
levèrent et se dirigèrent vers la mosquée. Ils prirent la ruelle le long de la
mosquée avec beaucoup de prudence. Au moment où ils débouchèrent sur le
boulevard, un homme de taille moyenne, une légère calvitie, l’automatique à la
main venait vers eux, c’était EL ALRAAEL vindicatif, les lèvres fermées. Il
allait faire usage de son automatique mais ABDERAMANE fut le plus rapide, EL
ALRAAEL s’écroula sur place. Il fallait fuir hors du boulevard, ils se
dégagèrent de la foule curieuse qui s’attroupait. Mission accomplie, le Colonel
avisé, ils quittèrent rapidement le RIF, heureux d’avoir réussis !
De retour à la Boutique, ZOHRA comme
à ses habitudes reprit l’entraînement, les allées et venues dans le SEBOU,
crawl, brasse, de courir le long de la berge et de retour à la Boutique,
combats rapprochés avec le maître d’armes. Les après-midis consacrés à la
lecture, les poésies d’auteurs marocains, le repos. Elle eut une communication
du patron de l’Israeli Connection, Omar HSSAIN avait été repéré et gardé à vue.
En accord avec le colonel, elle s’entoura d’IBRAHIM et d’ABDERAMANE et demanda
une escorte de policiers. En arrivant DAR EL GUEDDARI dans le garage d’Ethan
ALAOUI, ils trouvèrent OMAR HSSAIN, les mains derrière le dos menottées, les
jambes également ficelées pour éviter les escapades. Avec lui, le tueur,
déserteur de DAKLA également ligoté. ZOHRA invita le patron de la mafia juive à
venir avec elle jusqu’à la forêt qui court jusqu’à SIDI YAHYA. Arrivé à une
clairière, les deux prisonniers furent descendus de l’automobile. IBRAHIM
fusilla le déserteur d’une balle dans la tête et récidiva avec OMAR. Nous avons
fait justice, sa Majesté le Roi pourra dès ce soir dormir sur ses deux
oreilles. Au moment où les membres de l’Isréli Connection voulait rentrer la
police les arrêtèrent sur le champ en leur passant les menottes.
-Vous êtes une belle
garce de nous avoir joué ce tour de cochon
-Je vous remercie
d’avoir rajouté cette épithète, je n’ai fait que suivre notre accord, vous
faisiez ce que vous vouliez tant qu’OMAR était libre, dès son arrestation, la
police retrouvait tous ses droits, c’est ce qui a été fait. Je ne vous ai pas
trahi.
-Je vous garde un
chien de ma chienne, nous nous retrouverons.
Dès que la police eut
amené au commissariat le patron de la mafia juive et ses quatre soldats,
IBRAHIM et ABDERAMANE, roulèrent le corps d’OMAR dans une toile et le mirent
dans le coffre de la voiture. IBRAHIM roula sous la conduite de ZOHRA jusqu’à
une casse importante située dans la nature. Arrivé devant le portal, un coup
d’avertisseur suffit pour que Malek FARHAT ouvre les portes. Une fois à
l’intérieur, ABDERAMANE aspergea le corps d’OMAR et l’intérieur du véhicule
d’essence, une allumette suffit pour allumer le feu. Ils restèrent sur place
pour assister à l’avancement de la crémation. Quand il ne resta plus que des
cendres, MALEK mis son engin en route, l’automobile fut happée, écrasée comme
un vulgaire pot de yaourt et réduit en quelques secondes en un cube de
ferraille d’un mètre de côté. C’était terminé, personne ne viendrait s’incliner
sur la dépouille d’OMAR. Cette presse venait d’Italie, construite par la
société PROJAC, un véritable bijou de technicité. Il était l’heure de se dire
au-revoir, MALEK s’approcha, ZOHRA le fusilla de son GLOCK, aucun témoin. Ils
reprirent la route de la boutique.
J’informe
mes aimables et chers lecteurs que tous les patronymes arabes, juifs et autres
qu’ils trouveront dans ce tome ont été choisis au hasard dans les listes de
noms d’Internet. Tout homonyme ne serait que le fruit de pure coïncidence. AG
Références
Google, traductions
WIKIPEDIA, régiments
d’artilleries du MAROC
WIKIPEDIA, renseignements généraux au MAROC
WIKIPEDIA, les iles PURPURA
Wikipédia, la ville de DARKLA
Wikipédia, la mafia juive dans le monde
Wikipédia, lance grenades
Le Journal des femmes, cuisine israelienne
Wikipédia, coiffure israelite, kippa
Wikipédia, cuisine israelienne, böreks
Wikipédia, ville sainte de CHEFCHAOEUN
L’oued SOUSS Wikipédia
Sidi BOUKNADEL, Aujourd’hui
Armurerie Jean-Pierre FUSIL
www.ladépeche.fr,
Fashion wee
Wikipédia Jubail
Vaporisateurs.cannabis.fr
Wikipédia, explosifs
www
youtube.com<watch-presse à ferraille
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