Des trous noirs sont-ils des étoiles à neutrons transformées par la matière noire ?

ACTUALITÉClassé sous :TROU NOIR , MATIÈRE NOIRE , ONDES GRAVITATIONNELLES Lire la bio Laurent Sacco Journaliste Publié le 09/03/2021 Des trous noirs de une à quelques masses solaires ne devraient pas exister en tant que produit de l'évolution stellaire. Mais Ligo et Virgo en ont déjà détecté un, semble-t-il, ce qui suggère qu'ils sont nombreux. Une façon d'expliquer leur existence fait intervenir la capture de matière noire par des étoiles à neutrons. Un test de cette théorie serait possible. Vous aimez nos Actualités ? Inscrivez-vous à la lettre d'information La quotidienne pour recevoir nos toutes dernières Actualités une fois par jour. Cela vous intéressera aussi [EN VIDÉO] Interview : comment mesurer les ondes gravitationnelles ? Les ondes gravitationnelles sont des déformations de l’espace-temps prédites par Einstein. Il serait possible de les mesurer avec des outils appropriés. L’éditeur littéraire Dunod a interviewé Pierre Binétruy, professeur au laboratoire Astroparticule et Cosmologie de l'université Paris Diderot, afin d’en savoir plus sur ces mystérieuses ondes et sur la façon dont on pourrait les détecter. Les étoiles de masses inférieures à 8-10 masses solaires sont destinées à finir leur vie sous forme de naines blanches se refroidissant lentement au point de cristalliser. Alors certes, il existe une masse limite découverte au début des années 1930 par le prix Nobel de physique Subrahmanyan Chandrasekhar de l'ordre de 1,4 masse solaire, mais on a de bonnes raisons de penser qu'avant de devenir des naines blanches, ces étoiles vont perdre une large partie de leur masse sous forme de vents stellaires alors qu'elles seront devenues des géantes rouges. Au-delà de 10 masses solaires, les étoiles finiront par épuiser leur carburant thermonucléaire et quand la pression du flux de photons produit par les réactions de fusion chutera brutalement, elles s'effondreront gravitationnellement. On pense que dans la majorité des cas, il se produira une supernova de type SN II. Si la perte de masse en raison là aussi de vents stellaires et surtout de l'explosion a été suffisante, le cœur de l'étoile en effondrement deviendra une étoile à neutrons. Mais, dans le cas contraire, même ce cœur ultra-dense ne pourra pas supporter la force de pression de la gravitation et il s'effondrera en donnant un trou noir dit stellaire. Comme dans le cas des naines blanches, il existe une masse limite découlant des propriétés quantiques et relativistes de la matière. Il existe cependant des incertitudes sur cette masse limite car pour la calculer proprement, il faudrait connaître l'effet précis des forces nucléaires entre nucléons découlant de leur structure en quarks et des équations non linéaires, donc particulièrement difficile à résoudre de la QCD. On sait que cette masse limite ne peut être supérieure à 6 masses solaires mais les déterminations des masses des étoiles à neutrons connues, souvent des pulsars, indiquent que généralement ces astres compacts ont des masses comprises entre une et deux masses solaires avec une moyenne qui est, là aussi, de l'ordre de 1,4 masse solaire. Le mystère subsiste à ce jour. Les trous noirs sont parmi les objets les plus opaques de l'Univers. Heureusement, ils sont cependant parmi les plus attractifs, et c'est par leur pouvoir d'attraction démesuré que nous pouvons les détecter. Les trous noirs géants sont les ogres les plus monstrueux du zoo cosmique, mais ils ne sont pas des armes de destruction massive. Les jets de matière qu'ils produisent auraient contribué à allumer les premières étoiles et à former les premières galaxies. Hubert Reeves et Jean-Pierre Luminet, spécialistes en cosmologie contemporaine, répondent à toutes vos questions. Pour en savoir plus, visitez le site Du Big bang au vivant. © Groupe ECP, YouTube Des trous noirs « solaires » ? Pour des étoiles contenant au moins 30 masses solaires il est généralement admis qu'elles deviendront des trous noirs mais là aussi des processus de pertes de masse feront que celle de l'objet résultant sera inférieure à celle de l'étoile génitrice. On a cherché à faire des simulations numériques de la formation de ces trous noirs stellaires et, bien évidemment, des observations les ont accompagnées au moyen de l'astronomie des rayons X. Il en est ressorti que les trous noirs stellaires ont des masses d'au moins six fois celle du Soleil et rarement au-dessus de 10 masses solaires. Toutefois, rien n'empêche des trous noirs stellaires de grossir en accrétant de la masse d'une étoile compagne massive lorsqu'ils sont dans un système binaire. On a malgré tout été surpris par les masses déterminées au moyen des émissions d'ondes gravitationnelles accompagnant les fusions de trous noirs découvertes avec les détecteurs Ligo et Virgo, puisqu'elles étaient de quelques dizaines de masses solaires au moins par trou noir. L'astronomie gravitationnelle avec ces instruments a, à l'inverse, découvert un trou noir « solaire » dont la masse semblait être avant sa fusion avec son compagnon de 2,6 masses solaires seulement. C’est en tout cas ce que nous disent les analyses de la source GW190814. Il pourrait s'agir d'une étoile à neutrons mais là aussi, comme on l'a expliqué précédemment, ce serait du jamais-vu. Supposons que les objets compacts de moins de 5 masses solaires et de plus de 20 masses solaires (ce qui était le cas pour la première source d'ondes gravitationnelles détectée avec Ligo, GW150914), hors trous noirs supermassifs, soient bel et bien des trous noirs. Il a été suggéré qu'ils soient en fait des trous noirs primordiaux produits pendant le Big Bang, au moment où la densité de matière était si élevée que des fluctuations pouvaient conduire à des surdensités entraînant un effondrement de cette matière. On peut montrer qu'un spectre de masses différentes en découlait bien pour les régions effondrées devenues des trous noirs. Cela a conduit certains à penser, depuis longtemps, qu'une partie voire toute la matière noire était en fait constituée de trous noirs primordiaux. Des trous noirs primordiaux de masse sublunaire ? Toutefois, si ce scénario est encore possible, il est devenu de plus en plus contraint depuis deux décennies et certains intervalles de masses sont fortement défavorisés, voire exclus. Toujours est-il qu'une équipe de chercheurs du Kavli Institute for the Physics and Mathematics of the Universe à Tokyo vient de mobiliser cette hypothèse dans un cadre plus général faisant intervenir des particules de matière noire qui ne sont pas forcément des minitrous noirs primordiaux, comme on peut le voir avec une publication dans Physical Review Letters que l'on peut consulter en accès libre sur arXiv. L'idée est la suivante. On peut certes penser que le trou noir de masse presque solaire détecté avec GW190814 soit directement un trou noir primordial mais on peut aussi en générer un avec des masses de cet ordre en imaginant une étoile à neutrons ayant avalé une certaine quantité de particules de matière noire, voire justement des minitrous noirs primordiaux dont les masses seraient inférieures à celle de la Lune. Déstabilisée une fois un certain seuil de masse dépassé, l'étoile à neutrons s'effondrerait en donnant directement un trou noir. L'apport de ce scénario, qui en fait l'intérêt, est que selon les chercheurs une fois que l'on aura déterminé la distribution des trous noirs « solaires » au moyen de Ligo, Virgo et leurs cousins comme Kagra, cette distribution n'aura pas la même forme selon que ces trous noirs sont le produit d'étoiles à neutrons, qui s'effondrent après capture de matière noire ou de trous noirs primordiaux, ou que ces trous noirs solaires soient directement des trous noirs primordiaux, voire malgré tout le produit de l'effondrement d'étoiles selon des processus encore mal compris. En effet, selon les astrophysiciens, la distribution de masse des trous noirs solaires sera dans le premier cas très proche de celle des étoiles à neutrons génitrices. Intéressé par ce que vous venez de lire ?

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