Les voyages d'Émilie Tiré du recueil de nouvelles érotiques de Paul Edouard GOETTMANN
Les voyages
d'Émilie
Tiré du recueil de nouvelles érotiques
de Paul Edouard GOETTMANN
de Paul Edouard GOETTMANN
(Proposé par ALI)
Tante
Émilie était encore une belle femme, la soixantaine passée. Elle passait son
temps entre son petit appartement coquet de la banlieue parisienne, des fleurs
aux fenêtres et à l'association des vieux du quartier où elle prenait une place
non négligeable. Ses responsabilités se résumaient dans l'organisation des
festivités régulières et de l'activité journalière. Ainsi, son quotidien lui évitait
de s'ennuyer.
Veuve
depuis 15 années déjà, elle était la tata des enfants de son frère. À chaque
vacances elle s'en occupait, les bichonnait en organisant des jeux, des
promenades et en confectionnant des pâtisseries au chocolat. C'était immuable,
les vacances c'étaient chez tata et la famille ne se demandait pas si cela lui
faisait plaisir, c'était ainsi ! Tante Émilie pourtant aurait souhaité
quelques fois changer de vie, de retrouver de la tendresse, une épaule pour se
caler… C'était arriver une fois. La famille avait alors poussé des cris et des
remontrances en affirmant que ce n'était pas digne d’elle ! À croire que
l'on n’a pas le droit de refaire sa vie ! Les enfants sont égoïstes et
refusent de comprendre les parents.
Elle
songeait aux plages de sables blancs de cette Guadeloupe qu'elle fréquentait
assidûment un mois par an depuis maintenant cinq ans. Un mois par an ou Émilie
se retrouvait telle qu'elle était. Elle choisissait le mois de mars, c'était
moins cher. Dès le matin en maillot de bains, le midi un ti-punch sirop, un
blaff ou un colombo pour passer un bon après midi avec une petite sieste
jusqu'à seize heures puis retour à la plage à sa place préférée, sous un
cocotier ombrageux.
L'avion
n'allait pas tarder à atterrir sur la grande piste de Pointe à Pitre. L'âme et
le cœur réjoui, Jeannine savait que Wobè (Robert) l'attendait avec sa
camionnette rouillée pour la transporter jusqu'à sa case au milieu de la forêt
en Côte sous le vent.
La
Guadeloupe avait joué un rôle important, désinhibiteur même dans la vie
d’Émilie, là, elle vivait à nouveau sans entrave et sans honte ! Elle
retrouvait la joie de l'amour, de la passion à la fortune des vents avant de
rejoindre à nouveau sa petite vie de banlieue.
Wobè
avait su par sa gentillesse tout au début, conquérir son corps qui ne demandait
qu'à céder aux entrelacs du créole. Depuis, chaque année, elle cédait aux
charmes des ti-mal, se laissant aller aux rythmes tropicaux, aux collés serrés,
aux phrases toutes faites et évocatrices… Elle n'en n’avait cure, elle vivait
sa vie. Il n'y avait pas de sentiments, pas d'amour et elle s'en moquait. Il y
avait juste le besoin de revivre, de redonner à son corps une jeunesse qui
foutait le camp et qui se rangeait sagement à son retour dans l'armoire dans
son appartement de banlieue, simplement pour faire plaisir aux enfants.
Elle
était heureuse Émilie lorsqu’elle venait en Guadeloupe, elle n'était pas seule,
elle côtoyait plusieurs femmes de même âge qui se laissaient glisser sur le
chemin du plaisir. La soirée passée avec de jeunes garçons leurs donnaient
l'impression d'être encore jeunes et belles. Belles, certaines l'étaient
encore, mais toutes glissaient dans la poche du jeans un billet de cinquante
euros. Oh, ils ne demandaient rien, c'était normal pour ces dames, à leurs
âges, l'amour se paye !
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