Pour Alstom, la prise du ferroviaire de Bombardier ferait sens
Pour Alstom, la prise du ferroviaire de Bombardier ferait sens
OLIVIER COGNASSE Proposé par Ali GADARITRANSPORTS , TRANSPORT , ALSTOM , BOMBARDIERANALYSE Contrairement à une fusion avec Siemens, qui aurait donné lieu à une prise de pouvoir de l’industriel germanique, avec le rachat de Bombardier transport, c’est le constructeur français Alstom qui reprendrait la main.
Le 6 février 2019, à 11 heures 55, Margrethe Vestager annonçait que l’Europe refusait la fusion entre Alstom et son concurrent allemand Siemens. "La Commission a interdit la concentration parce que les entreprises n’étaient pas disposées à remédier aux importants problèmes de concurrence que nous avons relevés", justifiait la commissaire européenne à la Concurrence. Quelques semaines plus tard, dans une interview à l’Usine Nouvelle (à retrouver ci-dessous), Henri Poupart-Lafarge, le patron d’Alstom, assurait
disposer d’une trésorerie de 2,6 milliards d’euros : "Cet argent nous permet d’envisager des acquisitions ciblées pour compléter nos gammes de technologies, ou ponctuellement sur un marché donné, avait-il indiqué. Je pense à des entreprises spécialisées."
Faire face à la concurrence des Asiatiques
Ces derniers jours, notre confrère Bloomberg annonçait qu’Alstom était en discussions depuis plusieurs mois et pourrait reprendre les activités ferroviaires de Bombardier en grandes difficultés financières. Des discussions avaient déjà eu lieu il y a au moins trois ans, avant le projet de fusion franco-allemande. Le rapprochement avec Siemens, annoncé comme une fusion d’égal à égal, était en réalité une prise de pouvoir de l’industriel germanique, le groupe dans son ensemble étant environ dix fois plus important qu’Alstom. Avec le rachat de Bombardier transport, c’est le constructeur français qui reprendrait la main. Toujours dans l’optique d’une consolidation du secteur pour faire face à l’éventuelle concurrence en Europe du chinois CRRC et du japonais Hitachi, qui a déjà racheté l’italien Ansaldo, dont il détient 100% du capital depuis janvier 2019.
Des partenaires de longue date
Si Alstom a réalisé 8,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires au cours de l’exercice 2018/19, le prochain sera sans doute marqué par une croissance significative, alors que le carnet de commandes battait un nouveau record fin décembre 2019 pour atteindre 42 milliards d’euros. Les activités ferroviaires de Bombardier représentent pour 2019 un chiffre d’affaires de 7,5 milliards d’euros avec un carnet de commandes légèrement supérieur à 32 milliards d’euros. Au Canada, la presse s’inquiète déjà d’une nouvelle perte d’activités pour Bombardier et demande au gouvernement québécois de ne plus injecter d’argent si cette rumeur devenait réalité.
Si les syndicats craignent un tel rapprochement pour l’emploi, il faut rappeler que les deux entreprises voisines dans le département du Nord – à Crespin pour Bombardier et Petite-Forêt pour Alstom – travaillent déjà ensemble sur plusieurs commandes de rames de métro MF19 et surtout le méga contrat du RER nouvelle génération.
La division ferroviaire de Bombardier compte 63 sites de production et d’ingénierie dans 27 pays, et notamment des sites en Allemagne, en Belgique et France. Si ce rapprochement devenait effectif, il y aurait des doublons, le constructeur québécois étant essentiellement présent dans le matériel roulant. Surtout, il n’est pas dit que la commissaire européenne se montre plus ouverte que l’an dernier sur un tel projet. Et surtout rien ne dit que Bombardier ne cède pas aux sirènes chinoises. Mais il devrait assumer alors la pleine et entière responsabilité d’avoir fait entrer le loup dans la bergerie européenne
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