Tout le monde a droit à son orgasme ! », lance Jüne Plã, autrice de « Jouissance Club »




Tout le monde a droit à son orgasme ! , 

lance Jüne Plã, autrice de « Jouissance Club 

INTERVIEW Dans son livre « Jouissance Club », Jüne Plã dresse une cartographie du plaisir pour apprendre à trouver le chemin d’une sexualité décomplexée, égalitaire et heureuse
Propos recueillis par Anissa Boumediene
               Proposé par Ali GADARI

Dans son livre
Dans son livre — Christophe Pouget
  • Après avoir lancé le compte Instagram « Jouissance Club », son auteure, Jüne Plã, en a fait un livre du même nom, en librairie ce mercredi.
  • Un manuel ludique pour apprendre à connaître son corps et le corps de l’autre.
  • Le but : atteindre une sexualité épanouie grâce à une cartographie du plaisir.
Une sexualité équitable, décomplexée, éclairée et orgasmique, ça vous tente ? Et saviez-vous qu’il n’y a pas que la pénétration dans la vie ? Il y a tout ce que le sexe a à offrir aussi ! Vous voulez un dessin ? Ça tombe bien, dans Jouissance Club, une cartographie du plaisir* (éd. Marabout), en librairie ce mercredi, l’illustratrice Jüne Plã en a fait pléthore, des dessins, pour donner naissance à un manuel ludique sur le sexe.
Pour écouter notre entretien audio avec Jüne Plã, un simple clic dans le lecteur audio
« C’est comme un livre de recettes, mais de recettes de cul », résume l’auteure, qui avait d’abord lancé Jouissance club sous la forme d’un compte Instagram, qui rassemble aujourd’hui une communauté de 325.000 abonnés. Désormais, c’est aussi un livre de 250 pages, pour apprendre à connaître son corps, le corps de l’autre, à découvrir ce qui nous procure du plaisir, sans honte, sans tabou, et avec des images (s) explicites pour tout comprendre avant de se lancer.

Jouissance Club, au départ, c’est un compte Instagram. Qu’a apporté l’interaction avec les abonnés pour l’élaboration du livre ?

Tout ! Sans la communauté qui me suit sur Instagram, ma réflexion n’aurait pas été la même. Ma vision sur le féminisme, la sexualité et le genre s’est affinée grâce aux commentaires des gens, aux conversations privées que j’ai eues avec eux. Beaucoup d’erreurs ont ainsi été corrigées en cours de route, notamment l’inclusivité, parce que je ne voulais pas m’adresser à une seule catégorie de personnes.
J’ai posté des publications qui parlaient de femmes ou d’hommes ayant une sexualité hétéro, et j’ai reçu des messages de personnes trans qui se sentaient exclues. Et en particulier un homme trans, qui m’a écrit pour me dire qu’il ne se sentait pas inclus dans ce post, parce que même s’il avait une vulve, il ne se considérait pas comme une femme. Le rencontrer, lui et son copain, parler avec eux, m’a appris l’inclusivité et tout un pan du sexe que je ne connaissais pas.

Justement, ce livre parle à tout le monde, quel que soit son sexe, son genre, son orientation sexuelle, son âge…

Au tout début de Jouissance Club, je représentais la majorité, en étant une femme cisgenre [qui se reconnaît dans le sexe qui lui a été assigné à la naissance] et hétéro. Je n’étais pas au fait de celles et ceux qui ont des expériences différentes. On peut être une femme avec un pénis, un homme avec une vulve. J’ai compris l’importance d’être la plus inclusive possible, c’est pourquoi mon livre est volontairement agenré. Le féminisme n’est pas qu’une histoire de femmes cisgenres contre le patriarcat, c’est une lutte contre toutes les inégalités : je ne veux pas hiérarchiser les combats.
En France, on est très en retard sur l’éducation sexuelle, qui est très lacunaire. On a du mal à parler de sexe de manière pédagogique au-delà de la question des infections sexuellement transmissibles (IST) et du risque de grossesse non désirée. Or, c’est important de parler des différentes orientations sexuelles, des notions de genre, de consentement. C’est important aussi de s’adresser au jeune public, qui ne sait pas toujours où trouver les bonnes réponses à ses questions.

Jeunes ou moins jeunes, les femmes comme les hommes connaissent souvent assez mal leur corps, ce qui leur donne du plaisir et ce qui en procure à leur partenaire. Quels sont les risques de cette méconnaissance dans sa propre sexualité et dans son rapport aux autres ?

L’ignorance entretient les vieux modèles : on est contraints depuis l’enfance d’entrer dans des stéréotypes. Un homme doit être fort, bander, être dominant, et la femme doit être docile. C’est très difficile de sortir de ces schémas. Mais s’il est important de sortir de cette sexualité très « pénétro-centrée » (pour les hétérosexuels), c’est parce que c’est d’un ennui mortel ! Ce n’est pas de notre faute si on a du mal à sortir du schéma « préliminaires, pénétration, éjaculation, et rideau ! ». Ça ne signifie pas qu’on est nul ou que l’on manque d’imagination, c’est simplement qu’on ne nous a jamais rien dit sur la manière d’aborder la sexualité autrement. La seule documentation qu’on a, ce sont les pornos mainstream gratuits, qui peuvent avoir des effets ravageurs.
Par ailleurs, on parle déjà beaucoup du plaisir des personnes qui ont un pénis, donc je me suis interrogée sur la nécessité d’en parler ou non. Puis j’ai décidé que oui, parce que cet ouvrage est inclusif, qu’il y a des femmes dotées d’un pénis, mais aussi des hommes qui ne connaissent pas leur corps, le plaisir prostatique, ne prennent pas le temps de se toucher, de découvrir leurs zones érogènes qui ont aussi un haut potentiel orgasmique. Chez un homme, qu’est-ce que ça dit de son rapport à son corps et au corps de l’autre s’il considère normal de sodomiser sa partenaire, mais refuse d’être sodomisé en retour, parce qu’il considère que ce serait humiliant. Ce point précis remet en question pas mal de notions de genres qui n’ont plus lieu d’être. Moi qui suis de Marseille, je ne compte plus les fois où j’ai entendu des hommes dire « je ne suis pas un PD ». Et ça, je ne veux plus l’entendre ! Qu’y a-t-il de honteux à être homosexuel ou femme ? Les hommes cisgenres hétérosexuels doivent prendre conscience qu’ils ne sont pas au-dessus des autres. En explorant leur rectum, ils découvriront un monde incroyable, des orgasmes d’une rare intensité !

« Préliminaires », « consentement », « non »… Comment cette prise de conscience passe-t-elle aussi par les mots ?

Bien sûr ! C’est un long cheminement d’apprendre ce qu’on aime, d’apprendre à dire non aussi, et d’apprendre à entendre quand quelqu’un dit « non ». En tant que femme cisgenre, je n’ai pas toujours osé dire non, j’ai fait des choses que je regrette aujourd’hui, et j’aurais aimé avoir ce bouquin entre les mains quand j’étais jeune pour pouvoir prendre conscience que mon corps n’appartient pas aux hommes, que j’ai le droit de dire non, de réclamer des choses, comme un orgasme. La notion de consentement, de respect de soi et de l’autre, c’est la clé d’une sexualité heureuse.
C’est aussi pour cela qu’il faut jeter le mot « préliminaires » à la poubelle, car ce terme ne valide la relation sexuelle que lorsqu’il y a eu pénétration. Or, ce que l’on considère comme préliminaires – caresses, cunnilingus ou fellation – sont des manières à part entière de faire l’amour. C’est ce qui aide beaucoup de monde à atteindre l’orgasme, donc il ne faut pas sous-estimer cette partie de la sexualité, c’est plus riche que la seule pénétration. On peut faire un milliard de choses avec les mains et la langue que le pénis ne parviendra pas à faire. Ça ouvre le champ des possibles !

Une image valant mieux que mille mots, dans ce livre, vous parlez, mais vous dessinez aussi…

Je dessine tout ce que le porno ne montre pas, car ce sont des films réalisés par les hommes et pour les hommes, où l’on oublie de considérer le plaisir des personnes dotées d’une vulve. J’ai fait beaucoup de recherches sur Internet portant sur la sexualité, et à part les contenus explicites du porno mainstream – qui ne sont ni représentatifs de la sexualité réelle, ni à vocation pédagogique –, il n’y a pas d’images, seulement des textes, avec lesquels il n’est pas facile de se faire une représentation. Un dessin, c’est simple, ça permet de visualiser le mouvement dont je parle.

Au fil des pages, vous avez beaucoup de paroles rassurantes pour celles et ceux qui pensent ne pas être normaux. Pourquoi en vient-on à penser une telle chose ?

Parce qu’on pense à tort qu’il y a une norme, et c’est en répétant que chacun est unique, qu’on n’a pas à se conformer à ces règles, que l’on parvient à s’affranchir, dans sa sexualité comme dans sa vie. Il ne doit pas y avoir de tabou dans le sexe. On a le droit d’être une femme qui aime ou déteste faire l’amour pendant ses règles, de vouloir devenir une femme fontaine et d’apprendre comment y parvenir. Tout le monde est différent : on n’est pas obligé de tout faire, de tout tester, d’avoir des orgasmes.
L’important est de s’écouter, et aussi de communiquer. Alors qu’on vit dans une société où le sexe est omniprésent, où l’on peut acheter librement un sex-toy, beaucoup de gens s’ennuient dans leur sexualité. Pour moi, la vraie révolution sexuelle est féministe et aura lieu le jour où tout le monde aura droit à son orgasme, car tout le monde y a droit ! Elle aura lieu quand le sexe sera plus égalitaire, quand on prendra en compte le désir de l’autre, que l’on aura appris à connaître le corps de l’autre, à lui donner du plaisir sans forcément en attendre en retour. On peut voir ce livre comme un manuel pour apprendre à faire l’amour.
Jouissance Club, une cartographie du plaisir, éditions Marabout, en librairie le 15 janvier, 16,90 euros.

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