Offensive à Raqqa : « l'État Islamique n'existe plus »




  Offensive à Raqqa : « l'État Islamique  n'existe plus », (Proposé par ALI)



- Le 6 juin les Forces Démocratiques Syriennes soutenues par la coalition américaine, sont entrées dans Raqqa défendue par Daech. 

 Les forces arabes et kurdes, soutenues par les Américains, ont engagé l'offensive contre l'EI à Raqqa et sont entrées dans l'est de la ville le 6 juin. Que représente Raqqa pour l'EI aujourd'hui? La reconquête de Raqqa signifie-t-elle la chute de l'État Islamique?


Hadrien DESUIN. - Raqqa ne représente pas grand-chose dans la symbolique du Califat. Une ville comme Mossoul est plus intéressante car elle frappe l'imaginaire de la mythologie islamique. Tout comme Damas d'où est partie la reconquête de Saladin pour chasser les croisés de Jérusalem. Raqqa a toutefois été la plus grosse ville syrienne sous occupation de l'État islamique. Elle était donc la capitale économique de Daech en Syrie. Elle était très bien située quand l'organisation djihadiste était au faîte de sa puissance en 2014- 2015. 300 000 habitants, à très grande majorité arabes sunnites, ont donné de la substance à l'État islamique. Désormais encerclée, l'issue militaire de Raqqa ne fait pas de doute. Le siège sera long mais ce n'est qu'une question de temps. Les assaillants vont sans doute prendre le temps de laisser s'affaiblir les assiégés en coupant leur ravitaillement. En attendant, ils pourraient bien conforter leurs positions dans toute la province de Raqqa.
D'un point de vue strictement territorial, «l'État islamique» n'existe plus. Les liaisons sont très compliquées entre la Syrie et l'Irak. Il ne reste que des grosses poches de résistances, incapables de se coordonner entre elles. Plus aucune zone n'est sûre. Ces dernières vont persister encore longtemps car elles sont tenues par des fanatiques prêts à mourir plutôt que de se rendre. Dans certains quartiers très urbanisés, les petites équipes de snipers ou de tireur RPG peuvent considérablement ralentir la progression d'une troupe entraînée. Il faut 10 assaillants pour un défenseur à moins de raser la ville. Il s'agit toutefois d'un combat d'arrière-garde. Depuis que les contre-offensives des coalitions américaines et russes ont commencé, l'EI est revenu au modèle plus classique d'Al Qaïda: internationalisation du terrorisme et guérillas franchisées dans tout le monde musulman. N'oublions pas que Daech n'est au départ qu'une dissidence d'Al Qaïda en Irak et au Levant.
L'idéologie de Daech, et du djihadisme en général, ne peut pas vivre en dehors de la conquête. Dès qu'elle fut arrêtée aux portes de Bagdad, à Palmyre et dans Kobané, Daech a dû se réinventer pour survivre et maintenir sa folle cavalcade meurtrière.
Quels sont les intérêts des États-Unis à Raqqa?


Les États-Unis ont voulu prendre Raqqa avant les Russes, les Iraniens et l'armée syrienne. Quitte à se fâcher avec les Turcs qui redoutent par-dessus tout l'extension du Kurdistan syrien. La prise de Raqqa marquera symboliquement la défaite de Daech en Syrie et donc la victoire de la coalition américaine. Pour Donald Trump, l'enjeu est d'importance après des années d'extrême prudence de la part de Barack Obama sur ce dossier. D'un point de vue géopolitique, la coalition irano-russe serait contrainte de laisser la vallée de l'Euphrate aux alliés des Américains. Il s'agit de confiner le plus possible la Russie et l'Iran qui sont toujours vus à Washington comme les principaux adversaires de l'Amérique à l'échelle du monde.
Les Forces Démocratiques Syriennes (FDS) soignent malgré tout leurs relations avec les Russes et donc avec le régime syrien car ils doivent se coordonner avec eux dans la poche d'Afrin, coupée du cœur du Rojava qui va de Kobané à Hassaké. En prenant Raqqa, les Américains veulent aussi rassurer l'Arabie Saoudite, le grand allié de Donald Trump: la Syrie de l'Est ne tombera pas dans l'escarcelle chiite. Cette vision saoudienne et confessionnelle est quelque peu caricaturale car le régime de Bachar a toujours su composer avec les populations sunnites dans le passé. En faire une secte arc-boutée sur un clan alaouite est très simpliste. La Syrie des années 2000 savait aussi jouer des rivalités entre l'Iran et l'Arabie Saoudite.
Qui tiendra la ville après le départ des djihadistes?
Les membres arabes de l'alliance FDS sont en première ligne mais les Kurdes auront une place incontournable. Toutefois, ils devront s'appuyer impérativement sur les grandes familles de la ville qui ont subi l'oppression de l'État islamique pendant plus de cinq ans. Les Kurdes pourront réoccuper les quartiers dont ils ont été expulsés mais doivent rester en dehors des quartiers arabes s'ils veulent gagner la paix. Dans l'idéal, il faudrait qu'une municipalité sous l'égide des notables de Raqqa prenne les affaires socio-économiques en main, laissant aux FDS la défense militaire de la ville.
Pourquoi la coalition russe ne participe-t-elle pas à cet assaut?
Parce que les Américains et les Russes ne sont jamais parvenus à se mettre d'accord sur le périmètre d'une éventuelle coalition commune. Les Russes sont alliés aux Iraniens, au Hezbollah et à l'armée de Bachar Al-Assad. Ni le Pentagone, ni la CIA ne peuvent accepter de combattre avec les alliés de la Russie. Ils soutiennent des rebelles sunnites qui se battent justement contre l'armée syrienne dans le sud du pays. Faute de s'entendre sur un partage des zones d'influence, la partition de la Syrie se fait par les armes. Chaque camp tente de prendre le maximum de terrain sur les décombres de Daech, un peu comme ce qui s'était passé à Manbij et Al-Bab.


Pour la bataille de Raqqa, les forces soutenues par la Russie sont encore à 100km de la ville. Laquelle est déjà ceinturée par les FDS. Il est donc trop tard pour les troupes de Damas de participer à la prise de la ville. L'objectif est de consolider les territoires gagnés à l'est d'Alep et dans le centre du pays, autour de Palmyre. Il y a aussi les quartiers de Der Ez Zor à défendre, l'autre grande ville sur l'Euphrate. L'enclave qui résiste depuis des années à Daech est de nouveau sous l'intense pression des djihadistes
Le Figaro
Spécialiste des questionsinternationales, Hadrien DESUIN 





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